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18 décembre 2011

RDC : Tshisekedi appelle à l'arrestation du président Kabila

Dans un message au peuple congolais ce dimanche, Etienne Tshisekedi, qui conteste la réélection du président Joseph Kabila, vient de lancer un appel à l'insurrection. Le leader de l'UDPS "démet" le gouvernement et les gouverneurs provinciaux et demande de "rechercher" Joseph Kabila "partout où il se trouve" et de l'amener "ici, vivant". Il exhorte également l'armée et la police congolaise de lui faire allégeance.

Meeting Tshisekedi Bruxelles 0'.pngEtienne Tshisekedi accélère les événements en République démocratique du Congo (RDC). Après avoir contesté la réélection de Joseph Kabila, le leader de l'opposition vient de lancer un appel au soulèvement populaire et demande de capturer "vivant" le président sortant. Voici l'essentiel de sa déclaration que l'on peut écouter sur les sites Direct.cd et Rfi.fr :

"Je vous demande de garder votre calme et votre sérénité, parce que quelqu'un qui est vainqueur ne s'agite pas, ne se trouble pas. Au contraire, il reste serein. Quant aux fauteurs en eau trouble, à commencer par Monsieur Kabila, je vous demande, à vous tous, de rechercher ce monsieur partout où il est dans le territoire national et de me l'amener ici vivant. Celui qui m’amènera Kabila ici ligoté, aura une récompense très importante. De même, le gouvernement de monsieur Kabila est démis depuis ce jour. Les départements ministériels seront dirigés par des secrétaires généraux jusqu’à nouvel ordre. Officiers, sous-officiers, caporaux et soldats de l'armée nationale congolaise, je vous enjoint de n'obéir qu'à l'autorité légitime. La police nationale souveraine, vous ferez de même".

La semaine prochaine risque donc d'être très tendue en RDC et particulièrement à Kinshasa, où mardi, Joseph Kabila doit célébrer son investiture et où vendredi, Etienne Tshisekedi veut prêter serment au stade des martyrs. Dès samedi, la RDC risque de se retrouver avec deux "présidents" de la république… et une crise politique sérieuse.

Christophe RIGAUD

Photo : E. Tshisekedi en 2011 à Bruxelles. Ch. Rigaud (c) www.afrikarabia.com

RDC : Deux "présidents" dès la semaine prochaine

20 jours après une élection présidentielle émaillée de nombreuses irrégularités, la République démocratique du Congo (RDC) assistera la semaine prochaine à deux "prestations de serment" . Le président officiellement réélu Joseph Kabila sera investi mardi à Kinshasa et son opposant Etienne Tshisekedi, qui conteste les résultats, veut prêter serment vendredi au stade des Martyrs. Le "syndrome ivoirien" -2 "présidents" pour un fauteuil- guette donc la RD Congo.

Logo Elections 2011.jpgDans une longue conférence de presse ce dimanche, le leader de l'UDPS et candidat "officiellement battu", Etienne Tshisekedi, s'est déclaré "Président élu" de la RDC et veut prêter serment vendredi prochain au stade des Martyrs de Kinshasa. Selon les résultats de la Commission électorale (CENI), que la Cour suprême a confirmé vendredi, le président Kabila a été réélu avec 48,95% des voix contre 32,33% à l'opposant Etienne Tshisekedi. Mais depuis la publication des premiers résultats provisoires, l'opposition conteste formellement la réalité des chiffres de la CENI. Selon l'UDPS, le "Président élu de la République" se nomme "Etienne Tshisekedi". Le parti d'opposition explique que d'après "les procès-verbaux de chaque bureau de vote affichés le jour  des élections sur toute l’étendue de la République", le candidat de l'UDPS est arrivé en tête. Un document, de plus de 500 pages, "donne le Président Etienne Tshisekedi gagnant avec 56.2% des vote contre 35,91%  pour le président sortant".

Il faut dire que selon plusieurs missions d'observation internationales, la présidentielle du 28 novembre dernier a été entachée de multiples irrégularités. Les observateurs américains du Centre Carter ont dénoncé "la crédibilité du scrutin", alors que l'archevêque de Kinshasa, a estimé que "les résultats ne sont pas conformes à la réalité". L'Union européenne, également présente, confirme le "manque de transparence du scrutin" et constate notamment que plusieurs résultats observés par ses équipes sur le terrain "ne correspondent pas" avec ceux de la Commission électorale (CENI). Le président Joseph Kabila, qui doit prêter serment mardi, a rejeté toutes ces accusations. Même s'il a reconnu que des "erreurs" ont été commises durant le scrutin, elles ne sont pas de nature, selon lui, "à remettre en cause la crédibilité" de sa réélection.

Dans ce contexte "explosif" (l'expression est du ministre français des Affaires étrangères), Etienne Tshisekedi a déclaré vouloir "prêter serment vendredi prochain devant le peuple réuni au stade des martyrs" à Kinshasa. La semaine prochaine, la RDC risque de s'enfoncer dans une crise politique durable, qui n'est pas sans rappeler les dernières élections ivoiriennes : deux "présidents" se disputant la victoire. Seule différence inquiétante avec la Côte d'Ivoire, la communauté internationale s'avance plus divisée que jamais. Les occidentaux hésitent à intervenir dans un scrutin qu'ils ont laissé volontairement (mal) organiser aux Congolais et les voisins africains se contenteraient bien d'une réélection "sans vague" de Joseph Kabila… et tant pis pour les irrégularités du processus électoral. Pour l'instant "la rue" congolaise est calme, mais la semaine qui arrive s'annonce décisive pour l'avenir du processus électoral en cours, le cycle d'élections devant se poursuivre jusqu'en 2013.

Christophe RIGAUD

17 décembre 2011

RDC : Qui boudera l'investiture de Joseph Kabila ?

La cérémonie d'investiture de Joseph Kabila, prévue mardi 20 décembre, sera l'occasion pour le président congolais de compter ses alliés… essentiellement africains. Sa réélection est en effet très contestée et suscite de nombreuses critiques en Europe et aux Etats-Unis. Son investiture compte une première défection dans le camp occidental : le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, qui n'assistera pas à la prestation de serment de Joseph Kabila.

Capture d’écran 2011-12-17 à 18.22.58.pngLa Cour suprême de République démocratique du Congo (RDC) a annoncé vendredi, avec un peu d'avance, la réélection du président Joseph Kabila, après un scrutin émaillé de nombreuses irrégularités et de forts soupçons de fraudes. Il y a quelques jours sur ce site, Thierry Vircoulon, responsable de l'Afrique centrale à l'International Crisis Group (ICG), estimait que "Joseph Kabila (était) aujourd'hui un président mal élu" et qu'il "(risquait) d'y avoir peu de gens importants à son investiture du côté des bancs occidentaux".  La première absence remarquée sera celle du ministre des Affaires étrangères de l'ancienne puissance coloniale, Didier Reynders. Dans un communiqué, le ministre belge a regretté que la Cour suprême de justice congolaise "n'ait pas usé de ses prérogatives pour un examen plus approfondi, critique et indépendant des résultats". La Belgique sera donc représentée par son ambassadeur à Kinshasa, Dominique Struye de Swielande.

La Belgique, comme l'Union européenne ou les Etats-Unis mettent en doute la transparence et la crédibilité des résultats des élections générales en RDC. Didier Reynders a "regretté que de trop nombreuses déficiences et irrégularités aient dû être constatées lors de la collecte et de la compilation des résultats". "Bien que ces déficiences ne paraissent pas de nature à remettre en cause l'ordre des résultats, elles affectent malheureusement l'intégrité du scrutin", a souligné le ministre belge.

Concernant la symbolique prestation de serment du président Kabila, reste à savoir ce que feront les autres pays de l'Union européenne et particulièrement la France, très critique sur la crédibilité de ces élections. Les regards seront également tournés vers Washington, qui a aussi clairement contesté les résultats de la Commission électorale congolaise (CENI), mais n'a qui pas encore décidé quelles personnalités seront présentes mardi prochain à l'investiture de Joseph Kabila.

Du côté des voisins africains de la RDC, il est fort à parier que de nombreux présidents seront présents mardi à Kinshasa. A l'image de l'Afrique du sud qui a jugé les élections en RDC "globalement OK". La cérémonie de prestation de serment de Joseph Kabila risque donc d'afficher au grand jour les divisions entre "occidentaux" et "africains". Il faut dire que depuis quelques années, le président Kabila "soigne" ses voisins ou évite de rentrer en conflit ouvert avec eux. Rwanda, Congo-Brazzaville, Angola, Ouganda ou Afrique du Sud…  ces pays préfèrent tous miser sur la continuité d'une mandature Kabila, plutôt que de tenter l'aventure en terre inconnue.

Le président congolais, Joseph Kabila doit prêter serment mardi 20 décembre à Kinshasa. L'opposition, qui conteste sa réélection, appelle à des journées "villes mortes" en début de semaine, dans tout le pays.

Christophe RIGAUD

15 décembre 2011

RDC : La diaspora pro-Tshisekedi demande "une plus grande implication de la France"

Plusieurs associations de la diaspora congolaise soutenant Etienne Tshisekedi en France manifesteront samedi 17 décembre à Bordeaux pour contester la réélection de Joseph Kabila à la tête de la République démocratique du Congo (RDC). Un mémo sera remis au Ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, pour demander "l'implication effective de la France" pour que l'issue des élections "soit conforme aux aspirations du peuple congolais". Rencontre avec Jean-Michel Mampuya, l'un des organisateurs.

Image 5.png- Afrikarabia : Jean-Michel Mampuya, vous représentez la Dynamique Tshisekedi Président (DTP) en France. De nombreuses irrégularités ont entaché les élections en République démocratique du Congo (RDC) et des tentatives de fraude massive ont été relevées par plusieurs ONG internationales. Vous étiez en RDC il y a encore quelques jours, comment réagit la population pour le moment ?
 
- Jean-Michel Mampuya : Elle est en colère, sereine et calme. Elle sait que celui qui a été élu c’est Etienne Tshisekdi. Elle le considère donc comme le Président de la République et attend, certes avec impatience, le mot d’ordre qu’il nous donnera.
De plusieurs endroits du pays, nous recevions tous les jours des coups de fil des gens qui "festoyaient" déjà la fin du régime Kabila, avant l’annonce de la CENI, tellement l’évidence du terrain faisait apparaître Tshisekedi comme vainqueur. Quand je dis « festoyaient », entendez par là avec musiques, chants et boissons… Il ne s’agissait pas d’une simple satisfaction. Autant comprendre ainsi à quel niveau se situait l’attente populaire. Les gens disaient qu’ils n’envisageaient pas 5 ans supplémentaires avec Joseph Kabila. Le président Kabila a fait son temps (10 ans) J’ose même dire qu’il a beaucoup travaillé (rires). Il est donc fatigué ! Qu’il laisse cette charge à celui qui a été choisit  par le peuple. Tous les artifices de tricherie et fraude ont été déjoués par le peuple. La dernière astuce à leur disposition était la fameuse opération de compilation. Une démarche opaque et inutile qui sert à « traiter » les chiffres. Le peuple ne veut pas de « traitement ». Il veut la sommation des chiffres issus de chaque bureau de vote.  Les résultats du premier au dernier bureau. Pas question de traitement ou de compilation. On veut les chiffres bruts ! C’est le prix à payer pour la paix. C’est l’opération la plus simple et la plus transparente à réaliser, étant donné que chaque parti et chaque candidat a en sa possession, le PV de chaque bureau.

- Afrikarabia : L'UDPS a appelé à manifester pacifiquement pour "protéger la victoire" d'Etienne Tshisekedi. Croyez-vous que ces manifestations peuvent replonger le pays dans la violence ?

- Jean-Michel Mampuya : Les manifestations populaires à l’initiative des partis politiques sont pacifiques. Je tiens à préciser que le risque est de voir le peuple congolais être victime d’une  répression sauvage. La violence, la brutalité ne pourront venir que d’un seul camp : celui qui a des armes ! On le voit tous les jours avec des brimades, des assassinats et autres arrestations arbitraires. A ce sujet, je voudrai interpeller la communauté internationale (en particulier la France dont la coopération visible à ce jour ne se limite qu’à former des policiers) sur les conséquences des fameux véhicules à  jet d’eau chaude utilisés par les forces de police congolaises. Les dégâts sur la peau sont suspects. Les brûlures et blessures laissent penser, sans être spécialiste, qu’il s’agit de produits beaucoup plus nocifs que de l’eau chaude. La culpabilité des répressions qui pourraient subvenir incombera directement au pouvoir sortant avec une co-responsabilité de la CENI qui tente de se dédouaner en passant la patate chaude à la Cour suprême de Justice.
 
- Afrikarabia : Vous allez remettre samedi 17 décembre à Alain Juppé un mémo sur la situation en RDC. Qu'attendez-vous de la communauté internationale et de la France en particulier ?
 
- Jean-Michel Mampuya : Nous attendons essentiellement que cette fameuse "nébuleuse internationale" respecte le peuple congolais. Nous ne sommes pas des sous-hommes. Les valeurs démocratiques imposent le respect du verdict des urnes, et cela doit valoir également pour nous congolais. On entend plus souvent des appels au calme plutôt que d’entendre des appels à la vérité des urnes. Je n’ai entendu aucun ambassadeur en RDC appeler la CENI à la vérité des urnes. On a plutôt entendu des menaces précises en langage diplomatique.
Si le courage politique manque à la communauté internationale et à la France en particulier d’appeler à la transparence des résultats, alors qu’elles laissent les congolais gérés l’issue du processus à sa manière. Et je rappelle à nos partenaires occidentaux l’article 35 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » Si cette déclaration ne vaut que pour l’occident, alors autant nous le dire. Qu’ils cessent d’agiter à tort la CPI , dont l’objectif a été visiblement dévoyé au profit des seuls vainqueurs de crises politiques. Le peuple congolais veut et va se prendre en charge.

- Afrikarabia : Comment réagit la diaspora congolaise et que peut-elle faire depuis la France ?

- Jean-Michel Mampuya : Dans manière spontanée, la diaspora congolaise où qu’elle se trouve manifeste son refus d’un "hold-up électoral". On le voit aux USA, en Allemagne, en Belgique, au Royaume-Uni, en Suisse, etc…. Nous faisons pression auprès de la communauté internationale afin qu’elle agisse de concert avec les congolais pour que "le groupe" qui est au pouvoir et les affairistes qui les soutiennent respectent tout simplement le choix du peuple congolais.

Une marche pacifique sera organisée par la communauté congolaise de Bordeaux, samedi 17 décembre 2011 à partir de 14h00. Au départ de la Gare St Jean jusqu'à la place du Grand Théâtre de Bordeaux. 

RDC : Mobilisation test pour Tshisekedi

Depuis l'annonce de la victoire de Joseph Kabila à l'élection présidentielle en République démocratique du Congo (RDC), l'opposant Etienne Tshisekedi (UDPS) continue de contester sa défaite. Son parti cherche la meilleure stratégie pour "faire respecter le choix du peuple congolais" et "protéger la victoire" de Tshisekedi. L'UDPS appelle donc la population à des marches pacifiques dans tout le pays.

Image 6.pngTous les observateurs internationaux s'accordent sur une chose : le scrutin présidentiel du 28 novembre dernier en RDC manque sérieusement de transparence... voir de crédibilité. L'Europe, les ONG et maintenant les Etats-Unis critiquent fortement le déroulement du processus électoral : ses irrégularités, ses soupçons de fraude et sa logistique chaotique. Joseph Kabila, lui-même, reconnaît "des erreurs" et des "irrégularités", mais pour le président réélu et pour la Commission électorale congolaise (CENI) :  ces problèmes ne sont "pas en mesure de changer le résultat final". L'UDPS crie au "hold-up électoral" et brandit des chiffres des bureaux de vote... très différents de ceux publiés par la Commission électorale.

Pour "sauver le candidat Tshisekedi" et sortir d'une crise politique et institutionnelle qui s'annonce longue et incertaine, l'UDPS compte sur la population pour "protéger la victoire" de leur candidat. Un appel a donc été lancé pour organiser des manifestations pacifiques dans tout le Congo. Déjà mardi 13 et mercredi 14 décembre, la police et l'armée ont dispersé des marches de protestation pacifiques dans l'Est du pays. Plusieurs personnes ont été blessés. A Lubumbashi, mercredi, des militants de l'UDPS étaient également descendus dans la rue pour manifester leur opposition à la victoire de Joseph Kabila. Là encore, la police a violemment dispersé la marche, faisant plusieurs blessés.

L'appel à manifester constituera donc un test important pour le camp Tshisekedi. Est-il en mesure de mobiliser fortement la population ? Difficile de le dire aujourd'hui. Deux éléments démontrent qu'il sera très complexe de créer de grands rassemblements populaires dans les rues :
- la police et l'armée congolaise, très bien équipées et très bien formées à la "gestion de foule" réussissent pour le moment à empêcher toute manifestation de masse en "bouclant" le quartier et en coupant la circulation. Bilan : peu de monde dans les rues et une répression violente plus facile à mettre en place.
- ensuite, il semble que la "mayonnaise" ne prenne pas vraiment auprès de la population. On prévoyait une "flambée" de violence dans les rues à l'annonce des résultats... en fait, il n' y a eu que quelques échauffourées, très vite maîtrisées par la police et l'armée.

D'ailleurs en cas d'échec dans la rue, l'UDPS souhaite rapidement porter la contestation sur le plan politique. Le secrétaire général de l'UDPS, Jacquemain Shabani, a déjà déclaré mercredi que "la crise post-électorale" en République démocratique du Congo (RDC) "nécessite une solution politique au lieu d'un recours à la violence".

Christophe RIGAUD

RDC : Washington très critique sur le scrutin présidentiel

La position américaine était particulièrement attendue sur l'élection présidentielle contestée en République démocratique du Congo (RDC)... et elle n'est pas tendre avec le processus électoral. L'administration Obama estime que le scrutin a été "gravement entaché d'irrégularités" et n'est pas "à la hauteur des avancées démocratiques observées dans d'autres élection récentes en Afrique".

Image 5.pngLe département d'Etat américain s'est exprimé sur les élections congolaises du 28 novembre dernier en RDC. Le ministère américain des Affaires étrangères déclare que le scrutin a été “gravement entaché d’irrégularités" et "manque de transparence". Pour l'administration Obama, le processus électoral en RDC n'est pas "à la hauteur des avancées démocratiques observées dans d’autres élections récentes en Afrique". Se basant sur les différentes missions d'observation, comme le Centre Carter, l'Union européenne, mais aussi sur les propres données de l'ambassade US à Kinshasa, la porte-parole du ministère américain des Affaires étrangères constate à son tour les nombreuses irrégularités du scrutin.

Comme, les autres observateurs étrangers, les Etats-Unis ne sont pas en mesure de démontrer que les irrégularités du scrutin "aient été suffisants pour modifier son résultat” (à savoir la réélection du président Joseph Kabila).

Les Etats-Unis rajoute donc un peu de pression sur les autorités congolaises afin "d''examiner de près les irrégularités" et à "procéder avec un maximum d’ouverture et de transparence". L'administration américaine propose même une assistance technique afin de mener l'enquête.

Christophe RIGAUD

14 décembre 2011

RDC : "Il faut une contre-expertise des résultats" pour Thierry Vircoulon d'ICG

Après le Centre Carter et l'église catholique, l'Union européenne confirme dans un rapport que les élections présidentielles en République démocratique du Congo (RDC) manquent de transparence. L'opposition congolaise, qui conteste la réélection de Joseph Kabila, a décidé de déposer un recours devant la Cour suprême... sans grand espoir de voir leurs revendications aboutir. Comment faire pour sortir de la crise politique ? Le responsable d'International Crisis Group (ICG) pour l'Afrique centrale, Thierry Vircoulon, estime pour Afrikarabia qu'il faudrait "une contre-expertise des résultats par un tiers indépendant".

Image 2.png- Afrikarabia : Thierry Vircoulon, vous êtes actuellement à Kinshasa pour l'International Crisis Group, quelle est la situation en RDC, 5 jours après l'annonce de la réélection de Joseph Kabila ?

- Thierry Vircoulon : A Kinshasa, les quartiers qui ont voté pour l'opposition ont un peu la gueule de bois aujourd'hui. Les quelques tentatives de manifestations dans l'Est du pays ont été étouffées dans l'oeuf par les forces de sécurité qui ont maintenant une technique bien rodée pour empêcher tous rassemblement. Au Katanga, il y a des débuts de représailles sur les Congolais originaires du Kasaï, ce qui était malheureusement attendu. Nous sommes actuellement dans une deuxième phase, après les élections, dans laquelle l'opposition cherche une stratégie pour rebondir. L'UDPS semble nourrir des espoirs auprès de la communauté internationale... des espoirs qui ne sont pas forcement fondés. Et si ces espoirs sont déçus, il n' y aura pas 36 choses à faire...

- Afrikarabia : Vital Kamerhe a déposé au nom de l'opposition, un recours devant la Cour suprême congolaise, avec un dossier très complet sur les nombreuses irrégularités du scrutin. Que peut-on attendre de ce recours ?

- Thierry Vircoulon : Strictement rien ! Absolument rien ! L'opposition le sait, mais veut tout de même jouer la carte de la légalité.

- Afrikarabia : Etienne Tshisekedi a en effet qualifié la Cour suprême "d'officine privée au service de Kabila". Comment désamorcer alors la crise politique qui se profile ?

- Thierry Vircoulon : La solution est toujours la même pour International Crisis Group : il faut de la transparence et donc une contre-expertise des résultats. Ce que voudrait l'UDPS, c'est qu'une équipe internationale vienne sur place pour contre-vérifier les résultats. La question étant de savoir, quelle organisation peut faire cela ? Le centre Carter qui a déjà beaucoup travailler sur ces élections pourrait le faire, mais cela dépend évidemment de la position américaine. Ce jeudi au Sénat américain, il y a une audition sur la RDC. Selon moi, ce serait une bonne chose. Mais pour cela, il faudrait une grosse pression politique extérieure sur le président Joseph Kabila. Les américains, l'Union européenne et l'Union africaine doivent être d'accord sur la question.... et ce n'est pas sûr. Il faut ensuite ne pas relâcher la surveillance sur les résultats des élections législatives qui ont été un peu occultées par la présidentielle.

- Afrikarabia : Cette contre-expertise est-elle difficile à réaliser ?

- Thierry Vircoulon : Non ce n'est pas très compliqué techniquement. Par contre, c'est compliqué politiquement Il ne s'agit évidemment pas d'aller recompter tous les bulletins de vote. L'opposition a déjà construit un gros dossier sur le sujet, avec de nombreux cas précis d'irrégularités. Les partis politiques d'opposition peuvent le faire, mais il serait intéressant qu'une expertise soit réalisée par un tiers indépendant... que ce soit le Centre Carter ou une autre organisation spécialisée dans les élections. Mais politiquement, c'est complexe. Le gouvernement congolais joue beaucoup sur la montre en espérant que la contestation va diminuer. Ce que l'on peut tout de même dire, c'est qu'après les rapports du Centre Carter, de l'église catholique et de l'Union européenne qui ont tous dénoncé les résultats de la Commission électorale (CENI), Joseph Kabila est aujourd'hui un président mal élu. Il risque d'y avoir peu de gens importants à son investiture du côté des bancs occidentaux.

- Afrikarabia : Comment peut évoluer la situation ?

- Thierry Vircoulon : Si actuellement, la situation sécuritaire semble tenue, l'année 2012 ne s'annonce pas bien en RDC. Les processus électoraux bâclés qui aboutissent à une impasse politique, on voit ce qui cela donne au Burundi aujourd'hui et en Centrafrique. S'il n'y a pas de problèmes tout de suite, il y a des problèmes plus tard. Au Burundi, il n'y a pas eu de violences juste après les élections, mais deux mois plus tard, la tension est montée crescendo.

Propos recueillis par Christophe RIGAUD

Photo : Thierry Vircoulon à Paris en octobre 2011 (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com

13 décembre 2011

RDC : L'UE confirme les irrégularités du scrutin

Après la réélection très contestée de Joseph Kabila à la tête de la République démocratique du Congo (RDC), la mission envoyée par l'Union européenne (UE) vient de publier son premier rapport. L'UE relève "un manque de transparence et des irrégularités" dans le scrutin. L'Union européenne note que plusieurs résultats observés par ses équipes sur le terrain "ne correspondent pas" avec ceux de la Commission électorale (CENI).

Capture d’écran 2011-12-13 à 22.05.23.pngDans un premier rapport consécutif aux élections présidentielle et législatives en République démocratique du Congo le 28 novembre dernier, l'Union européenne déplore "le manque de transparence et les irrégularités du scrutin, dans la collecte, la compilation et la publication des résultats". Ces irrégularités peuvent-ils inverser la tendance et changer le résultat de l'élection présidentielle ? L'UE ne répond pas à cette question et se contente de lister les problèmes survenus pendant et après le vote :

- la mission d'observation de l'Union européenne observe que près de 3,2 millions d'électeurs ont voté sans être préalablement inscrits sur les listes électorales, sur dérogations ou des listes d'omission, soit plus de 17% des votants (en 2006 ce taux était de seulement 8%),

- la transmission des plis sécurisés à la CENI n'a pas été systématique,

- le système de transmission des résultats pas satellite n'était pas présent partout,

- plusieurs témoins des candidats ou des partis politiques ont été empêchés d'observer l'ensemble des étapes de compilation des résultats,

- 4.875 bureaux de vote (dont 2.020 à Kinshasa) n'ont pas été comptabilisés, soit 7,63% du total national,

- plusieurs résultats de bureaux de vote rendus publics le soir du dépouillement et observés par les équipes de l'UE ne correspondent pas avec ceux publiés par la CENI (la Commission électorale congolaise),

Concernant la réaction des candidats et le refus de l'opposition de reconnaître les résultats de la CENI, l'Union européenne déclare "qu'il est de la responsabilité des acteurs politiques et des institutions congolaises de mener leur propre examen des résultats des élections et d'identifier les solutions à la situation actuelle. La MOE UE poursuit par ailleurs son évaluation attentive de la compilation des élections législatives jusqu'à l'achèvement du processus".

Un rapport final de l'Union européenne sera rendu public après la publication des résultats définitifs des élections législatives, fixée le 13 janvier 2012.

Christophe RIGAUD

12 décembre 2011

RDC : Les drôles de chiffres des élections congolaises

Peut-on croire la validité des résultats de l'élection présidentielle en République démocratique du Congo (RDC) ? Les observateurs internationaux parlent "d'irrégularités graves", le Centre Carter va plus loin et estime que les chiffres de la Commission électorale "manquent de crédibilité". Mais derrière l'organisation chaotique, voir surréaliste du scrutin, se cache de chiffres "suspects", notamment sur la participation.

Capture d’écran 2011-12-12 à 20.48.54.pngEn lisant le rapport du Centre Carter sur le déroulement des élections en République démocratique du Congo, on ne peut qu'être dubitatif sur le crédibilité des résultats annoncés par la Commission électorale congolaise. La CENI a en effet proclamé vendredi la victoire (provisoire) du président sortant Joseph Kabila (48,95%) face à l'opposant Etienne Tshisekedi (32,33%). Dans un long rapport, le Centre Carter et ses 70 observateurs ont noté  des "irrégularités graves" dans le fonctionnement des Centres locaux de compilation (CLCR), chargés de rassembler les résultats des quelques 64.000 bureaux de vote.

Organisation chaotique

L'organisation du scrutin s'est effectuée avec beaucoup de retard et dans le plus grand désordre. L'International Crisis Group prévoyait des élections "bâclées"… le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles l'ont été. Le Centre Carter relève de nombreux problèmes à Kinshasa, favorable Etienne Tshisekedi, et à Lubumbashi, où Joseph Kabila a fait des scores très élevés.

Le Centre Carter note qu'à Kinshasa (favorable à l'opposition) "près de 2.000 plis de résultats de bureaux de vote ont été perdus (environ 350.000 électeurs) et ne seront jamais comptés", et que 1.000 autres plis ont été égarés dans le reste du pays (environ 500.000 électeurs). Au Katanga, le Centre Carter note le cas de la circonscription de Malemba-Nkulu, "où le taux de participation est de 99,46%, et Joseph Kabila y totalise 100% des voix" ! C'est également le cas dans de nombreux autres bureaux du Katanga.

En revanche, au Kasaï occidental, la région d'origine d'Etienne Tshisekedi, l'UDPS a obtenu de très bons scores, "mais avec des taux de participation inférieurs à la moyenne nationale", qui était de 58,81%.

Chiffres "suspects"

Capture d’écran 2011-12-12 à 20.54.02.pngDans son blog Congo Siasa, Jason Stearns relève quelques données "incongrues" dans les chiffres avancés par la CENI, la Commission électorale, présidé par un proche du président Kabila. Certains observateurs ont déclaré à Jason Stearns avoir détecté des "taux de participation suspects". Les observateurs ont tout simplement multiplié le nombre de votants par le nombre de minutes nécessaires au vote. Si le total est supérieur à 20 heures d'ouverture de bureau de vote, "il est probable que quelque chose n'allait pas dans ce bureau", résume Jason Stearns. Le blogueur note également des taux d'enregistrement sur les listes électorales anormalement élevés (plus du double du taux de croissance national). A Manono, le nombre d'électeurs a augmenté de 52%, alors que la croissance nationale augmentait de 26%… et les cas sont très nombreux dans les régions réputées pro-Kabila.

Une ONG belge, l'APRODEC, note également des bizarreries au niveau des résultats du vote dans l'Equateur (très opposée au président Kabila). Alors que "le taux de participation est inférieur à celui de 2006, que le nombre de suffrages exprimés est aussi inférieur à celui de 2006 et que trois personnes originaires de ladite Province (Nzanga Mobutu, Kengo wa Dondo et Adam Bombole) se sont portés candidats, Joseph Kabila parvient tout de même à augmenter son score de 2006 de 342 % ! (69.563 voix en 2006 et 238.169 voix en 2011).

De manière générale, on note une augmentation très forte des inscrits et de la participation dans les zones proches de Joseph Kabila et un enrôlement plus faible et une participation moindre dans les régions plutôt favorables à l'opposition… On voit bien que si des tentatives de fraudes ont bien eu lieu, c'est en "gonflant" artificiellement le vote pro-Kabila et en "minorant" le vote Tshisekedi que le tour de passe-passe a pu s'opérer. Notamment dans les fameux Centres de compilation, où le Centre Carter a observé "des sacs de bulletins empilés, piétinés ou renversés sur le sol…" (voir photo). L'ONG américaine estime pour le moment que ces constatations "ne remettent pas en cause l'ordre des résultats des candidats tels qu'annoncés par la CENI". Car la difficulté dans cette histoire, c'est qu'il sera très difficile, voir impossible à l'opposition de prouver toutes ces irrégularités devant la justice. Deux raisons à cela : une partie des preuves ont été perdues, ainsi que les PV… et la Cour suprême, seule juge dans cette affaire, est largement composée de proche du président Kabila.

Christophe RIGAUD

Photos : Centre de compilation au Katanga (c) DR