Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22 décembre 2011

RDC-Législatives : Sous pression, la CENI accepte l'aide internationale

Après la publication de résultats contestés lors de la présidentielle, la Commission électorale congolaise (CENI) décide de suspendre la compilation des votes des élections législatives et d'attendre une aide technique internationale. L'organisation chaotique des élections et les soupçons de fraudes massives ont fragilisé la CENI, accusée par l'opposition d'avoir favorisé la réélection de Joseph Kabila. Sous pression américaine et européenne, la Commission électorale suspend son comptage et accepte un appui technique. Cela sera-t-il suffisant pour garantir un scrutin crédible et transparent ? Pas si sûr.

Image 3.pngLes critiques ont été nombreuses pour condamner les multiples irrégularités des dernières élections générales en République démocratique du Congo (RDC). L'Union européenne, le Centre carter et l'administration Obama n'ont pas eu de mots assez durs pour qualifier ce scrutin. Hilary Clinton s'est dit "déçue", le Centre Carter a estimé que la réélection de Joseph Kabila était caractérisée par de telles irrégularités qu'elle "manque de crédibilité" et note que "40%" des résultats des Centres de compilation sont jugés "faibles". Quant à l'Union européenne, elle a signalé des irrégularités le jour du vote, qui vont de la "désorganisation des bureaux de vote" au "bourrage des urnes".

La pression internationale commence-t-elle à produire ses effets ? La CENI a en effet décidé de suspendre les résultats des législatives, après avoir livré une première série de résultats provisoires. La Commission se plie donc à la demande de nombreux pays et d'organisations internationales, en acceptant un appui technique pour la compilations des résultats des différents bureaux de vote. La CENI déclare vouloir ainsi "garantir la transparence et la crédibilité des législatives (...) en attendant l'arrivée des équipes de supervision et d'appui technique international".

La pression s'était accentuée sur la CENI ces derniers jours, avec la réaction d'Hilary Clinton, qui a dénoncé un scrutin "mal géré" et "manquant de transparence", suggérant une "révision" du processus électoral. L'Union européenne a emboîté le pas en menaçant de "réévaluer son soutien (...) si des progrès ne sont pas réalisés dans le dépouillement des votes des législatives". Devant tant d'insistance, la CENI se devait de faire un geste en acceptant l'aide internationale. Cette assistance sera-t-elle suffisante pour crédibiliser les résultats des législatives ? Si l'on en croit les rapports des différentes missions d'observation électorales, il sera difficile de faire le tri entre les bulletins de vote manquants, les procès-verbaux égarés, les bureaux de vote qui n'ont jamais ouvert, les nombreux doublons inscrits sur les listes... sans parler du manque de fiabilité du fichier électoral. Il semble délicat dans ces conditions de donner des résultats incontestables (même avec une aide internationale). Autre contrainte qui rend la mission quasi impossible : le calendrier. Les résultats des législatives doivent être annoncés le 13 janvier 2012.

Christophe RIGAUD

RDC : Après les élections... la répression

Depuis la réélection contestée de Joseph Kabila à la tête de la République démocratique du Congo (RDC), les arrestations arbitraires d'opposants politiques s'intensifient. Amnesty International dénonce de nombreuses "arrestations postélectorales illégales" destinées à "museler" l'opposition. Human Rights Watch (HRW) dénombre déjà 24 morts en RDC depuis l'annonce des résultats de l'élection présidentielle. Au coeur de la répression : les forces de sécurité et l'ANR, les services de renseignements congolais.

Image 2.pngDeux rapports d'ONG internationales s'alarment de la situation sécuritaire en République démocratique du Congo, à la suite d'un scrutin électoral entaché de nombreuses irrégularités et de forts soupçons de fraude. Human Rights Watch (HRW) estime que" les forces de sécurité congolaises ont tué au moins 24 personnes et placé en détention arbitraire des dizaines d’autres depuis le 9 décembre 2011, date à laquelle le président Joseph Kabila a été proclamé vainqueur de l’élection présidentielle controversée". Human Rights Watch a également constaté que parmi les personnes tuées "se trouvaient des militants et des partisans, ainsi que des personnes interpelées dans la rue, ou même dans leurs maisons". Pour Anneke Van Woundenberg d'HRW, "ces manœuvres sanglantes contribuent à fragiliser le processus électoral et donnent l’impression que le gouvernement ne reculera devant rien pour rester au pouvoir".

Plusieurs sources ont informé Human Rights Watch que "le gouvernement avait donné pour instruction aux hôpitaux et aux morgues de ne pas fournir d’informations concernant le nombre de morts, ni de détails sur les individus blessés par balles aux membres de leurs familles, aux groupes de défense des droits humains ou au personnel des Nations Unies, entre autres. Certaines familles ont retrouvé les corps de leurs êtres chers dans des morgues situées loin de Kinshasa, ce qui indiquerait que des corps sont transportés jusque dans des zones excentrées".

Amnesty International a également mené une enquête très fouillée en RDC. L'ONG indique que "les forces de sécurité congolaises semblent profiter du climat de tension et d’incertitude qui règne à la suite des récentes élections pour mener cette série d’arrestations politiques et procéder notamment à des arrestations arbitraires et illégales qui menacent d’étouffer la liberté d’expression et de réunion".

Amnesty note l'arrestation de 4 journalistes travaillant pour une radio communautaire dans la province du Maniema, le 14 décembre.  Ces journalistes étaient accusés par l'ANR (l'Agence nationale de renseignements) "d’être passés outre une décision officielle ordonnant la fermeture de leur station de radio. Trois d’entre eux ont été libérés dans l’après-midi. Le quatrième a été relâché le 15 décembre, également dans l’après-midi". Amnesty indique que le 13 décembre, à Bukavu, dans le Sud-Kivu, "des agents de la Police nationale congolaise (PNC) auraient frappé et arrêté l’avocat Eustache Nsimba et l’auraient emmené dans un lieu inconnu. Il participait à une manifestation organisée par l’opposition. Eustache Nsimba a été relâché plus tard dans la journée". Deux membres de l'UDPS ont également été arrêtés au Katanga et sont détenus "au secret dans un cachot de l'ANR".

Enfin, des dizaines de personnes (civils, mais aussi membres de la Police congolaise) ont été enlevées à Kinshasa. "Toutes les personnes arrêtées auraient été prises pour cible parce qu’elles sont originaires des provinces de l’Équateur, du Kasaï-Occidental et du Kasaï-Oriental, fiefs de l’opposition" indique Amnesty International.

Les ONG des Droits de l'Homme internationales et locales sont toutes très inquiètes de la vague de répression qui s'abat sur les opposants et les citoyens congolais. Amnesty International demande aux autorités congolaises "de fournir des informations sur ce qu’il est advenu des personnes arrêtées, et de les libérer si elles ne sont pas rapidement inculpées d’une infraction reconnue par la loi". Avant de conclure que "l’impunité ne ferait qu’engendrer de nouvelles violences et atteintes aux droits humains".

A la suite de ces deux rapports, la justice congolaise a décidé d'ouvrir une enquête.

Christophe RIGAUD

Photo (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com

20 décembre 2011

RDC-Législatives : Les irrégularités continuent

Alors que tous les regards sont focalisés sur la réélection contestée de Joseph Kabila à la tête de la République démocratique du Congo (RDC), le dépouillement chaotique des élections législatives a été suspendu par la Commission électorale (CENI). De nombreuses irrégularités sont également constatées sur ce scrutin. Une ONG congolaise dénonce la "manipulation des procès verbaux" au Katanga, un responsable de la CENI au Kasaï est accusé d'avoir "publié les résultats avant la fin de la compilation" et en Ituri un chef d'antenne de la CENI est jugé pour "tricherie".

Image 2.pngA l'ombre de l'élection présidentielle, les élections législatives sont, elles aussi, entachées de multiples irrégularités. Lors de la présidentielle, les observateurs  électoraux internationaux du Centre Carter et de l'Union européenne ont estimé que la réélection de Joseph Kabila était caractérisée par de telles irrégularités qu'elle "manque de crédibilité". Les observateurs de l'ONG de l'ancien président américain, notent que "40%" des résultats des Centres de compilation sont jugés "faibles". Quant à l'Union européenne et d'autres observateurs internationaux ou locaux, ils ont également signalé des irrégularités le jour du vote, qui vont de la "désorganisation des bureaux de vote" au "bourrage des urnes".  Les élections législatives étant organisées le même jour que le scrutin présidentiel (le 28 novembre 2011), certaines ONG locales émettent de sérieux doutes sur la transparence et la crédibilité des élections à la députation... pourtant cruciales pour le bon fonctionnement des institutions du pays.

Devant les problèmes de dépouillements rencontrés, la Commission électorale (CENI) a décidé de suspendre momentanément les travaux de compilation des bulletins de vote. Le représentant de l'opposition à la CENI, Jacques Djoli veut "sauvegarder" le processus électoral : «nous avons déjà beaucoup de mal par rapport à ce qui s’est passé (des irrégularités constatées lors de la présidentielle) et nous voulons cette fois-ci sauvegarder tant soit peu ce processus » a-t-il déclaré sur Radio Okapi, avant d'affirmer que cette décision était prise pour «essayer de recadrer les agents, afin de traduire l’expression de la sociologie électorale telle qu’exprimée ».

Depuis le début de la compilation des résultats, certains agents de la CENI ont été accusés de falsifier les procès verbaux des bureaux de vote. 5 agents de la CENI ont été arrêtés le 13 décembre au Nord-Kivu. Le 17 décembre, le chef d'antenne de la CENI à Kamonia, dans le fief d'Etienne Tshisekedi au Kasaï, a été accusé de publier les résultats "avant la fin des travaux de compilation". Le 19 décembre, le responsable de l'antenne de la CENI à Djugu, en Ituri,a été déféré devant le Tribunal de grande instance de Bunia. Soupçonné de tricherie, Jérôme Dhejo est accusé d'avoir acheminé des "kits électoraux" dans des bateaux rapides appartenant à un candidat à la députation.

Le Centre des Droits de l'homme du Katanga (CDH), une ONG congolaise, dénonce la "manipulation des procès-verbaux des résultats de la députation nationale dans les Centres locaux de compilation (CLCR) de Lubumbashi et Likasi". Cette organisation s'étonne d'opérations "magiques" au profit de certains candidats qui n'ont pas obtenu de voix dans les bureaux de vote et se retrouvent en tête des résultats dans les Centres de compilation. L'ONG congolaise relève de nombreuses irrégularités dans son secteur :
- "des agents électoraux invités à refaire des procès-verbaux sans la présence de témoins des partis politiques ou d'observateurs",
- "à Likasi, un candidat a été surpris en train de corrompre un chef de centre",
- un candidat ayant obtenu 35 voix, "s'est vu octroyer un total de 315 voix"... selon l'ONG, "il suffisait d'intercaler le chiffre 1 entre le 3 et le 5"...
- le Centre des droits de l'homme (CDH) du Katanga se demande également pourquoi les Centres de compilation de Lubumbashi et Likasi sont "restés fermés aux observateurs et aux témoins ?"

Depuis l'arrêt des opérations de compilation au niveau national, la CENI n'a pas indiqué quand et comment ces opérations reprendraient ? Selon le représentant de l'opposition à la CENI, Jacques Djoli, "la Monusco devra être présente dans tous les CLCR, en commençant par ceux de Kinshasa". Pour l'instant... c'est silence radio du côté de la Commission électorale. Un silence assourdissant.

Christophe RIGAUD