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24 mars 2013

Centrafrique : Les défis de l'après-Bozizé

En quelques heures, la rébellion de la Séléka a renversé ce dimanche le régime de François Bozizé. Mais la coalition rebelle avance divisée et les lendemains de victoire pourraient se révélés difficiles pour la Séléka, toujours en quête d'union.

Afrikarabia logo V2.pngL'heure de vérité a sonné pour la Séléka. Après une offensive éclair dimanche matin, les rebelles se sont emparés sans difficulté de Bangui, la capitale centrafricaine. Le président François Bozizé a pris la fuite, certainement en République démocratique du Congo, après 10 ans de règne sans partage. Maintenant les choses sérieuses commencent. Que faire du pouvoir ? Et qui pour prendre la place de François Bozizé ?

Djotodia contesté

De nombreuses inquiétudes pèsent en effet sur la gestion que fera la Séléka de sa victoire. "La Centrafrique vient d’ouvrir une nouvelle page de son histoire, mais le plus dur est à venir" confiait ce dimanche à Afrikarabia un membre de la rébellion. Il ne croyait pas si bien dire. La bataille pour le pouvoir au sein de la Séléka a bel et bien commencé quelques heures après la chute de Bangui. Deux factions s'affrontent. A la manoeuvre, on trouve d'abord Michel Djotodia, le "patron" de la Séléka et ministre du gouvernement de transition, mis en place pendant les accords de paix de Libreville en janvier dernier. Son nom fait autorité, mais depuis la signature précipitée d'un plan de sortie de crise avec le président honni, François Bozizé, une partie de la Séléka ne lui fait plus confiance. Les accords de Libreville sont fortement contestés au sein de la Séléka.

Nourradine Adam et Firmin Findiro "incontournables" ?

Dans la fronde anti-Djotodia, on trouve un militaire : Nourradine Adam. L'homme est à la tête du CPJP, une des nombreuses composantes de la Séléka. Pour ce commandant, Djotodja a vendu l'âme de la coalition à Libreville, alors que les rebelles campaient à seulement 75 km de Bangui… si près de leur objectif : renverser Bozizé. Nourradine Adam n'est pas le seul à critiquer Djotodia. On trouve également le très discret Firmin Findiro, ancien ministre de la Justice, limogé par Bozizé. Mais aussi d'anciens officiers de l'armée régulière, regroupés dans l'A2R, puis le M2R. Ces militaires dénoncent ouvertement les accords de Libreville et repartent à l'offensive armée avec les hommes du CPJP de Nourradine Adam. Ils font tomber ensemble plusieurs localités, avant de fondre sur la capitale. Au final, dimanche, après la prise de Bangui, Nourradine Adam s'estime légitimement incontournable.

Djotodia succède à Bozizé

Mais en début de soirée, Michel Djotodia annonce dans un discours surprise sur les ondes nationales, être le nouveau président de la république centrafricaine. L'ancien rebelle décrète aussitôt un couvre-feu à Bangui et affirme souhaiter ne pas faire "de chasse aux sorcières". Michel Djotodia promet des élections dans 3 ans et souhaite conserver Nicolas Tiangaye à son poste de premier ministre de transition. Djotodia a pris tout le monde de vitesse.

La "main tchadienne"

Autant dire que certaines dents ont grincé au sein même de la Séléka. Un membre de la coalition nous a affirmé que le nom de Michel Djotodia à la présidence, était en fait soutenu par le président tchadien Idriss Déby. "C'est consternant", nous a-t-il déclaré. "Le Tchad continue de contrôler le pays, comme au temps de Bozizé. Déby veut une Centrafrique faible et y placer un président contrôlable", tempête ce membre de la Séléka, qui craint "dans ces conditions, une nouvelle rébellion dans moins de 6 mois". Un autre parti d'opposition, l'Alliance nationale pour le changement et la démocratie (ANCD), qui salue le départ de Bozizé, dénonce lui aussi l'ingérence tchadienne et "exhorte les frères centrafricains à récuser toute immixtion du despote Idriss Déby en Centrafrique". La "main tchadienne" est toujours présente.

Les trois défis de Djotodia

Plusieurs défis attendent donc le nouveau président Djotodia. Tout d'abord s'affranchir de son encombrant "parrain" tchadien, Idriss Déby. La tâche sera difficile dans le contexte actuel. Le président tchadien est en effet devenu le nouvel homme fort de la région et l'allié incontournable de François Hollande dans sa guerre au Mali… une position confortable pour le maître de N'djamena, qui en fait pour le moment un "intouchable". Michel Djotodia devra ensuite trouver rapidement le bon dosage d'une coalition politique solide, intégrant les multiples facettes de la rébellion. Là encore, la tâche est rude. Djotodia n'a pas la haute main sur le gros des troupes de la Séléka et il n'est pas à l'abri d'une nouvelle tentative de déstabilisation. Troisième et dernier défi et il est de taille : tout un pays, une armée, une administration, une économie… sont à reconstruire. La Centrafrique est à genou : un "Etat vide", grand comme la France, avec seulement 4 millions d'habitants et une population parmi les plus pauvres de la planète. La "page Bozizé" est tournée et tout est à réécrire.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Centrafrique : Bozizé réfugié en RDC

Les rebelles de la coalition Séléka, qui étaient entrés dans Bangui samedi soir, se sont emparés du palais présidentiel ce dimanche matin. François Bozizé reste introuvable. Selon plusieurs sources, il se serait enfui en République démocratique du Congo (RDC).

carte RDC Afrikarabia Centrafrique Bangui Zongo.jpgLes rebelles de la Séléka contrôlent depuis dimanche matin Bangui, la capitale centrafricaine. De nombreux tirs et détonations étaient entendus dans la matinée autour du palais présidentiel, que la Séléka a fini par investir. La rébellion a affirmé que le président François Bozizé ne s'y trouvait pas. Selon certains de ses proches, le président centrafricain aurait traversé le fleuve Oubangui pour trouver refuge en République démocratique du Congo, au niveau de Zongo.

Kinshasa a demandé dimanche l'aide du Haut Commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR) pour transporter 25 membres de la famille de François Bozizé, de Zongo (à la frontière centrafricaine) à Gemena, dans la province de l'Equateur en RDC. Concernant le président centrafricain lui-même, le porte-parole de la République démocratique du Congo, Lambert Mende, a nié sa présence sur le sol congolais. Selon d'autres sources, Bozizé serait parti sur Mbandaka avec son hélicoptère.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

23 mars 2013

Centrafrique : La Séléka entre dans Bangui

Des troupes de la rébellion Séléka sont entrées dans la capitale centrafricaine ce samedi. Des combats les opposent aux forces gouvernementales dans les faubourgs nord de Bangui. L'armée française "sécurise" l'aéroport de Bangui ce samedi soir.

Afrikarabia logo V2.pngUn responsable de la Séléka a confirmé à Afrikarabia ce samedi en fin d'après-midi, l'entrée des rebelles dans Bangui. Des combats les ont opposé aux forces centrafricaines au PK12, un secteur du quartier nord de la capitale. Selon ce membre de la Séléka, "les rebelles ont contourné les troupes sud africaines positionnées sur la Nationale 1 en passant par la Nationale 2". La rébellion négocierait la "non-intervention" des sud africains dans le conflit. Les autorités centrafricaines ont coupé l'électricité dans plusieurs quartiers de Bangui, craignant "les infiltrations rebelles".

Toujours d'après ce membre de la Séléka, les événements devraient rapidement tourner en faveur des rebelles, "dimanche, Bozizé sera tombé" , affirme-t-il, confiant. Pour preuve, il nous confie que les proches de François Bozizé, serait "à l'étranger" et sa femme "déjà à l'abri à Paris".

Sur le terrain militaire, les événements évoluent très rapidement. Les autorités françaises ont décidé d'envoyer des troupes dans l'aéroport de la capitale centrafricaine, Bangui. "L'aéroport est désormais sécurisé", selon Paris qui indique qu'"une compagnie est arrivée en renfort des 250 soldats déjà positionnés dans la capitale centrafricaine".

Vers 21h45, un membre de la Séléka a affirmé à Afrikarabia que la Radio-Télévision nationale centrafricaine serait sous contrôle de la rébellion.

Selon lemonde.fr, la famille de François Bozizé aurait quitté Bangui à bord d'un avion du président Obiang de Guinée Equatoriale. En fin de soirée samedi, la Fomac a démenti l'entrée effective de la Séléka dans la capitale. Selon la Force multinationale d'Afrique centrale, les rebelles n'ont pas dépassé le PK15, "bloqués par les troupes sud africaines". La Séléka ne serait donc pas entrée avec des véhicules dans Bangui, mais "à pieds".

MISE A JOUR : Samedi 23 mars 2013 à 22h45

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

RDC : "Une catastrophe humanitaire s'annonce à Walikale"

La situation sécuritaire du territoire de Walikale, dans l'Est de la République démocratique du Congo, se dégrade. Une ONG congolaise s'inquiète de la possible reprise des combats entre les rebelles FDLR, alliés aux groupes Maï-Maï Nyatura et l'armée régulière.

carte RDC Afrikarabia Walikale2.jpgAlors la tension internationale se focalise autour de la rébellion du M23, le territoire de Walikale, à l'Ouest de Goma, connait depuis plusieurs semaines un regain de tension. Le 15 et 16 mars dernier, l’arrestation d’un commandant du groupe armé Raïa Mutomboki par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) ont débouché sur des affrontements entre les deux groupes dans les localités de Nyamilingi et Lowa situées à près de 18 km au sud de Walikale centre, a rapporté l'OCHA, l'Office des Nations unis pour les affaires humanitaires. La dégradation de  situation sécuritaire a provoqué le déplacement d’une partie de la population vers la brousse et sur l’axe sud de Walikale-Itebero.

Les FDLR tentés de "récupérer leurs fiefs"

Mais dans le territoire de Walikale, une ONG congolaise, le Bureau d'études, d'observation et de coordination pour le développement du territoire de Walikale (Bedewa), attire l'attention sur les risques d'affrontements entre les rebelles Hutus rwandais des FDLR, alliés aux Maï-Maï Nyatura, et l'armée régulière congolaise (FARDC). Selon cette ONG, les FDLR, "délogés de certaines localités, seraient tentés de mener des opérations militaires d'occupation en coalition avec les Nyatura à partir du territoire de Masisi, dans l'objectif de reconquérir ce qu'ils appellent leurs fiefs… une terre arable où il fait bon vivre".

"Enrôlement des jeunes"

Le Bedewa affirme également que les groupes armés locaux "auraient lancé des messages au recrutement et à l'enrôlement des jeunes pour gonfler leurs rangs et faire face à ces opérations militaires d’occupation". "Une nouvelle catastrophe s'annonce en territoire de Walikale" s'inquiète l'organisation congolaise. Le Bedewa demande à la Monusco, les troupes de l'ONU au Congo, "prendre des mesures concrètes et sérieuses de prévention et de sécurisation des populations civiles sans défense".

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

22 mars 2013

De l’air frais du Québec au Forum mondial des femmes francophones

Le Forum mondial des femmes francophones organisé par  Yamina Benguigui, ministre déléguée à la Francophonie, aurait ronronné mercredi 20 mars au musée du Quai Branly à Paris sans un peu d’air frais venu du Québec...

Capture d’écran 2013-03-22 à 08.34.10.pngYamina Benguigui et son équipe avaient vu grand. La “représentante personnelle du président de la République” invitait quelque 400 femmes issues des 77 pays francophones au premier “Forum mondial des femmes francophones” mercredi 20 mars 2013 à Paris. Une réunion, selon elle “dans l’urgence”, “née du constat de la régression du droit des femmes dans le monde et notamment dans l’espace francophone”. En réalité, Yamina Benguigui continue à “ramer” pour définir sa mission  après l’échec du Sommet de la Francophonie à Kinshasa et alors que se profile le Sommet suivant à Dakar.

Faute de moyens financiers réels, la Francophonie se réduit comme peau de chagrin à un “Plan Com”. La bouée de sauvetage s’appelle “défense des femmes dans le monde” au détriment de la défense de l’influence du français dans le monde. Un exercice politiquement acrobatique puisqu’il amène Yamina Benguigui. à souligner que la situation des femmes est particulièrement mauvaise dans l’espace francophone. Ce qui est vrai, mais incline à observer que depuis des dizaines d’années, le gouvernement français n’a pas fait son travail dans sa sphère d’influence en matière de droits de l’Homme - au sens le plus large - et notamment de “politique du genre”. Notamment au Rwanda jusqu’en 1994 et en RDC par la suite.

Yamina Benguigui semble consciente de ce écueil. Elle a enfourché depuis quelques mois un cheval de cheval de bataille original : dénoncer les viols et actes de barbarie commis en RDC selon elle par le M23 “soutenu par Kigali”. Une tribune dans Le Monde, signée notamment par la Première dame Valérie Trierweiler, a donné le signal de ce “programme du genre” vu de Paris (voir la genèse de cette affaire dans Afrikarabia).

Depuis, la ministre déléguée à la Francophonie a légèrement corrigé le tir. Pour conserver un minimum de crédibilité, le Rwanda n’est plus voué aux gémonies. Mais les thèmes égrenés au premier Forum mondial des femmes francophones restent les mêmes. « Nous vivons aussi un moment où les femmes sont niées, abîmées et détruites dans leur intégrité. Elles subissent au quotidien des exactions, des violences de toutes sortes. Elles n’ont aucune protection juridique et sanitaire et sont le plus souvent exclues des systèmes scolaires », a regretté Yamina Benguigui avant d'appeler à lutter au quotidien pour faire reconnaître les droits les plus élémentaires des femmes : « Car c’est bien dans l’espace francophone, c’est bien en langue française que cette tragédie se déroule ». Yamina Benguigui propose donc de créer « un réseau actif dans l’espace francophone » et veut en saisir l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et le président François Hollande.

Denis Mukwege, gynécologue obstétricien à l’hôpital de Panzi en RDC, était l’invité vedette de la réunion du 20 mars. Ce médecin au courage extraordinaire (voir Afrikarabia) mais à la perspicacité politique sujette à caution a répété que « Le corps de la femme devient le champ de bataille. C’est détruire la vie à son origine ». Un  message qui semble de plus en plus instrumentalisé par Yamina Benguigui pour incarner sa ligne politique confuse. Si la ministre française s’intéressait vraiment à la mission de ce nobélisable, elle lui transférerait son propre budget de gardes du corps, tant la vie du docteur Denis Mukweg est menacée en RDC.

Dans ce nouveau sommet de confusion compassionnelle sinon de tartufferie, la délégation de femmes chefs d’entreprises invitées à l’initiative du Québec a fait souffler un peu d’air frais et de sincérité. Les Offices jeunesse internationaux du Québec ont permis à 40 jeunes femmes d’y porter leurs voix. Toutes ont été choisies pour leur investissement professionnel positifs, démontrant que la Femme n’est pas seulement une victime emblématique. La promotion de femmes chefs d’entreprises est leur crédo.  Leur porte-parole (photo) a fini par obtenir un micro pour donner un point de vue décapant : “Je m'appelle Lydie Hakizimana et je suis de nationalité rwandaise. Je suis la présidente de la Chambre des jeunes entrepreneurs et cheffes d'entreprises depuis sept ans dans le domaine de l'édition et publication de livres scolaires. Pendant une semaine, nous avons travaillé sur un livre blanc avec des constats et recommandations sur l'axe entreprenariat.

Premièrement, l'argent c'est le nerf de  la guerre- faciliter l'accès au crédit et au capital financier pour les femmes entrepreneures en créant des fonds de garantie gouvernementaux.

Deuxièmement, l'éducation est très importante - mais tout se joue des le plus jeune âge - s'assurer que chaque jeune fille avant l'age adulte ait rencontre un/une entrepreneure pour un partage d'expérience.

Troisièmement, le savoir c'est le pouvoir : créer des formations spéciales femmes entrepreneures qui permettraient l'affirmation de soi et l'apprentissage de la prise de parole.

Quatrièmement, on a tous besoin de modèles et d'être inspirées - identifiées et promouvoir les femmes entrepreneures en créant un annuaire papier électronique.

Cinquièmement, le réseau est primordial- l'union fait la force. Créer des lieux où  les femmes entrepreneures profiteront de la mutualisation des expertises.

En conclusion, Les gouvernements sont censés créer un environnement favorable à un développement dont la pierre de lance est le secteur privé, les petites et moyennes entreprises, l'entrepreunariat féminin...

La pauvreté engendre la guerre et la guerre promeut la pauvreté. Faisons la guerre chers frères, chères soeurs... pas entre nous; contre la pauvreté car, c'est elle notre seule vraie ennemie.”

Au milieu des sifflets et quolibets d’autres femmes francophones, Lydie Hakizimana a indiqué que son entreprise fait aujourd’hui travailler 150 personnes et elle a rendu hommage à son gouvernement qui conduit l’une des politiques du genre les plus audacieuses dans le monde. Bien loin de l’image que Yamina Benguigui véhicule du Rwanda...

Jean-François DUPAQUIER

Photo : Lydie Hakizimana © JF. Dupaquier

19 mars 2013

RDC : Le combat d'une congolaise contre l'impunité

Mercredi 20 mars 2013 se tiendra à Paris le premier "forum mondial des femmes francophones". Parmi les 400 femmes invitées, Candide Okeke témoignera du "génocide" qui se déroule en silence à l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Pour cette militante politique, "la véritable arme de destruction massive, c'est l'impunité" et elle demande à la France de "s'opposer clairement aux atrocités qui se déroulent au Congo".

portrait Candide Okeke filtre.jpgC'est une première qui se déroulera à Paris, ce mercredi, au Quai Branly. La ministre française de la Francophonie,Yamina Benguigui réunira 400 femmes de 77 pays, toutes francophones, "pour défendre leurs droits" à travers le monde. Une attention toute particulière sera portée sur la situation des femmes dans les conflits armés : Mali, Centrafrique… mais aussi République démocratique du Congo, où les femmes sont souvent les premières victimes de la guerre. Fin février, la ministre de la Francophonie avait fortement dénoncé la "catastrophe humanitaire au féminin" dont sont victimes les congolaises. "Un génocide dans un silence assourdissant" avait déclaré Yamina Benguigui, après son déplacement à Goma, au Nord-Kivu, en octobre dernier.

"RDC, capitale du viol"

Invitée du forum, Candide Okeke entendant porter haut et fort la voix des femmes congolaises. Militante politique, Candide est porte-parole de l'Apareco, un mouvement d'opposition au président Joseph Kabila, présidé par Honoré Ngbanda, l'ancien responsable de la sécurité de Mobutu. Selon elle, la situation les femmes congolaises est "particulièrement grave". "Le viol a été instauré comme une véritable arme de guerre… une arme de destruction massive", explique-t-elle. La RDC, se sont en effet des guerres à répétition depuis 20 ans et un crise humanitaire particulièrement féroce : 1,7 million de réfugiés à l'Est du pays… et les femmes toujours en première ligne.

Rwanda, coupable ?

Candide Okeke a un message politique à faire passer. Les responsables de ces guerres sans fin, elle les nomme clairement : les pays voisins, mais  surtout le Rwanda, le principal fauteur de trouble, selon elle. "Le Rwanda a des visées sur la partie Est du Congo, très riche en minerais", explique-t-elle. "Mais autant le Rwanda, après le génocide de 1994, a eu droit à la justice avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), autant pour la RDC, cela se passe en toute impunité". Les responsables ? "Ntaganda, Nkunda, Mutebusi, mais surtout Paul Kagme", le président du Rwanda. Pour Candide Okeke, "la véritable arme de destruction massive, c'est l'impunité". "Il faut que ces personnes soient neutralisées", tonne-t-elle. "On espère que Bosco Ntaganda (actuellement réfugié à l'ambassade américaine de Kigali et recherché par la Cour pénale internationale) soit rapidement envoyé à la CPI". Si le Rwanda n'est, heureusement, pas responsable de tous les malheurs de la RDC, il est vrai que plusieurs rapports de l'ONU ont dernièrement accusé Kigali de soutenir les rebelles du M23 qui sévissent au Nord-Kivu. Le Rwanda a toujours nié ces allégations.

"8 millions de francophones en moins"

Au premier "forum mondial des femmes francophones" de Paris, Candide Okeke souhaite pouvoir rappeler à la France "que la Francophonie a besoin de tous les francophones pour exister". "Si aujourd'hui on compte 8 millions de morts en RDC" explique-t-elle, "ce sont 8 millions de francophones en moins !". Candide Okeke demande enfin que la France de François Hollande "s'oppose clairement à ce que se passe en République démocratique du Congo". Le président français doit s'exprimer mercredi soir, en clôture du forum, depuis le palais de l'Elysée.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Ecoutez l'interview de Candide Okeke :


1er Forum des femmes francophones : le combat d... par ChristopheRigaud

Attentat du 6 avril 1994 (Rwanda) : Barril lâché par Agathe Habyarimana

Sale temps pour le mercenaire et capitaine de gendarmerie honoraire Paul Barril : l’expertise de l’attentat  contre le président du Rwanda Juvénal Habyarimana, qui pointe la responsabilité d’extrémistes hutus, est validée par  la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris. Et Agathe Habyarimana se désolidarise du mercenaire à son service...

Afrikarabia logo V2.pngIl avait pourtant fait des pieds et des mains pour “prouver” que l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion du président Habyarimana était l’oeuvre du Front patriotique rwandais. Au point qu’un livre ne suffirait pas pour raconter toutes les intrigues du mercenaire et capitaine de gendarmerie honoraire Paul Barril afin de conduire le peu perspicace juge Jean-Louis Bruguière sur de fausses pistes. Alors mandaté par Agathe Habyarimana, veuve du chef de l’Etat Rwandais, Barril s’est révélé un spécialiste de haut vol en désinformation et enfumage tous azimuts. Il avait même rallié à sa cause un universitaire français, André Guichaoua, qui a couvert de son autorité le ”témoignage” sur l’attentat écrit par un imposteur, le “lieutenant” Abdul Ruzibiza (« Rwanda, l’histoire secrète », Ed. Panama, 2005). Et convaincu le polémiste Pierre Péan, aujourd’hui hagiographe de Jean-Marie Le Pen, d’écrire lui aussi un livre en ce sens, « Noires fureurs, blancs menteurs » (Ed. Fayard). Succédant au juge Bruguière, les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic ont fait voler ce château de cartes.

La cause de Barril semble aujourd’hui si mauvaise que l’avocat d’Agathe Habyarimana, Me Meilhac, a fait savoir au juge Trévidic que sa cliente se désolidarisait de Paul Barril. Une noire fureur née de l’annonce du résultat des perquisitions aux différents domiciles de Paul Barril et de la fragilité de son alibi pour le soir du 6 avril 1994. Le coup de grâce a été donné mardi 19 mars : le travail des experts désignés par les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic est confirmé par la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris. Les avocats des officiers du FPR suspectés de l’attentat ont rappelé le film des événements dans un communiqué. Un rappel plus qu’utile.

Les deux juges d’instruction avaient désigné un collège d’experts chargés de vérifier les hypothèses des sites de lancement qui pouvaient servir au départ des missiles ayant abattu le 6 avril 1994 en soirée le Falcon ayant à son bord les présidents rwandais et burundais – et donné le signal du génocide des Tutsis du Rwanda, un million de morts en cent jours.. Le collège d’experts s’était rendu au Rwanda en 2010 et le 10 janvier 2012, avait conclu que le site le plus vraisemblable pour le tir des missiles était situé au camp militaire Kanombe, tenu par les militaires hutus les plus extrémistes, écartant du même coup l’hypothèse d’un tir provenant de Masaka, contrairement à l’ordonnance des mandats d’arrêt internationaux de Jean-Louis Bruguière.

Certaines parties civiles essentiellement liées à Madame Agathe Habyarimana, ont tenté, et pour cause, écarter ce rapport qui était totalement défavorable à leur thèse. Elles ont essayé de provoquer la nullité de la mesure d’expertise voire d’obtenir une nouvelle et seconde expertise ou encore des compléments d’enquêtes. Toutes ces demandes avaient été rejetées par ordonnance des juges Trevidic et Poux prononcée en  juin 2012. Les juges avaient cependant prescrit aux experts de fournir des éclaircissements sur un point technique concernant l’impact de la trajectoire des avions sur le tir des missiles, ce que la défense avait accepté. La majorité des parties civiles avait aussi accepté l’ordonnance du juge. Seul le même groupe minoritaire proche d’Agathe Habyarimana avait interjeté appel devant la chambre d’instruction de la Cour d’Appel de Paris.

Les parties ont longuement plaidé le  29 janvier 2013. La défense avait demandé à la Cour de confirmer l’ordonnance des juges d’instruction Nathalie Poux et Marc Trevidic et de rejeter l’appel interjeté. Telle était également la position de l’Avocat général qui avait clairement pris position pour le respect du travail des experts et des juges d’instruction.

Ce 19 mars 2013, la Cour d’Appel de Paris a suivi la position de l’Avocat général et de la défense. Elle a déclaré non fondé l’appel d’Agathe Habyarimana et de ses proches.

Pour Me Lef Forster, avocat au Barreau de Paris et Me Bernard Maingain, avocat au Barreau de Bruxelles, “cet arrêt s’inscrit dans la continuité de l’instruction qui a mis en évidence le caractère fantaisiste des accusations formulées à l’encontre des militaires du Front patriotique  rwandais”. Ils pointent du doigt à cette occasion “l’absence de preuve fiable et des manipulations graves de la justice française. Les développements récents montrent en outre que désormais les recherches doivent s’orienter vers les extrémistes hutus voire dans certains cercles en France, proches de ceux-ci.”

Pour les personnes visées visiblement à tort par l’ordonnance du magistrat Jean-Louis Bruguière, cette décision doit faciliter le prononcé d’un non-lieu, espèrent les deux avocats. Cette issue prévisible pourrait être retardée par un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris soutenu par l’Avocat général. Un tel pourvoi démontrerait qu’Agathe Habyarimana et sa famille ne chercheraient plus qu’à retarder  la réorientation de l’enquête en direction de leurs amis des milieux extrémistes hutus.

Jean-François DUPAQUIER

19:16 Publié dans Afrique, Rwanda | Lien permanent | Commentaires (3)

18 mars 2013

RDC : Ntaganda réfugié à l'ambassade US de Kigali

Logo Afkrb.pngComme un coup de tonnerre, la nouvelle a été annoncée lundi 13 mars à 16h15 sur le compte Twitter d'Afrikarabia (@afrikarabia). Un membre du M23 avait alors indiqué à notre site que "Bosco Ntaganda était au Rwanda" et se trouvait dans les locaux de l'ambassade des Etats-unis à Kigali, "en attente de son transfert pour la Cour pénale internationale (CPI"). L'information a mis plus de deux heures à être confirmée. D'abord sur Twitter, via le compte de la ministre des Affaires étrangères rwandaise, Louise Mushikiwabo, qui a révélé que Bosco Ntaganda "s'était présenté à l'ambassade américaine de Kigali, tôt dans la matinée". Après avoir démenti un temps les faits, le Département d'Etat a fini par confirmer à son tour en fin de journée la présence du rebelle congolais "à la représentation américaine dans la capitale rwandaise". Les Etats-unis ont également affirmé que Bosco Ntaganda "avait demandé son transfert à la CPI à la Haye", où il était recherché pour crimes de guerre.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

RDC-Rwanda : "Bosco Ntaganda serait à l'ambassade US de Kigali" selon le M23

Logo Afkrb.pngUn membre du M23 vient d'indiquer à Afrikarabia que "Bosco Ntaganda est arrêté au Rwanda" et se trouverait dans les locaux de l'ambassade des Etats unis à Kigali, "en attente de son transfert pour la Cour pénale internationale (CPI"). L'information obtenue par Afrikarabia est à prendre au conditionnel avec toutes les précautions d'usage. L'ambassade américaine au Rwanda a démenti détenir Bosco Ntaganda et la ministre des Affaires étrangères rwandaise, Louise Mushikiwabo, n'a ni infirmé, ni confirmé l'information.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

RDC : Le conflit au M23 pourrait relancer la guerre

La faction de Sultani Makenga a remporté une victoire militaire sur celle de Jean-Marie Runiga et Bosco Ntaganda. Mais les conséquences pourraient être lourdes sur la situation sécuritaire au Nord-Kivu. Certains prévoient la reprise des combats autour de Goma.

Runiga arrêté au Rwanda 16032013.pngC'est un week-end qui fera date dans le conflit du Nord-Kivu. Après plusieurs jours de combats féroces entre les deux factions rivales du M23, les troupes fidèles à Sultani Makenga ont fini par déloger les hommes de Jean-Marie Runiga et Baudouin Ngaruye. Les localités de Rugari et Kibumba sont désormais tombés sous le contrôle des pro-Makenga. Une victoire décisive dans la guerre des clans qui opposait depuis la fin février pro-Makenga et pro-Runiga, allié au turbulent Bosco Ntaganda, recherché par la Cour pénale internationale (CPI). Au cours des combats du week-end, Runiga, Ngaruye et Innocent Zimurinda, blessé, se sont enfuis au Rwanda voisin avec 200 de leurs hommes, laissant 400 autres de leurs soldats rejoindre le camp Makenga.

Runiga "réfugié", Ntaganda court toujours

Contacté par Afrikarabia, Stanislas Baleke, un responsable du M23, nous a indiqué que l'attaque de Kibumba avait obligé à Bosco Ntaganda à s'enfuir vers le parc des Virunga avec seulement "une trentaine d'hommes". A Kibumba, les troupes fidèles à Makenga ont pris possession de la maison où s'étaient réfugiés Runiga et Ntaganda avant leur fuite et le véhicule de Bosco Ntaganda a également été retrouvé. Dimanche, dans la journée, le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, affirmait savoir que Ntaganda avait traversé la frontière et serait passé au Rwanda, sans plus de preuve. Recherché par la CPI, Ntaganda serait un personnage bien encombrant pour Kigali. Le Rwanda a en effet signé en février dernier, à Addis Abeba, un accord-cadre dans lequel il s'est engagé à ne pas soutenir les "criminels recherchés par la justice internationale". Kigali a fermement démenti la présence de Bosco Ntaganda sur son territoire. Concernant le cas de Jean-Marie Runiga, son statut n'est pas encore très clair au Rwanda. "Cantonné ?", "arrêté ?". Le Rwanda semble hésiter sur le sort de son hôte. Selon un membre du M23, Runiga aurait été interpelé pour "franchissement illégal de la frontière", mais aurait ensuite demandé l'asile au Rwanda, avant de préciser vouloir se rendre en Ouganda.

Nouveau "bras de fer" avec Kinshasa ?

Première conséquence de la bataille entre factions du M23 : l'arrêt des négociations de Kampala entre les rebelles et le gouvernement congolais. Kinshasa a rappelé sa délégation, suivi par celle du M23 pour "consultation". Officiellement donc, on ne discute plus, ce qui augure mal de l'avenir des pourparlers. Deuxième conséquence : le renforcement de Sultani Makenga au sein de la rébellion. Si le commandant militaire du M23 a toujours contrôlé "le gros" des effectifs rebelles, il règne désormais sans partage sur le mouvement : Runiga, le politique, qu'il n'appréciait guère, est hors-jeu et Ntaganda, "le rival", "le traître", est en fuite dans la jungle des Virunga. Dans ces circonstances, le M23 pourrait être tenté de remettre la pression sur Kinshasa. L'envoi prochaine d'une force d'intervention rapide de l'ONU sur le terrain et le blocage des négociations avec le gouvernement congolais pourrait pousser les rebelles à "un nouveau bras de fer sur le terrain". Un responsable du M23 nous confiait qu'il était même "inévitable". Avec toujours dans le viseur de la rébellion : la ville de Goma, que le M23 avait fait tombé en quelques heures, fin novembre 2012.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Photo : Jean-Marie Runiga "interpelé au Rwanda" © DR