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31 août 2012

RDC : La résidence privée d'Etienne Tshisekedi vandalisée

Selon l'UDPS, le principal parti d'opposition de République démocratique du Congo (RDC), la résidence privée de son président a été vandalisée par des soldats dans la nuit du 29 août 2012. L'UDPS dénonce "la fouille systématique de toute les maisons" du village d'Etienne Tshisekedi, Kabeya-Kamwanga "à la recherche d'armes et du Colonel dissident John Tshibangu".

Image 1.pngDans un communiqué, l'UDPS affirme que "des hommes en uniformes lourdement armés" ont investi le village du président du parti, Etienne Tshisekedi, Kabeya Kamwanga (Kasaï) dans la nuit du mercredi 29 août 2012. Selon l'UDPS : "ces soldats ont procédé à la fouille systématique de toutes les maisons dont la résidence privée du président au motif qu'ils étaient à la recherche d'armes ainsi que du Colonel dissident John Tshibangu".

L'UDPS note que les soldats "n'ayant rien trouvé, se sont livrés à des actes de vandalisme". Le Parti d'opposition dénonce même des "viols", des "arrestations arbitraires" et de "nombreuses disparitions".

Le Colonel John Tshibangu a fait défection des FARDC, l'armée régulière congolaise, depuis le 16 août 2012. Depuis cette date, le gouverneur de la province du Kasaï Occidental s'est lancé dans une véritable traque au colonel dissident. Soupçonné d'être proche des rebelles du M23, John Tshibangu ne cache pas son objectif : chasser le président Joseph Kabila du pouvoir pour y installer Etienne Tshisekedi.

Christophe RIGAUD

Photo : E.Tshisekedi à Bruxelles en 2011 © Ch. Rigaud www.afrikarabia.com

30 août 2012

RDC : Hollande à Kinshasa agite l'opposition

La venue de François Hollande au 14ème Sommet de la Francophonie continue de faire polémique. Si Kinshasa se félicitent de la participation du président français, les voix de l'opposition congolaises sont plus dissonantes.. Il y a les "contre", les "pour"...et ceux qui font avec.

Capture d’écran 2012-08-30 à 22.33.33.pngAprès la fin du suspens sur la participation de François Hollande au prochain Sommet de la Francophonie de Kinshasa, voici venu le temps des commentaires, des positionnements politiques... et des controverses. Sans surprise, le porte-parole du gouvernement de République démocratique du Congo (RDC) affiche une certaine satisfaction après l'annonce de la venue du président français à Kinshasa. Une décision qui "rend justice au peuple congolais", qui, "malgré la guerre qui prévaut dans le Kivu, fournit tous les efforts chaque jour et accepte des sacrifices, pour être prêt pour ce rendez-vous".

Contre

Du côté de l'opposition, plusieurs sons de cloches se font entendre. Dans la catégorie des "farouchement contre", on trouve l'UDPS, le premier parti d'opposition en RDC. Etienne Tshisekedi, le patron de l'UDPS, demandait le boycott du président français ou la délocalisation du Sommet de la Francophonie dans un autre pays, comme cela a déjà été le cas en 2010 pendant la crise de Madagascar. Les motifs invoqués par l"UDPS sont clairs : les élections de novembre 2011 ont été truquées et le régime de Kinshasa ne respecte pas les droits de l'homme. Le parti dénonce "la violente répression des opposants politiques", "les disparitions" et "les assassinats", notamment celui du militant des droits de l'homme, Floribert Chebeya en juin 2010. Après l'annonce de la décision de François Hollande de venir malgré tout à Kinshasa pour "réaffirmer les principes et les idéaux" de la Francophonie, quitte à "tout dire" au président Joseph Kabila, l'UDPS ne décolère pas. "Les intérêts ont pris le dessus sur la démocratie et le respect des droits humains. Les engagements de campagne (du candidat François Hollande, ndlr) sont restés lettre-morte", tempête l'UDPS. Pour le parti d'Etienne Tshisekedi, "les autorités françaises cautionnent les élections calamiteuses de novembre 2011 dont les résultats sont rejetés par tous". Et de conclure qu'il s'agit "d'un motif de plus pour radicaliser le combat". Si on lit entre les lignes on peut donc s'attendre à des appels à la "mobilisation populaire", en clair : des manifestations, dans les rues de Kinshasa avant et pendant le Sommet, prévu du 12 au 14 octobre.

"Farouchement contre" également, l'association "Convergence pour l’émergence du Congo", menée par Jean-Louis Tshimbalanga. Ce français d'origine congolaise a saisi la justice française pour tenter d'empêcher la tenue du Sommet à Kinshasa. Selon lui, "François Hollande a été induit en erreur. Yamina Benguigui (la ministre déléguée à la Francophonie, ndlr) n'a pas fait son travail à son retour de Kinshasa. Il fallait délocaliser le Sommet au Sénégal ou à Maurice." Jean-Louis Tshimbalanga en veut aussi beaucoup à Abdou Diouf, le patron de l'Organisation International de la Francophonie (OIF) contre qui il a porté plainte. Pour le président de cette association, "organiser ce Sommet à Kinshasa viole la Charte de la Francophonie et la déclaration de Bamako. Il y a des millions de morts au Congo, des femmes violées, des élections truquées, le pays est en guerre à l'Est. Madame Benguigui aurait dû signaler à François qu'il ne devait pas se rendre là-bas". Avant de conclure : "Yamina Benguigui nous dit que la politique de la chaise vide ne sert à rien, qu'elle me prouve que la politique de la chaise pleine sert à quelques chose !"

Pour

Dans l'opposition, d'autres voix se font entendre et considère que la venue de François Hollande est une chance pour se faire entendre. Parmi elles, on trouve Martin Fayulu, président de l'Ecidé, un parti proche d'Etienne Tshisekedi. Sur le site de RFI, ce député d'opposition "se déclare satisfait de la déclaration de François Hollande" et  "espère que le président français va aider à faire avancer la démocratie : revenir sur le scrutin présidentiel à un tour, la création de la cour constitutionnelle et le départ du président de la Céni." Même réflexion de Jonas Tshiombela de la nouvelle société civile congolaise, toujours sur le site de RFI, qui se demande : "qu’est ce que cela changerait en RDC, si François Hollande ne venait pas ?"

A Paris, Gaspard-Hubert Lonsi-Koko, membre du RDPC et candidat aux législatives dans le Bas-Congo, est lui aussi satisfait de la venue de François Hollande dans la capitale congolaise. Clairement opposé au régime du président Kabila, Gaspard-Hubert Lonsi-Koko a toujours souhaité la tenue du Sommet de la Francophonie en République démocratique du Congo ainsi que la présence de François Hollande. Membre du parti socialiste, tout comme le président français, Gaspard-Hubert Lonsi-Koko salue "le courage politique" de Hollande "n’en déplaise aux participants du boycott". Il espère que François Hollande saura "redonner espoir aux millions de Congolais, sans pour autant cautionner un pouvoir non accepté par la grande majorité d’entre eux". Selon Lonsi-Koko, l'absence de François Hollande à Kinshasa aurait pu avoir des conséquences néfastes et notamment "fragiliser davantage la République Démocratique du Congo, le plus grand bastion francophone, au point de l’exposer aux menaces du Rwandais Paul Kagamé et de l’Ougandais Yoweri Museveni dont les parrains anglophones jouent un rôle important dans la région des grands lacs." Seul bémol pour cet opposant congolais : "si les intentions de François Hollande sont bonnes (réaffirmer les règles démocratiques, la bonne gouvernance et le respect es droits de l'homme, ndlr), attention de ne pas suivre le même chemin que ses prédécesseurs et ne rien faire".

Attend de voir

A mi-chemin entre ces deux positions, Vital Kamerhe, l’ancien président de l’assemblée nationale, a déclaré sur le site de RFI que si "la France est souveraine dans ses décisions", "il y a une crise de légitimité du pouvoir Kabila et les droits de l’homme ne sont pas respectés". Le président de l'UNC attend donc que le président français prenne des "positions fermes" pendant le Sommet et soit "clair", sinon "il ne pourra pas se sentir à l’aise pour faire une fête culturelle à Kinshasa." Justement, pour clarifier la position française, Jean-Louis Tshimbalanga de l'association "Convergence pour l’émergence du Congo", propose un "débat télévisé" à Yamina Benguigui, la ministre déléguée à la Francophonie pour "donner la parole aux Français" sur le prochain Sommet.

Christophe RIGAUD

28 août 2012

RDC : Rumeur sur la mort de l'opposant Diomi Ndongala

Plusieurs sources à Kinshasa affirment que l'opposant congolais Diomi Ndongala serait mort en détention lundi 27 août 2012. Il y a quelques jours, Amnesty International affichait ses craintes sur le sort et l'état de santé de Diomi Ndongala, qui serait détenu par les services de renseignements congolais. Kinshasa accuse ce parlementaire de viol et affirme qu'il est en fuite.

Image 1.pngDiomi Ndangala est-il encore en vie ? Certains proches affirment, depuis ce lundi, que le président de la Démocratie Chrétienne (DC), un parti d'opposition proche d'Etienne Tshisekedi, serait mort en détention. Depuis le 27 juin 2012, l'opposant congolais a disparu. Amnesty International, inquiète sur son sort, rappelle "qu'il a quitté son domicile en voiture (une Mitsubishi blanche aux vitres teintées) pour se rendre à un événement organisé par son parti politique à la cathédrale Notre-Dame-du-Congo, à Kinshasa." Ce parlementaire reconnu de République démocratique du Congo (RDC), s'apprêtait  à signer une charte avec plusieurs partis d'opposition. Selon Amnesty, "il n'est jamais arrivé à destination et personne, même pas sa famille, ne l'a vu ni entendu depuis lors".

Les autorités congolaises donnent une autre version de la "mystérieuse" disparition de Diomi Ndongala : le parlementaire devait être arrêté par la police pour viol sur mineures et serait "en fuite". Depuis, Kinshasa a toujours nié détenir le député Ndongala dans ses prisons.

Dernièrement, Amnesty International affirme avoir des informations récentes sur l'opposant congolais. Selon l'ONG, Diomi Ndongala serait "actuellement détenu au secret par les services du renseignement, à Kinshasa. Plusieurs sources ont indiqué qu'il se trouvait d'abord au camp militaire de Tchatchi, puis à la troisième direction des services nationaux du renseignement, à Kinshasa, où il aurait été détenu jusqu'au 2 août. D'après d'autres sources, il a été vu aux alentours du 16 août à la Cité de l'OUA, complexe immobilier appartenant à la présidence". Amnesty, comme certains de ses proches, affirment que le parlementaire "serait en mauvaise santé et aurait perdu beaucoup de poids car il a manqué de nourriture et a été privé des soins nécessaires au traitement de ses pathologies chroniques".

Depuis lundi 27 août, trois mois après sa disparition, des sources proches de Ndongala le donne pour mort et demandent à la Monusco (les troupes de l'ONU en RDC), à la France et à la Belgique de faire pression sur Kinshasa pour rendre le corps du député congolais. Pour l'instant, nous ne pouvons évidemment pas confirmer cette information.

Comme dans l'affaire Chebeya, ce militant des droits de l'homme assassiné en 2010, le sort de Diomi Ndongala empoissonne le climat politique à Kinshasa. Selon l'opposition, le cas Ndongala "discrédite" Kinshasa, qui s'apprête à accueillir au mois d'octobre, le XIVème Sommet de la Francophonie. Plusieurs ONG avaient appelé François Hollande à "ne pas se rendre à Kinshasa", pour ne pas "légitimer" le régime du président congolais Joseph Kabila. Le principal parti d'opposition en RDC, l'UDPS,avait même réclamé la délocalisation du Sommet. Le président français, François Hollande, qui se rendra finalement à Kinshasa en octobre, a déclaré vouloir réaffirmer en RDC un certain nombre "de principes et d'idéaux" et rencontrera "l'opposition politique, les militants associatifs et la société civile". L'affaire Ndongala sera sans nul doute au menu.

Christophe RIGAUD

 

26 août 2012

RDC : "L'UE doit suspendre son appui budgétaire au Rwanda" selon l'EurAc

Le réseau européen pour l'Afrique centrale (EurAc) demande à l'Union européenne (UE) et à ses états membres de geler "toute aide budgétaire au Rwanda et à limiter leurs interventions à des appuis programmes". Un rapport de l'ONU accuse le Rwanda de soutenir les rebelles du M23, en guerre contre Kinshasa, dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC).

Capture d’écran 2012-08-25 à 14.57.41.pngL'Union européenne (UE) suivra-t-elle la décision de plusieurs Etats (Allemagne, Grande-Bretagne, Pays-Bas ou Suède) de suspendre son aide financière à Kigali pour son soutien à la rébellion du M23 ? C'est ce que demande, le réseau européen pour l'Afrique centrale (EurAc).

En juin 2012, un rapport du groupe d'experts de l'ONU avaient apporté "un nombre important de preuves convergentes" de l'aide logistique, en armes et en hommes, du Rwanda aux rebelles du M23 dans l'Est de la RDC. Ce groupe armé est en lutte contre le pouvoir central de Kinshasa qu'il accuse de ne pas avoir respecté les accords de paix du 23 mars 2009. Le M23 contrôle la zone frontalière de Bunagana avec l'Ouganda, la ville de Ruthsuru et menace de faire tomber la ville de Goma, la capitale régionale du Nord-Kivu.

L'EurAc rappelle qu'il y a peu de doute, d'après le rapport de l'ONU, sur la véracité de l'aide rwandaise au M23. Les experts ont affirmé avoir interviewé "plus de 80 déserteurs issus de la mutinerie contre les FARDC et des groupes armés congolais, y compris du M23, parmi lesquels 31 étaient des ressortissants rwandais". Le rapport  "présente des photos de caches d’armes, des documents officiels et des messages radio interceptés. Enfin, lorsque des personnes étaient nommées, le groupe d’experts a procédé à des vérifications auprès de 5 sources concordantes, considérées comme crédibles et indépendantes, au lieu des 3 sources exigées", explique l'EurAc.

Le Rwanda a toujours démenti son soutien au M23 et Kigali a même publié "une réponse officielle" au rapport des experts, dénonçant des données "biaisées" et "invérifiables", "ne tenant pas compte du point de vue rwandais". Dans son communiqué, l'EurAc conclut "qu’il est fort peu probable que le contenu de l’additif (du rapport de l'ONU, ndlr) soit erroné et/ou falsifié comme l’affirme le Rwanda. L’argument selon lequel le Rwanda n’a pas été entendu n’est pas convaincant dans la mesure où le gouvernement n’a pas répondu à l’invitation qui lui avait été faite de donner son point de vue. A la lecture de la contre-argumentation avancée par le gouvernement  rwandais, EurAc ne voit pas de raisons de douter de l’analyse présentée par l’additif."

L'EurAc rappelle enfin que "ces dernières années, le rôle actif joué par le Rwanda dans les conflits armés en RDC a été largement documenté, notamment par l’ONU. Dans le rapport mapping de l’ONU publié en 2010, le Rwanda était accusé d’être impliqué dans les violences et atrocités commises en RDC entre mars 1993 et juin 2003. Aujourd’hui nous avons, comme en 2008, les preuves du soutien du Rwanda à des groupes rebelles opérant à l’Est de la RDC". Et de conclure "qu'en dépit de ces accusations, un certain nombre de pays avait, à l’époque, continué à considérer le Rwanda comme un partenaire privilégié".

Dernièrement, Washington, fidèle allié du Rwanda, a tout de même haussé le ton en décidant de suspendre son aide militaire à Kigali. Une sanction toutefois très limitée, puisqu'elle ne touche qu'une école de formation de sous-officiers, pour la somme assez modeste de 160.000 euros. Pas de quoi effrayer Kigali. Mais rapidement, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et Suède ont emboîté le pas. EurAc appelle donc l’Union Européenne et tous ses Etats membres à faire de même et de "suspendre définitivement toute aide budgétaire au Rwanda et à limiter leurs interventions à des appuis programmes". Selon le réseau réseau européen pour l'Afrique centrale, "ces mesures constitueraient une première étape en vue d’une révision de la politique de coopération avec le Rwanda. L’Union Européenne et ses Etats membres devraient également prendre en compte la situation préoccupante en matière de démocratisation, de bonne gouvernance et de respect des droits humains".

Concernant le soutien de Kigali aux rebelles du M23, le groupe d'experts de l'ONU doit rendre son rapport final en octobre 2012. En attendant, la situation militaire s'est figée sur le terrain. Le M23 parle de "trêve". La rébellion se tient toujours à une vingtaine de kilomètres de la ville de Goma.

Christophe RIGAUD

23 août 2012

RDC : Hollande et le piège de Kinshasa

Le XIVe Sommet de la Francophonie doit se tenir à Kinshasa en octobre prochain. Un bien mauvais endroit et un très mauvais moment pour le président François Hollande, qui hésite encore à se rendre en République démocratique du Congo (RDC). Paris a demandé des gages à Kinshasa sur le dossier des élections "frauduleuses" de 2011 et le procès Chebeya. Il semble peu probable que les autorités congolaises fassent la moindre concession. En se rendant à Kinshasa, François Hollande sera perdant sur tous les tableaux. Explications.

siège OIF francophonie.jpgA deux mois du Sommet de la Francophonie de Kinshasa, fixé en octobre prochain, la venue de François Hollande dans la capitale congolaise fait toujours débat. Depuis les "graves irrégularités" des élections de novembre 2011, dénoncées par la mission de l'Union européenne, le nouveau président français semblait hésiter à se rendre à Kinshasa. L'opposition congolaise, soutenue par de nombreuses ONG internationales étaient vent debout pour dénoncer le régime du président Joseph Kabila. Un régime, qui "n'est pas un Etat de droit, mais policier", selon le principal parti d'opposition, l'UDPS. Pour les opposants au président Kabila, le Sommet de la Francophonie "n'a rien à faire à Kinshasa, un pays où l'on truque les élections et où on assassine les militants des droits de l'homme".

Deux dossiers "chauds"

Le 9 juillet, après une rencontre entre François Hollande et Adbou Diouf, à la tête de l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), l'Elysée estimait  que « les autorités de la République démocratique du Congo (RDC) doivent démontrer leur réelle volonté de promouvoir la démocratie et l’Etat de droit ». Deux dossiers sont particulièrement embarrassants pour le nouveau président français. Il y a tout d'abord les élections "frauduleuses" de novembre 2011, qui nécessitent une réforme complète de la CENI (la Commission électorale) et le départ de son président Daniel Ngoy Mulunda, jugé trop proche de Joseph Kabila. Le deuxième dossier concerne le procès de l'assassinat du militant des droits de l'homme, Floribert Chebeya, qui doit aller à son terme. Toutes les pistes convergent vers la mise en accusation de John Numbi, le chef de la police. Mais cet ancien bras droit du président Kabila chargé de la sécurité, n'est toujours pas arrêté.

"Kabila ne lâchera pas Mulunda"

Paris a donc souhaité que Kinshasa donne rapidement des gages de bonne volonté sur ces deux dossiers. Selon un spécialiste bien informé de la région, il semblerait que Kinshasa ne fera aucune concession sur ces deux sujets. Concernant la réforme de la CENI, toujours d'après ce spécialiste, "Kabila ne veut pas lâcher Mulunda", le très contesté président de la CENI et ce, "malgré les fortes pressions internationales". Un projet de loi serait pourtant à l'étude à l'Assemblée nationale pour le 15 septembre. Compte tenu de l'importance du sujet, il y a donc peu de chance que ce projet soit voté avant la tenue du Sommet, prévu le 12 octobre. Le "toilettage" de la CENI se fera donc "à minima", le projet de réforme proposé par l'opposition en juin 2012 étant déjà très timide. Du coup, le calendrier électoral reste toujours au point mort, avec un grand point d'interrogation concernant la tenue des élections provinciales, qui bloquent par conséquent, la bonne marche du Sénat. Côté financier, les bailleurs ne sont toujours pas au rendez-vous, devant le flou électoral maintenu par Kinshasa. Sur ce dossier, il y a donc peu de chance que Paris obtienne des actes forts de la part de Kinshasa. Et si concessions il y a, "elles seront cosmétiques" selon ce spécialiste.

Numbi arrêté et… relâché

Le deuxième dossier brûlant entre Paris et Kinshasa concerne le procès Chebeya qui passe actuellement en appel. L'assassinat de ce célèbre militant des droits de l'homme en juin 2010 avait profondément choqué l'opinion internationale. L'enjeu principal de l'appel consiste à remonter à John Numbi, le "commanditaire" présumé du meurtre. Chef de la police congolaise à l'époque, Numbi était aussi le monsieur sécurité du président Kabila. Mis "au vert" par Kabila lui-même, les parties civiles demandent sa comparution devant le tribunal… en vain. Paris souhaitait également dans ce dossier que la justice puisse faire son travail. Mais il y a peu de chance de retrouver John Numbi dans le box des prévenus. Il y a déjà eu une tentative d'arrestation (peu médiatisée) de Numbi à la mi-juillet 2012 à Lubumbashi, au Katanga. L'ancien chef de la Police a été brièvement interpelé pendant deux jours, puis relâché après "une longue discussion avec Joseph Kabila". Comme Mulunda, il semble donc peu probable que le président congolais laisse tomber Numbi après l'épisode de la tentative d'arrestation.

Le dossier rwandais s'invite à Kinshasa

Autre mauvais timing : la reprise de la guerre à l'Est de la RDC, où une rébellion, le M23, soutenue par le Rwanda, tient tête à l'armée congolaise au Nord-Kivu. La rébellion contrôle plusieurs localités, dont Bunagana et Rutshuru. Le Sommet de la Francophonie constituera la première sortie africaine de François Hollande. Le nouveau président français va donc se rendre dans un pays virtuellement en guerre contre son voisin rwandais, ce qui pose évidemment un sérieux problème pour la France, compte tenu des relations orageuses entre Paris et Kigali, depuis le génocide de 1994. La guerre à l'Est, met François Hollande dans un embarras politique certain, d'autant que la RDC a poussé Paris à prendre des positions publiques contre le Rwanda. Pour François Hollande, le Sommet de Kinshasa se déroule donc au mauvais moment, au mauvais endroit.

Selon des observateurs de la région, François Hollande sera "perdant-perdant" en rendant à Kinshasa. Selon un spécialiste, "le président français risque de perdre sur tous les tableaux : sur les concessions qu'il n'obtiendra pas, sur le dossier rwandais et enfin (peut-être le plus important) sur ses propres principes (démocratie, bonne gouvernance, droits de l'homme… )". Faire le Sommet de la Francophonie à Kinshasa, c'est "récompenser les mauvais élèves au détriment des bons". Toujours selon ce spécialiste, "d'autres pays auraient d'ailleurs pu accueillir le Sommet de la Francophonie : le Sénégal, où les élections se sont déroulées convenablement ou encore en Tunisie, où il faut au contraire appuyer une transition politique. La solution aurait pu être de délocaliser le Sommet comme pendant la crise de Madagascar en 2010" (le Sommet s'était tenu en Suisse, ndlr).

Décision "imminente"

La diplomatie ayant horreur de la "chaise vide", le boycott du Sommet de la Francophonie semble exclu par le président français, "personne ne comprendrait" aurait-on dit à l'Elysée. Reste la délocalisation ou le discours "musclé" sur la démocratie et les droits de l'homme. La première solution serait sûrement la bonne, mais un peu tardive, la seconde risque de placer François Hollande devant ses propres contradictions : vouloir donner une "leçon à l'Afrique", comme un certain Nicolas Sarkozy à Dakar en juillet 2007.

Christophe RIGAUD

Photo : Siège de l'OIF à Paris © Ch. Rigaud www.afrikarabia.com

20 août 2012

RDC : Le M23 se politise

La rébellion congolaise vient de se doter d'une nouvelle structure politique. Ces nominations ressemblent à la composition d'un "gouvernement fantôme", composé de 25 membres. Le M23 ouvre un second front, plus politique et affiche désormais des ambitions "nationales", autour du "départ" du président Joseph Kabila.

Capture d’écran 2012-08-20 à 19.59.50.pngLes rebelles congolais du M23 sont dotés depuis le 17 août d'un "cabinet politique", composé d'un président, Bishop Jean-Marie Runiga, d'un chef du haut commandement militaire, le colonel Sultani Makenga et de plusieurs autres "chefs de départements". Les 25 membres de la nouvelle direction du M23 ressemblent à la  composition d'un gouvernement, avec ses différents ministères : relations extérieures, finances, budget, agriculture, justice… Les rebelles, en luttent contre l'armée régulières de Kinshasa depuis avril 2012, contrôlent désormais plusieurs localités du Nord-Kivu, dont les villes de Bunagana ou Rutshuru.  Le M23 avait déjà installé dans ces zones ses propres "administrateurs" afin "d'assurer la sécurité des populations" et "d'expédier les affaires courantes". Avec ce nouveau cabinet politique, le mouvement rebelle fait un pas supplémentaire en créant un "gouvernement parallèle" capable de suppléer les autorités congolaises.

En créant son "shadow cabinet", le M23 politise son mouvement et en profite pour élargir ses revendications. Au départ de la mutinerie, le M23 demande le respect des accords du 23 mars 2009, signés autour de l'intégration des anciens rebelles du CNDP (dont est issu le M23) dans l'armée régulière. Avec le retour de la guerre dans les Kivus, le M23 prétendait ensuite protéger la communauté tutsie des tensions ethniques. Avec le temps, et ses rapides victoires militaires devant des soldats congolais en déroute, la rébellion a décidé de porter des revendications plus larges comme "la bonne gouvernance" ou "le respect du résultats des urnes", référence aux élections contestées de novembre 2011. En fin de course, le M23 a terminé par se faire le porte-voix de l'opposition politique congolaise en demandant, comme elle, le "départ" de Joseph Kabila.

En affichant des ambitions politiques nationales au-delà de leurs simples revendications régionales (autour d'une "autonomie" des Kivus), le M23 continue d'accentuer la pression sur le régime Kinshasa, qui peine à neutraliser les rebelles sur le terrain et à faire avancer l'idée d'une "force armée neutre" pour stabiliser la région. Avec un avantage militaire certain, le M23 a figé ses troupes aux portes de la ville Goma, qu'ils comptent toujours prendre si les négociations n'avancent pas. En ouvrant un second front politique, les rebelles tentent un dernier coup de pression pour faire plier Kinshasa et les pousser à la table des négociations. Il est donc fort à parier que si le gouvernement congolais refuse encore d'ouvrir le dialogue avec les rebelles, le M23 ne reprennent les armes et poussent leur offensive jusqu'à Goma. Les rebelles en ont visiblement les moyens humains.

Dernier élément, le glissement politique du M23 tend également à faire bouger les lignes du côté de l'opposition congolaise, globalement hostile au mouvement rebelle. En créant son "gouvernement fantôme", le M23 cherche à pousser certains partis politiques d'opposition à "choisir leur camp" et ce, dès maintenant. Une initiative qui risque de déstabiliser un peu plus l'opposition qui brille par son absence. Une opposition politique en panne, qui continue de faire le jeu du président Kabila et… du M23, en lui laissant la voie libre.

Christophe RIGAUD

Composition du cabinet politique du M23 :

Président : Bishop Jean-Marie RUNIGA LUGERERO

Chef du haut commandement militaire : Colonel SULTANI MAKENGA

Secrétaire exécutif : Mr François RUCOGOZA TUYIHIMBAZE

Département des affaires politiques et administration du territoire : Mr SENDUGU MUSEVENI

Département des relations extérieures et de la coopération régionale : Me René ABANDI MUNYARUGERERO

Département des affaires sociales et humanitaires : Dr Alexis KASANZU

Département des Finances, Budget et Ressources Naturelles : Mr Justin GASHEMA

Département de l'Agriculture, Pêche et Élevage : Mr Déogratias NZABIRINDA NTAMBARA

Département de la Justice et des droits humains : Me Antoine MAHAMBA KASIWA

Département de la Réconciliation et de l'Unité Nationale : Mr Jean serge KAMBASU NGEVE

Département de Rapatriement des refugies et réinsertion des déplacés internes : Ir. Benjamin MBONIMPA

Département du Tourisme, Environnement et Conservation de la Nature : Prof Stanislas BALEKE

Département de la Jeunesse, Sport et Loisirs : Mr. Ali MUSAGARA

19 août 2012

RDC : François Muamba propose de recourir à l'AFRICOM

Le président de l'ADR (Alliance pour le développement et la République), François Muamba souhaite faire appel aux troupes de l'AFRICOM, comme "force neutre de sécurité" pour lutter contre les différentes rébellions à l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Une prise de position qui intervient un an après la création de l'ADR, un parti qui cherche encore sa place sur l'échiquier politique congolais.

François Muamba 2.jpgUn peu plus d'un an après son éviction du secrétariat général du MLC, en avril 2011 et la création de son propre mouvement, l'ADR (Alliance pour le développement et la République), en juillet 2011, François Muamba entre dans le débat qui agite la RDC sur la reprise de la guerre à l'Est du pays. Alors que le Nord-Kivu est de nouveau le théâtre d'affrontements entre les rebelles du M23 et l'armée régulière, le projet d'une "force neutre" africaine fait polémique à Kinshasa.

Dans un discours face à ses militants, François Muamba, a tout d'abord fustigé "l’agresseur extérieur, ici le Rwanda, et l’imposture intérieure, nommée M23" avant d'appeler les Congolais à "se prendre en charge et à recourir à tous les moyens légitimes et nécessaires pour refuser l’ignominie, sécuriser son Territoire et en défendre la souveraineté ainsi que ses richesses naturelles, tant convoitées qu’exploitées par le biais de cette guerre".

Concernant la fameuse "force neutre" proposée au Sommet de l'Union africaine, François Muamba estime tout d'abord que "par souci d'impartialité, le Rwanda (accusée de soutenir les rebelles du M23, ndlr) ne doit pas en faire partie". L'ancien ministre du Budget propose ensuite de s'appuyer sur les Etats-unis pour sécuriser la frontière, un pays ayant "l'avantage d’être autant ami de la RDC que du Rwanda." François Muamba rappelle enfin que les Etats-unis disposent déjà en Afrique d’un "mécanisme neutre de sécurité, nommé AFRICOM, qui semble être la réponse “neutre“ parfaite, précisément adaptée à la situation d’insécurité qui prévaut dans les deux Provinces du Kivu".

Cette force intervient déjà en Afrique, notamment dans la traque contre la rébellion de la LRA (Lord résistance army) de Joseph Kony, aux frontières de l'Ouganda, de la République centrafricaine et de la République démocratique du Congo. "AFRICOM contre Koni ? Alors pourquoi pas recourir à AFRICOM contre les FDLR ou encore contre le M23 ?" s'interroge François Muamba. Si l'idée est intéressante, notons également qu'une autre "force neutre", nommée Monusco et forte de 18.000 casques bleus, stationne déjà en RDC depuis plus de 10 ans !

Sur le plan politique, si l'ADR se situe dans de camp de l'opposition, le parti de François Muamba tente de tracer une "troisième voie" entre l'UDPS d'Etienne Tshisekedi et l'UNC de Vital Kamehre. Loin du "jusqu'au boutisme" de l'UDPS, qui boycott les travaux de l'Assemblée nationale après les élections contestée de novembre 2011, l'ADR de Muamba prône notamment le "dialogue républicain" avec le président de la République. L'ADR a en effet participé aux travaux du "Groupe Consultatif National Permanent", à l'appel de Joseph Kabila au sujet de la guerre au Nord-Kivu.

La marge de manoeuvre est pourtant limitée dans le camp de l'opposition congolaise pour faire entendre sa voix. Il y a embouteillage du côté des partis d'opposition. Par manque de leadership, l'opposition apparaît toujours très divisée, avec un patron de l'UDPS, Etienne Tshisekedi, plus isolé que jamais. François Muamba arrivera-t-il à sortir son épingle du jeu ? Difficile dans ce contexte de reprise de la guerre à l'Est et où Joseph Kabila apparaît encore comme le seul capitaine à bord (certes dans la tempête) du navire Congo. Pour l'instant, le président congolais reste encore fort… des faiblesses de l'opposition.

Christophe RIGAUD

RDC : Maudit pétrole !

Dans un monde où les ressources se font rares, le continent africain est plus que jamais sollicité par les compagnies pétrolières. Dans un récent rapport, International Crisis Group (ICG) met en garde la République démocratique du Congo (RDC) contre la prospection pétrolière, qui pourrait "aggraver les conflits" et "réveiller les velléités séparatistes" de certaines régions. Un rapport qui fait débat au Congo.

Capture d’écran 2012-08-19 à 22.22.27.pngLes spécialistes appellent cela « la malédiction des ressources » : plus un pays possède de richesses naturelles, plus il souffre de prédation et moins sa population profite de cette manne financière. Et côté richesses naturelles, la RDC est particulièrement bien lotie : cuivre, cobalt, or, diamant, coltan, cassitérite… Le Congo se situe dans le top 10 des principaux exportateurs mondiaux de ces matières rares. Une secteur d'activité très rénumérateur, mais qui ne bénéficie pas au plus grand  nombre. Le pillage permanent des ressources naturelles maintient la majorité des Congolais en dessous du seuil de pauvreté et interdit tout effort de développement. Le trafic de minerais alimente également les achats d'armes, finance les nombreuses milices qui sévissent à l'Est de la République démocratique du Congo et nourrit un conflit qui s'éternise depuis 17 ans. Ne manquait plus que le pétrole, dont l'exploitation est encore embryonnaire.

Début juillet 2012, International Crisis Group (ICG) a publié un rapport sur le sujet et pose une question pertinente : « l’or noir au Congo, risque d’instabilité ou opportunité de développement ? » Le rapport recense trois grandes zones concernées par des projets de prospection pétrolière : la côte Atlantique où des blocs pétroliers sont contestés par la RDC à l'Angola ; dans la « cuvette centrale et à l'Est du Congo » et dans le parc des Virunga, à cheval sur la frontière ougandaise. Des réserves qui aiguisent les appétits des nombreuses multinationales pétrolières.

Nouvelle donne régionale

« Dans le contexte d’une course à l’or noir en Afrique de l’Est et centrale, le flou autour des frontières, notamment dans la région des Grands Lacs, constitue une menace considérable pour la stabilité », explique Marc-André Lagrange, analyste principal de Crisis Group pour l’Afrique centrale. « Les réserves pétrolières situées aux frontières du Congo avec l’Ouganda et l’Angola sont déjà sources de tensions ». Une zone retient particulièrement l'attention de ces spécialistes de la région : l'Est de la République démocratique du Congo. En effet, depuis maintenant plus de 4 mois, le Nord-Kivu est en proie à une nouvelle rébellion, le M23, qui tient tête à l'armée régulière. Pour ICG, la prospection pétrolière à l’Est « pourrait aggraver le conflit dans les zones à haut risque des Kivus, et réveiller des velléités séparatistes, entretenues par l’échec de la décentralisation et le différend financier entre l’Etat central et les provinces. » Cette nouvelle donne pourrait aussi bouleverser les rapports de forces régionaux en RDC et « remettre en cause la prépondérance politique de la riche province minière du Katanga. »

Mauvaise gouvernance

International Crisis Group note ensuite que « la mauvaise gouvernance caractérise le secteur pétrolier depuis la reprise des prospections. » Le groupe de recherche dénonce le retard pris dans la réforme du secteur pétrolier en RDC, ainsi que le manque d'un cadre légal réellement transparent. « Les précédents gouvernements ont agi comme des spéculateurs », fustige ICG.

Réguler la prospection pétrolière

« Dans un contexte de pauvreté extrême, d’Etat faible, de mauvaise gouvernance et d’insécurité régionale, la ruée vers l’or noir peut avoir un effet déstabilisateur important », craint Thierry Vircoulon, le directeur du projet Afrique centrale de Crisis Group. « Pour éviter ce scénario catastrophe, le gouvernement doit, au niveau régional, favoriser le dialogue avec ses voisins, et au niveau national, réguler la prospection pétrolière pour améliorer la gouvernance et la responsabilité ». Dans ses recommandations, le think tank, préconise la « création d’un cadre de gestion des réserves transfrontalières et au lancement d’un programme de délimitation de ses frontières. »

« Partage des richesses ? »

Il n'en fallait pas moins pour faire bondir le journal Kinois, Le Potentiel. Un article dénonce « une analyse qui favorise la balkanisation » et une  « négation de la souveraineté des Etats. » Dans le contexte bouillant de la reprise de la guerre à l'Est et de l'implication du Rwanda voisin dans le soutien à la rébellion du M23, le sujet des frontières est hautement sensible, vu de Kinshasa. Le journal congolais explique qu'International Crisis Group serait arrivé à la conclusion selon laquelle  « la résolution de la crise dans l’Est passe par la gestion commune des ressources transfrontalières », entendez par là : partager ses richesses avec le Rwanda ! L'idée n'est certes pas nouvelle, d'Herman Cohen à Nicolas Sarkzy en passant par Aldo Ajello, ancien représentant de l'Union européenne, le partage des richesses de l'Est congolais a été maintes fois évoqué. A propos d'International Crisis Group, je pense que Le Potentiel se trompe de cible et cède une fois de plus, un peu trop facilement, à la "théorie du complot" contre la République démocratique du Congo. ICG ne parle pas de partage de richesses, mais de régulation de la prospection pétrolière et de la création d'un « cadre de gestion des réserves transfrontalières », ce qui est bien différent. Dans le contexte de tensions permanentes entre voisins (Rwanda, Ouganda, Burundi, Angola… ), la RDC se doit en effet d'ouvrir le dialogue avec ces pays frontaliers, au risque de créer de nouveaux conflits. Là où Le Potentiel a en partie raison, c'est que la situation de la RDC pour négocier avec ses voisins n'est actuellement pas "optimale". Kinshasa est en effet fortement fragilisée aux yeux de ses voisins, depuis les élections contestées de novembre 2011 et la reprise de la guerre à l'Est en avril 2012. En cas de négociations, le Congo risquerait donc d'y laisser quelques plumes. Il n'empêche qu'il serait dommage de ne pas tenir compte des erreurs du passé au sujet des futures ressources pétrolière, notamment au regard de la gestion calamiteuse des ressources minières.

Christophe RIGAUD

Carte : "blocs" pétroliers dans la cuvette centrale et l'Est de la République démocratique du Congo (à partir de carte ONU et ministère des hydrocarbures - Kinshasa (2010)

01 août 2012

RDC : Le général Munene et le M23

L'interview du général dissident Faustin Munene accordée à Afrikarabia, puis sur RFI, a suscité une vive polémique. Le président de l'Armée de résistance populaire (ARP) avait entretenu une certaine ambiguïté dans les relations entre son mouvement de résistance et la rébellion du M23 qui sévit à l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Faustin Munene a donc souhaité faire une mise point.

Capture d’écran 2012-08-01 à 11.30.40.pngLe 24 juillet dernier, dans nos colonnes et quelques jours plus tard sur RFI, le général Faustin Munene, en dissidence contre le régime de Kinshasa, s'était exprimé sur les rebelles du M23 en lutte contre l'armée régulière congolaise au Nord-Kivu. Sur Afrikarabia, Faustin Munene déclarait que "(le M23) intègre le camp que nous appelons celui de la résistance" et de conclure, "en ce qui nous concerne, la résistance n’a pas de couleur". Sur RFI, deux jours plus tard, au micro de Christophe Boisbouvier, l'opposant congolais, réfugié au Congo-Brazzaville, déclarait également : "que la résistance congolaise ne tient pas compte des ethnies, des tribus, des religions... Le M23 est donc un grand mouvement de résistance". Il n'en fallait pas plus pour que de nombreux Congolais réagissent vivement. Beaucoup y ont lu, entre les lignes, un soutien à peine déguisé à la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda voisin.

L'ancien chef d'état-major de l'armée congolaise a souhaité clarifier sa position. Dans un communiqué, le général Munene estime n'avoir "jamais reconnu le M23 comme étant un mouvement de résistance patriotique, ni un allié de l'Armée de résistance populaire (ARP), mais plutôt une dissidence du CNDP incorporée dans le PPRD, le parti de Joseph Kabila pour des objectifs hégémoniques en RDC". Selon Faustin Munene, "le M23 est composé essentiellement d'éléments rwandais avec quelques éléments locaux voués à cette cause, à la solde de Joseph Kabila et Paul Kagame".

Cette mise au point du général Munene permet donc d'éclaircir les relations entre l'ARP et le M23, que tout sépare sur le papier. Pourtant, les propos du patron de l'ARP sur Afrikarabia et RFI, qualifiant le M23 de "grand mouvement de résistance", cachaient mal une certaine satisfaction de voir un mouvement rebelle ébranler le régime de Kinshasa. Car, si l'ARP et le M23 n'ont pas les mêmes objectifs (notamment au sujet des Kivus), ils ont au moins un ennemi commun : le président Congolais, Joseph Kabila.

Christophe RIGAUD