30 octobre 2011
RDC : Thierry Vircoulon (ICG) préoccupé par les violences électorales
Au moment où démarre la campagne officielle pour les élections générales en République démocratique du Congo (RDC), l'association Survie invitait à Paris une série d'experts autour de la question : "Congo-Kinshasa : Quel avenir dans les urnes ?". Le spécialiste Thierry Vircoulon d'International Crisis Group (ICG) a fait part de ses inquiétudes de voir les violences électorales se généraliser à la veille du scrutin, prévu le 28 novembre prochain.
Le 28 octobre 2011, jour du lancement de la campagne électoral en RDC, l'association Survie organisait, dans le cadre du Collectif Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique, une rencontre autour des prochaines élections présidentielle et législatives.
Thierry Vircoulon, directeur du programme "Afrique centrale" de l'ONG américaine Internationale Crisis Group, a décrypté les différents enjeux des élections de 2011 en RDC. Pour ce spécialiste de la région, "le processus électoral au Congo est bien mal parti. Depuis le début, ce processus est en retard". A seulement 1 mois du scrutin, de nombreuses incertitudes planent en effet sur ces élections. Le matériel électorale (bulletins de vote, urnes…) en provenance de Chine et d'Afrique du Sud n'est toujours pas arrivé et surtout son acheminement sur le terrain, dans des délais aussi serrés, est loin d'être garanti par les avions de mission de l'ONU en RD Congo (MONUSCO). Selon Thierry Vircoulon, outre les problèmes logistiques, plusieurs facteurs font de ces élections, un scrutin à haut risque :
- Le déséquilibre du rapport de force entre majorité et opposition. Les différentes formations politiques ne partent pas en campagne sur le même pied d'égalité. Il existe en effet de fortes distorsions sur le niveau de financement, l'organisation et la capacité de mobilisation entre les différents candidats.
- Le manque de transparence du scrutin. De nombreuses irrégularités ont été constatées lors de l'enregistrement des électeurs. Craignant une fraude massive, l'opposition réclame un audit du fichier électoral et l'accès au serveur de la Commission électoral (CENI).
- La sécurisation des élections. Les manifestations de l'opposition sont systématiquement réprimées.
Thierry Vircoulon, entrevoit donc deux risques principaux à ces élections : "tout d'abord la violence post-électorale avec un risque élevé de contestations des résultats". Le second risque, pour ce spécialiste, est de voir Joseph Kabila réélu avec une faible avance. Le parti présidentiel (PPRD) serait dans l'obligation de gouverner sans coalition, s'accaparant ainsi tous les pouvoirs. "Il peut donc y avoir des problèmes de stabilité à moyen terme" selon Thierry Vircoulon.
Ecoutez l'interview qu'a accordé Thierry Vircoulon à AFRIKARABIA à l'issue de cette conférence :
Thierry Vircoulon s'inquiète des violences... par ChristopheRigaud
A noter que trois autres experts étaient présents à Paris à l'invitation de l'association Survie. Said Abass Ahamed, est intervenu sur la transition démocratique en RDC. Il a notamment révélé que les élections congolaises étaient l'une des priorités du Département d'Etat américain en Afrique, avec le Sud-Soudan, le Nigeria et l'Ouganda. Il a souligné qu'au Nigeria et en Ouganda, les présidents sortants ont tous été "facilement réélus".
Alphonse Maindo a ensuite analysé les motivations des électeurs congolais au cours des élections de 2006 et 2011. Ce professeur en Sciences politiques à l'Université de Kisangani estime qu'en 2006, les Congolais voulaient "retrouver la paix", expliquant ainsi le vote en faveur de Joseph Kabila. En 2011, Alphonse Maindo pense que les électeurs veulent "retrouver la joie de vivre". En l'absence de toute amélioration dans la vie quotidienne des Congolais, ce professeur de Kisangani prévoit un "vote sanctionnant les principaux responsables" (à savoir Joseph Kabila).
Marie-Soleil Frère, professeur de journalisme à l'Université Libre de Bruxelles, est enfin intervenue sur "le rôle des médias en période électorale". Selon cette spécialiste, le paysage médiatique congolais n'a pas vraiment changé depuis les élections de 2006. Pour Marie-Soleil Frère, on retrouve les mêmes problèmes : un climat de tension extrême, une réglementation des médias non-clarifiée (malgré la nouvelle instance de régulation - CSAC), la télévision nationale (RTNC) toujours aux ordres du parti présidentiel, des médias très "partisans", un journalisme précaire et "rétribué" et des organes de presse vecteurs d'intolérance pouvant mener à une violence généralisée. Marie-Soleil Frère relève enfin les nombreuses exactions commises envers les journalistes (5 assassinats depuis 2006 et 17 emprisonnements en 2010), mais aussi à l'encontre des organes de presse (la chaîne de télévision CMCTV a été délogé le 25 octobre 2011 et la chaîne RLTV a été pillé le 6 septembre 2011).
Christophe RIGAUD
Photo : Thierry Vircoulon à Paris le 28 oct 2011 © Ch. Rigaud
20:23 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (6)
RDC : Human Rights Watch plaide pour des élections "sans haine"
La République démocratique du Congo (RDC) vit actuellement au rythme des violences électorales. Selon Human Rights Watch (HRW), "les candidats ne devraient pas inciter à la violence et les services de sécurité devraient cesser leurs attaques contre les candidats politiques et les manifestants". Des élections présidentielle et législatives doivent se tenir le 28 novembre prochain.
Depuis plusieurs mois, les manifestations de l'opposition congolaises sont systématiquement réprimées par les autorités de Kinshasa. La dernière manifestation à Mbujyi-Mayi s'est achevée sur le bilan d'1 mort et de 3 blessés. Dans ce contexte de vives tensions en RDC, l'ONG Human Rights Watch (HRW), estime que "les candidats politiques et leurs partisans en République démocratique du Congo ne devraient pas inciter à la violence et devraient s’abstenir d’employer des discours haineux durant la prochaine campagne électorale". Des élections présidentielle et législatives sont en effet prévues en RD Congo le 28 novembre 2011.
Depuis mars 2011, HRW a relevé "des dizaines de cas de discours haineux manifestement basés sur des critères ethniques, ainsi que d’incitation à la violence, de la part de candidats politiques et de leurs partisans. La police a par ailleurs employé une force inutile et excessive contre des manifestants politiques. Les agressions verbales et physiques, principalement contre des candidats de l’opposition et leurs partisans, ont créé un climat de peur dans certaines régions et soulevé des préoccupations relatives à la crédibilité des élections."
Selon Anneke Van Woudenberg, chercheuse à Human Rights Watch, "les candidats qui incitent à la violence risquent de provoquer une campagne électorale sanglante, et les autorités judiciaires doivent intervenir pour arrêter ce genre de comportement. Toute personne aspirant à une fonction gouvernementale devrait également reconnaître les graves dangers du recours à des discours haineux."
Pour lire la suite de l'enquête d'Human Rights Watch, cliquez ICI.
20:22 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (2)
28 octobre 2011
RDC : L'UDPS mise sur les législatives
Alors que la campagne électorale officielle démarre aujourd'hui en République démocratique du Congo (RDC), le parti d'Etienne Tshisekedi se dit prêt à négocier un report des élections législatives. Prévues le 28 novembre prochain, le même jour que la présidentielle, les législatives accusent de sérieux retards dans l'organisation du scrutin. Un "découplage" qui pourrait finalement faire l'affaire de l'UDPS.
Longtemps opposée au "découplage" des élections présidentielle et législatives, prévues toutes les deux le 28 novembre 2011, l'UDPS change de stratégie et se déclare prête à négocier un report de ce scrutin. Deux raisons peuvent expliquées ce retournement.
Une raison pragmatique tout d'abord. La Commission électorale congolaise (CENI) éprouve depuis le début de l'organisation du scrutin d'énormes difficultés logistiques : nombre de candidatures record, retards dans l'impression des bulletins de votes et dans l'acheminement du matériel électoral... L'UDPS reconnaît que la CENI n’est pas encore prête à organiser les élections. Pour l'instant, le président de la CENI, le pasteur Ngoy Mulunda persiste : "les deux scrutins auront bien lieu le 28 novembre prochain." Le problème, c'est que l'ensemble des observateurs (ONG, ambassades, société civile... ) estiment qu'il sera impossible d'organiser ces deux élections, le même jour, dans la sérénité. L'UDPS prend donc les devants en souhaitant maintenir la date du 28 novembre pour la présidentielle (avec un chef de l'Etat élu à la date prévue) mais en reportant les législatives, afin d'organiser ce scrutin "dans de bonnes conditions matérielles".
Derrière cette déclaration de l'UDPS, on peut également y voir une nouvelle stratégie électorale. Avec 6 candidats de l'opposition et une présidentielle à un seul tour, on voit mal comment le président Joseph Kabila peut ne pas être réélu à la tête de la RD Congo le 28 novembre. L'opposition congolaise n'a effectivement pas réussi à s'entendre sur une candidature unique face au président sortant. Le parti d'Etienne Tshisekedi estime avoir une chance de se rattraper aux législatives, où il sera ensuite plus facile de nouer des alliances avec d'autres députés d'opposition, à l'Assemblée nationale. Joseph Kabila pourrait ainsi se retrouver en situation de cohabitation... sans majorité solide à la chambre.
Un seul danger guette les partis d'opposition en cas de report des législatives : la longueur de la campagne pour la députation qui bénéficierait plutôt aux partis disposant de confortables moyens financiers... ce dont manque l'opposition.
Christophe RIGAUD
Photo : E. Tshisekedi à Bruxelles en 2011 (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com
10:42 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (5)
RDC : "Viva Riva !" débarque à Kinshasa
Après son succès en Europe et aux Etats-Unis, le long métrage belgo-congolais "Viva Riva !" arrive en République démocratique du Congo (RDC). Des séances seront organisées à Goma, le 29 octobre et Kinshasa le 31 octobre dans le cadre du Festival Cinéma Européen. Une première pour ce film événement réalisé par un Congolais, Djo Tunda Wa Munga.
"Viva Riva !", le film congolais événement débarque enfin en République démocratique du Congo (RDC). Après une carrière internationale exceptionnelle jalonnée de nombreuses sélections dans les festivals du monde entier, couronné par plusieurs prix prestigieux et des articles de presse élogieux, "Viva Rival !", le premier long métrage du jeune cinéaste congolais Djo Tunda Wa Munga, revient au pays. Le film sera projeté dans le cadre de l'ouverture du Festival Cinéma Européen à Kinshasa le 31 octobre à 19h00 au Collège Boboto en présence du réalisateur et sera également à l'affiche du festival SKIFF (Salam Kivu International film Festival) à Goma ce samedi 29 octobre 2011.
"Viva Riva !" est le premier film de l’histoire du Congo moderne. Le réalisateur, Djo Tunda Wa Munga, a en effet entièrement tourné à Kinshasa, en lingala, avec des comédiens et techniciens locaux. Depuis lors, le film a rencontré un succès critique et populaire sans précédent et totalement inattendu pour un film africain, qui plus est congolais.
Après ce succès, la production du film (SUKA !) et le réalisateur se sont lancés un nouveau défi : sortir le film sur grand écran en RD Congo. La sortie s’étalera sur plusieurs mois et consistera en plusieurs projections dans différents lieux de la capitale pouvant accueillir ce genre d’événements, ainsi que dans les villes principales du pays (Lubumbashi, Goma, Bukavu, Kisangani, Matadi).
Christophe RIGAUD
Plus d'infos : www.vivariva.com
10:09 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (0)
27 octobre 2011
Kamerhe-Tshisekedi : L'impossible accord
A un mois de l'élection présidentielle et après plusieurs rendez-vous manqués, Vital Kamerhe et Etienne Tshisekedi ne se sont pas accordés sur une candidature unique de l'opposition. Dans une interview à Congo News, Vital Kamerhe en explique les raisons et laisse peu d'espoir à un accord de dernière minute. La République démocratique du Congo (RDC) élira son prochain président le 28 novembre prochain.
Dans un long entretien à nos confrères de Congo News, le leader de l'UNC, Vital Kamerhe revient sur les raisons de ses rendez-vous manqués avec Etienne Tshisekedi, l'autre "poids lourd" de l'opposition. Vital Kamerhe évoque des problèmes d'agendas : " (des proches de Tshisekedi) m'ont proposé de venir à Bruxelles. J'ai leur dit qu'il n'était pas possible, puisque je séjournais encore à Addis-Abeba. Ils m'ont proposé le Canada, je leur ai dit que là c'était possible. Mais qu'avant tout, je devrais remplir mon agenda. Je devais répondre à l'invitation du département d'Etat américain. Je devrais également boucler deux rendez-vous d'avec deux chefs d'Etat de l'Afrique de l'Ouest avant de poursuivre mon périple vers Washington. (les proches de Tshisekedi) m'ont fait remarquer qu'après Canada, le président Tshisekedi va faire Washington. Et moi, mon agenda avait prévu que j'arrive à Washington le 3 octobre. Je devrais y rester du 3 au 7 octobre. Malheureusement, j'y suis arrivé le 5, Tshisekedi était encore à Washington. Il se fait que le jour où j'arrive dans la capitale américaine, le président Tshisekedi se rendait à Raleigh dans l'Etat de Californie du Nord." La suite de contre-temps ne s'arrête pas là. Vital Kamerhe affirme que Tshisekedi lui a proposé de se rencontrer "à l'Est du Congo". Une "excellente idée" pour Kamerhe. Mais là encore, Tshisekedi est parti pour Bruxelles et souhait donc une rencontre en Europe. Dans l'entretien à Congo News, Kamerhe ne cache pas son agacement : "je suis quand même président d'un parti politique. J'ai tout mon parti à gérer. Nous nous approchons des échéances électorales et le temps n'est pas toujours avec nous. Nous devons le gérer de manière à ne pas perdre une seule minute"... Vital Kamerhe ne se rendra pas en Europe et le rendez-vous est une nouvelle fois reporté.
Mais dans l'interview, Kamerhe donne une autre raison de la rencontre manquée de Washington : "un autre élément qui a fait que je puisse retarder mon arrivée à Washington, c'était de vouloir d'abord comprendre ce qui s'est passé à Goma, Uvira, Bukavu avec la descente sur le terrain du conseiller politique du président Tshisekedi, monsieur Mubake. Je n'ai pas compris que le président Tshisekedi m'invite pour signer un accord avec lui, pendant qu'il envoie au même moment son conseiller pour m'insulter d'abord à Goma, puis à Bukavu et s'en prendre à mon parti comme si nous étions détenteur du pouvoir." La visite et les propos du candidat aux législatives de Bakavu, Valentin Mubake de l'UDPS, n'ont visiblement pas été du goût du président de l'UNC. En tournée dans l'Est, Mubake s'en était effectivement pris à Vital Kamerhe : "la population du Sud-Kivu attend comme un messie Monsieur Tshisekedi. Et pas Kamerhe".
A lire cette interview de l'ancien président de l'Assemblée nationale congolaise, on peut se demander si un accord est encore possible à quatre semaines du scrutin. Pour Vital Kamerhe "c'est possible", il n'est jamais trop tard pour bien faire", mais on doute sérieusement. Car depuis les déclarations de candidature d'Etienne Tshisekedi et Vital Kamerhe, tout semble opposer les patrons de l'UDPS et de l'UNC.
Pour Etienne Tshisekedi, le parcours de Vital Kamerhe constitue le principal obstacle d'un accord avec l'UNC. Ancien allié de Joseph Kabila, directeur de campagne du président sortant et ex-président de l"Assemblée nationale... cela fait beaucoup pour Tshisekedi. Le leader de l'UDPS estime en effet que Vital Kamerhe est trop rapidement passer de la majorité présidentielle à l'opposition pour s'ériger en leader de cette dernière. Deuxième point d'achoppement : la revendication de la primature par le président de l'UNC. Le parti d'Etienne Tshisekedi estime en effet délicat d'attribuer le poste de Premier ministre avant les législatives. Le Premier ministre est généralement issu du parti majoritaire à l'Assemblée nationale, pour pourvoir gouverner les mains libres. Il y a ensuite le parcours politique de Kamerhe, son ultra-libéralisme et le choc générationnel qui finissent par éloigner définitivement le président de l'UDPS de celui de l'UNC. Puis enfin, un dernier élément vient hypothéquer tout accord entre Tshisekedi et Kamehre : l'envie. En lisant l'interview du candidat Kamerhe et les différents entretiens accordés par le candidat Tshisekedi, on se demande si seulement 1 secondes, ils ont pensé pouvoir se mettre d'accord.
Il y aura donc, sauf accord surprise, 3 candidats importants de l'opposition à la présidentielle : Etienne Tshisekedi, Vital Kamerhe, Léon Kengo... mais aussi François Nzanga Mobutu, Oscar Kashala et Adam Bombole. Beaucoup tros de candidats pour inquiéter le président sortant Joseph Kabila.
Christophe RIGAUD
13:58 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (4)
RDC : 41 ONG inquiètes des violences pré-électorales
Le 28 octobre démarre la campagne électorale en République démocratique du Congo (RDC). Des ONG congolaises et internationales demandent des mesures urgentes pour prévenir de la dégradation de la situation sécuritaire. Des élections contestées pourraient déclencher une violence généralisée.
A seulement 1 mois des élections présidentielle et législatives en RD Congo, 41 organisations d’aide humanitaire et de défense des droits humains s’inquiètent de l'escalade de la violence et appellent tous les acteurs congolais et internationaux concernés à prendre des mesures urgentes pour prévenir la violence électorale, mieux protéger les civils et assurer des élections crédibles, libres et transparentes.
« Ces élections sont un test ultime. La RDC est-elle en voie de consolider sa démocratie naissante ou de retourner à un état d’insécurité, d’instabilité et de violence généralisée ? Ces secondes élections sont cruciales pour consolider le gain démocratique du pays, achever un cycle électoral complet et renforcer les institutions de la démocratie », déclare Thierry Vircoulon, directeur Afrique centrale de l’International Crisis Group (ICG).
Le gouvernement congolais est à la tête d’un pays où environ 20% des enfants meurent avant d’atteindre l’âge de 5 ans, où la durée moyenne d’éducation chez les adultes est de 3,8 années, et où des millions de civils sont morts au court des dernières décennies en conséquences de la guerre. Un nouveau gouvernement nécessitera un mandat fort et légitime de la part du peuple congolais pour répondre efficacement à ces problèmes systémiques.
« La communauté internationale fournit des milliards de dollars pour aider la RDC. Elle ne peut payer pour des élections frauduleuses ou conduites de façon médiocre qui déclencheraient des violences et feraient reculer le développement. Nous avons beaucoup moins d’observateurs électoraux qu’en 2006. La communauté internationale doit être stricte en termes de surveillance du respect des normes internationale et se tenir prête à condamner fermement toute irrégularité. Après des décennies de guerre et de pillage, le peuple congolais mérite la paix et la stabilité – et a vraiment besoin de soutien pour cela », affirme Paul Nsapu, secrétaire général de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et président de la Ligue des électeurs en RDC.
Les événements récents en RDC ont révélé un potentiel alarmant de violence et de déstabilisation durant la période électorale. Des affrontements violents entre la police et l’opposition ont eu lieu depuis début septembre, faisant plusieurs morts et de nombreux blessés à Kinshasa. A cette violence liée aux élections s’ajoute l’insécurité généralisée qui ravage le pays depuis des années, avec une augmentation récente du nombre d’attaques contre les travailleurs humanitaires : la RDC a connu ce mois-ci le plus mortel de ces incidents dans toute son histoire, avec le meurtre de cinq humanitaires au Sud Kivu. Les forces de sécurité en RDC peinent déjà à faire face à l’insécurité continue et ne sont pas en mesure de répondre à une escalade de la violence.
« Les autorités congolaises disent qu’il y a la paix et la sécurité en RDC. Mais avec les élections dans un mois à peine, la tension politique a augmenté et des affrontements entre partis politiques et militants ont lieu régulièrement. La décision du gouvernement congolais d’interdire les manifestations politiques et publiques révèle son incapacité à prévenir et à répondre à la violence électorale, et va à l’encontre de la constitution congolaise. Nous avons besoin que des forces de sécurité fiables nous protègent durant cette période électorale, en particulier à Kinshasa où la tension est déjà très élevée », insiste Jérôme Bonso, coordinateur de la coalition Agir pour les Elections Transparentes et Apaisées (AETA) en RDC.
Le gouvernement congolais a la responsabilité de protéger les civils et d’organiser des élections pacifiques. Cependant, il existe aujourd’hui de sérieux doutes quant à la possibilité de tenir des élections crédibles, transparentes et démocratiques dans les délais officiels. Sans des élections libres et justes répondant aux normes internationales, et sans une forte présence d’observateurs locaux et internationaux pour rétablir la confiance dans le processus électoral, le risque de dispute électorale et de violence est considérable. Kinshasa, où certaines de nos organisations ont dénoncé l’usage excessif de la force par la police nationale contre des manifestants, figure parmi les principaux lieux à risque. Le risque de violence est également élevé dans l’Est de la RDC, où la population avait majoritairement voté pour le Président Kabila à la dernière élection présidentielle.
Ces organisations appellent à ce que les mesures suivantes soient rapidement mises en œuvre pour prévenir la violence électorale :
- Les autorités congolaises devraient s’assurer que les civils pourront participer aux élections dans des conditions de sécurité et de dignité, en déployant des forces de police nationale bien entraînées et bien équipées, et de s’assurer que la police ne fasse pas un usage excessif de la force. Les autorités devraient respecter la liberté d’expression et des médias, garantir le droit de se rassembler et de manifester pacifiquement, et s’abstenir de toute tentative d’intimidation. Elles devraient s’assurer que des mécanismes de règlement des litiges sont en place.
- La Commission électorale nationale indépendante (CENI) devrait immédiatement rendre publique davantage d’information quant à sa stratégie, notamment concernant le rassemblement des données et la publication des résultats, ainsi qu’en termes d’éducation des électeurs. Elle devrait faciliter un dialogue constructif à propos du processus électoral entre la société civile, l’opposition et les autorités au pouvoir, dans la lignée du processus de consultation réalisé en 2006.
- Les partis politiques devraient souscrire au Code de conduite, accepter les résultats d’élections libres et justes, et demander à leurs militants de rester pacifiques. Ils devraient éviter d’invoquer des discours de haine incitant à la violence.
- Les ambassades et les missions d’observation électorale devraient coordonner leurs actions entre elles et avec les observateurs locaux afin de pouvoir surveiller un maximum du territoire congolais, en se concentrant sur les lieux à risque – tels que les grandes zones urbaines de Kinshasa, Lubumbashi et Mbandaka. Elles devraient également développer davantage la capacité locale d’observation électorale et dénoncer publiquement toutes violations du processus électoral.
- La mission des Nations unies en RDC (Monusco) devrait assurer que sa force de réaction rapide et que la police onusienne sont prêtes à se déployer dans les lieux identifiés à risque afin de prévenir et de répondre toute violence électorale, y compris de répondre à tout usage excessif délibéré de la force par les autorités congolaises contre les civils. La Monusco devrait aussi informer publiquement des violations relatives aux élections, et assurer une médiation en cas de conflit entre partis politiques.
Voir la listes des organisations signataires : cliquez ici
Photo : RDC élections de 2006 (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com
13:58 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (6)