Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14 octobre 2012

RDC : La "Congo Week" s'ouvre à Paris

Du 14 au 20 octobre 2012, plusieurs grandes villes participeront à la "Congo Week", de Paris à New-York, en passant par Ottawa, Tokyo, Johannesburg, Kisangani ou Goma. Cette semaine est destinée à sensibiliser et informer le grand public sur le conflit meurtrier qui sévit depuis plus de 16 ans en République démocratique du Congo. Au programme à Paris : conférences, projections de films et même une "Journée sans portable" le 17 octobre.

Capture d’écran 2012-10-14 à 21.39.39.pngDepuis 2006, le collectif "Friends of thé Congo" organise une "Congo Week" à travers le monde. Cette année, Paris sera au rendez-vous de cet événement . Au programme : une semaine de rencontres, de débats, de conférences, de projections de films pour dénoncer un conflit méconnu du plus grand nombre. Depuis plus de 16 ans, la République démocratique du Congo est secouée par des guerres à répétition à l'Est du pays. Bilan : plusieurs millions de morts et un silence assourdissant de la communauté internationale. Voici le programme parisien de cette semaine de sensibilisation, qui se déroulera à la "Maison de l'Afrique", 7 rue des Carmes dans le 5ème arrondissement :

- Mercredi 17 octobre, la "Congo Week" propose une "Journée sans portable". Pour protester contre le financement du conflit par les trafics de minerais destinés à la fabrication de nos mobiles, la "Congo Week" appelle à éteindre son téléphone toute la journée et à laisser un message au répondeur qui explique son geste.

- Jeudi 18 octobre de 18h30 à 20h30: Conférence, "Histoire des indépendances du Congo et de ses voisins des Grands-Lacs et Introduction à l'Histoire récente du Congo". Avec Klara Boyer-Rossol Klara, Jordane Bertrand, journaliste et auteur de "Histoire des Indépendances africaines et de ceux qui les ont faites" et Anicet Mobe, journaliste et historien congolais.

- Vendredi 19 octobre de 18h30 à 20h30: "L'enjeu des ressources naturelles, le Congo, un pays central pour l'économie mondiale" Première partie: Projection du film "Du sang dans nos portables" Deuxième partie: Conférences avec Kerwin Mayizo, Journaliste congolais, Anicet Mobe, Historien congolais, Thierry Téné, co-fondateur de l'Institut Afrique RSE, Jean-Paul Mvogo, économiste et Saïd Abass Ahmed, doctorant Sorbonne Paris 1, spécialiste RDC. Modérateur: Hervé LADO, diplômé des Sciences-po.

- Dimanche 21 octobre de 14h00 à 20h00: "Le rôle des ONG, des associations et des artistes de la diaspora". Modératrice: Rebecca Kabongo, activiste congolaise des droits de l'Homme.
Avec :
14h00-15h30: Patrick Helmininger et Mme Mossi de l'Amnesty International (Sous resèrve), Maitre Réty, ancien avocat de la défense au tribunal international d'Arusha et président du CRID, Jean-Louis Tshimbalanga de l'association "Convergence pour l'émergence du Congo" et auteur de "L'impératif d'une culture démocratique en RD Congo";
15h45-16h30: Présentation des Firends Of The Congo et projection du film "La crise au Congo, la vérité dévoilée";
16h45-17h30: Intervention d'Elsa Vumi sur la marche mondiale des femmes au Kivu en Octobre 2010; Témoigange de l'association Femmes du Kivu;
17h45: Le travail des journalistes en temps de guerre avec Anastasie Mutoka suivi du rôle des artistes avec Olivier Tshimbalanga et Alain Ndongisila.

Toutes les informations sont sur le site de la "Congo Week" : congoweekparis.blogspot.fr

13 octobre 2012

RDC : L'échec de la stabilisation des Kivus dénoncé par ICG

Dans son dernier rapport, International Crisis Group (ICG) revient sur les raisons de l'impossible retour de la paix dans les Kivus, en proie à une nouvelle flambée de violence depuis avril 2012. ICG dénonce la responsabilité des  autorités congolaises, rwandaises, des rebelles, mais aussi "l'impuissance" et "la politique à géométrie variable" de la Monusco. Pour "résoudre le conflit" et sortir de la simple "gestion de crise", le think tank demande aux bailleurs "d'exercer des pressions sur Kigali et Kinshasa".

filtre DSC04014.jpgDans maintenant plus de 5 mois, la rébellion du M23, affronte les forces gouvernementales dans le Nord-Kivu, à l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Les rebelles tiennent la ville frontière de Bunagana, administrent plusieurs localités dont celle de Rutshuru, et menacent de prendre Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu. Véritable "copier-coller" de la rébellion du CNDP de 2008, l'apparition du M23 signe un nouveau constat d'échec des multiples programmes de "stabilisation" pour ramener la paix dans la région.

Dans son rapport, "l'Est du Congo : pourquoi la stabilisation a échoué", International Crisis Group (ICG) explique pourquoi "les problèmes d’aujourd’hui sont les problèmes d’hier". Le think tank rappelle que "l’application de l’accord du 23 mars 2009 entre le gouvernement et le Conseil national pour la défense du peuple (CNDP) a été un jeu de dupes au cours duquel les autorités congolaises ont fait semblant d’intégrer politiquement le CNDP, tandis que celui-ci a fait semblant d’intégrer l’armée congolaise".  Pour ICG, la nouvelle crise des Kivus, "met en lumière les paramètres du problème de cette région : la mauvaise gouvernance de Kinshasa, l’ingérence du voisin rwandais et l’inefficacité des outils internationaux de réponse à la crise (Monusco et CIRGL).

Les "faux semblants" de l'application des accords du 23 mars

Après la crise de 2008, le conflit qui opposait le CNDP de Laurent Nkunda au gouvernement congolais, s'était réglé par un accord de paix signé à Goma le 23 mars 2009. Les principes de l'accord reposaient sur l'intégration des rebelles du CNDP au sein de l'armée congolaise (FARDC) et la transformation de la rébellion en formation politique. Sur ces aspects de l'accord, ICG note que "le gouvernement et le CNDP l’ont tous deux instrumentalisé et ont rivalisé de mauvaise foi". Sur l'intégration politique du CNDP, ICG estime que "Kinshasa a gardé la main", le mouvement ayant été cantonné au "niveau provinciale" Sur l'intégration militaire, c'est par contre le CNDP qui aurait "gardé la main". L'intégration aurait "achoppé sur 3 éléments : la reconnaissance des grades, l'attribution des postes et le lieu de déploiement". International Crisis Group révèle que l'ex-rebelle Bosco Ntaganda, nommé commandant de l'opération "Amani Leo" en a profité pour "imposer ses fidèles aux postes de commandement et étendre son influence" du Sud au Nord-Kivu. Le rapport estime qu'alors, "ce n’est pas l’armée congolaise qui a absorbé les
combattants du CNDP mais le CNDP qui a absorbé l’armée congolaise". Selon ICG, "le CNDP est parvenu à conserver la haute main sur une bonne partie de l’appareil militaire dans les Kivus, ce qui n’a cessé de générer un fort ressentiment
dans les rangs des FARDC".

Une armée "prédatrice"

Le rapport dénonce ensuite les mauvaises pratiques au sein de l'armée congolaise : "compte-tenu du manque de discipline et du double système de commandement, (…) les FARDC ont surtout étendu leurs activités de prédation" (la région est riche en minerais de toutes sortes). Les différents plans de reconstruction de l'armée congolaise (STAREC et ISSSS) n'ont visiblement pas donné les résultats escomptés, ICG parle de "non-réforme" de l'armée.

L'échec de la Monusco

Crisis Group insiste particulièrement sur "l'impuissance" des casques bleus en RDC. Comme en 2008, la Monusco "apparait incapable d’empêcher l’émergence d’une nouvelle rébellion". ICG note que les casques bleus disposent "en permanence de 6 bataillons à Goma". Pourtant plus nombreuse que le M23, "la Monusco ne parvient toujours pas à appliquer l’élément essentiel de son mandat : la protection des populations". Le centre de recherche dénonce "une politique à géométrie variable" concernant Bosco Ntaganda et pointe les incohérences de sa stratégie. La Monusco refusait d'arrêter Bosco Ntanganda alors qu'il se promenait librement dans Goma, mais se dit maintenant prête "à contribuer à son arrestation après le revirement des autorités congolaises". Pour ICG, "l'inaction de la Monusco" s'explique par "le refus de recourir à l'usage de la force contre les groupes armés, conformément au chapitre VII de la Charte des Nations unies". Résultat : des massacres sont commis sous les yeux des casques bleus, comme à Mijembe, à Wilikale ou à Pinga.

La "fausse solution" d'une force neutre

Concernant la "force neutre" décidée par la CIRGL, International Crisis Group n'est guère enthousiaste. Cette force, dont on ne connait ni le contours ni le financement devrait surveiller la frontière avec le Rwanda, accusé par les experts de l'ONU de soutenir les rebelles du M23. La Conférence Internationale pour la Région des Grands Lacs (CIRGL) s'est réunie plusieurs fois… sans grand succès. Pour ICG, la "force neutre" est une "fausse solution" : comment 4 000 hommes supplémentaires feraient "ce que n’ont pas fait 18 000 Casques bleus et 30 000 soldats congolais".

Pour résoudre le conflit, "au lieu de le geler pour deux ans", International Crisis Group demande la poursuite des "auteurs de crimes de guerre, d’appliquer les réformes de gouvernance définies depuis longtemps, d’ouvrir l’espace politique aux acteurs légitimes et de sanctionner les ingérences étrangères". Pour cela "les bailleurs doivent exercer des pressions sur Kigali et Kinshasa", ce qui n'est pas encore le cas… ou pas assez.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Photo © Ch. Rigaud - www.afrikarabia.com

11 octobre 2012

RDC : Réapparition "surprise" de Diomi Ndongala

L'opposant congolais, Diomi Ndongala, porté disparu depuis 4 mois, a été retrouvé vivant dans la nuit de mercredi à jeudi. Accusé de viol sur mineures par les autorités congolaises, ses proches accusaient Kinshasa de le détenir au secret. La "libération" de Ndongala ne doit pourtant rien au hasard. Elle intervient moins de 24 heures avant l'ouverture du Sommet de la Francophonie ce vendredi à Kinshasa.

Image 1.pngLa ficelle est un peu grosse. Quelques heures avant le lancement du 14ème Sommet de la Francophonie à Kinshasa, l'opposant politique Diomi Ndongala, a retrouvé la liberté. Selon Radio Okapi, le leader de la Démocratie Chrétienne a été retrouvé dans la nuit de mercredi à jeudi sur la route de Matadi, dans un quartier de Kinshasa. Sa "disparition" en juin dernier avait suscité la condamnation de l'opposition congolaise et des proches de Ndongala. Pour eux, l'opposant se trouvait enfermé au secret dans les locaux de l'Agence nationale du Renseignement (ANR). Pour les autorités congolaises, Ndongala était en "fuite" après une accusation pour "viol sur mineures".

Dernièrement, Amnesty International affirmait avoir des informations récentes sur l'opposant congolais. Plusieurs sources indiquaient qu'il se trouvait d'abord au camp militaire de Tchatchi, puis à la troisième direction des services nationaux du renseignement, à Kinshasa, où il aurait été détenu jusqu'au 2 août. ". Amnesty, comme certains de ses proches, affirmaient que le parlementaire était "en mauvaise santé et aurait perdu beaucoup de poids car il a manqué de nourriture et a été privé des soins nécessaires au traitement de ses pathologies chroniques".

Depuis ce matin et sa découverte sur la route de Matadi, on sait donc que Diomi Ndongala n'était visiblement pas en fuite, mais plus vraisemblablement détenu par les forces de sécurité congolaise quelque part à Kinshasa. Selon ses proches, le leader de la Démocratie Chrétienne (DC) est actuellement très fatigué et reste placé sous perfusion. Il devrait rapidement pouvoir s'expliquer sur ses 4 mois de "disparition", mais déjà, les responsables de la CD n'hésitent pas à parler de mauvais traitements.

La "libération" de Diomi Ndongala, ne doit rien au hasard. Dans moins de 24 heures s'ouvrira le 14ème Sommet de la Francophonie à Kinshasa. Le cas de la "disparition" de Ndongala constituait une affaire "embarrassante" pour Kinshasa, accusée par de nombreuses ONG de persécuter ses opposants politiques. Sa réapparition "surprise" tombe à pic autorités congolaises, qui s'apprêtent à recevoir samedi François Hollande. Le Président français avait dernièrement tancé Kinshasa sur la situation des droits de l'homme en RDC... visiblement le message a été reçu 5 sur 5.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

10 octobre 2012

RDC : Hollande joue gros à Kinshasa

La tension est montée d'un cran entre Paris et Kinshasa, à 2 jours de l'ouverture du Sommet de la Francophonie. François Hollande a durcit le ton contre le régime de Joseph Kabila en jugeant la situation "tout à fait inacceptable sur le plan des droits de l'homme". En critiquant Kinshasa et en ne boycottant pas le Sommet, comme le demandait l'opposition, le président français a fini par mécontenter tout le monde. Sa marge de manoeuvre sera extrêmement étroite, samedi à Kinshasa.

filtre DSC02398.jpgLa controverse sur la venue de François Hollande à Kinshasa pour le Sommet de la Francophonie qui doit débuter le 12 octobre n'en finit pas de faire des vagues. La dernière polémique en date émane du président français lui-même. Mardi dernier, dans d'une conférence de presse commune avec le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, François Hollande a déclaré que la situation en République démocratique du Congo (RDC) était "tout à fait inacceptable sur le plan des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l'opposition".

François Hollande avait beaucoup hésité à se rendre à Kinshasa pour le Sommet de la Francophonie. Les élections frauduleuses de novembre 2011, les nombreuses violations des droits de l'homme, les arrestations arbitraires d'opposants politiques et la reprise de la guerre à l'Est avaient fini par jeter le trouble sur l'opportunité d'organiser le prochain Sommet en République démocratique du Congo.

L'opposition politique avait prôné la "délocalisation" du Sommet dans un autre pays comme cela avait été le cas pour Madagascar en 2010. Les opposants affirmaient que la seule présence du président français, légitimait le pouvoir en place et validait par la même occasion la réélection très contestable de Joseph Kabila. La dernière déclaration tonitruante de François Hollande contre le régime Kabila vise sans doute à rassurer l'opposition congolaise, très en colère contre la venue du président français. Cela suffira-t-il à calmer les esprits contestataires ? Sans doute pas. L'UDPS, le premier parti d'opposition a, certes, mis de l'eau dans son vin en modérant ses appels à manifester, mais le parti d'Etienne Tshisekedi lance tout de même une "occupation des rues et des boulevards". L'UDPS demande à ses sympathisants d'"accompagner" son leader à son tête à tête avec le président français, prévu le 13 octobre à l'ambassade de France de Kinshasa.

Si la venue de François Hollande n'était pas souhaitée par l'opposition, les autorités congolaises sont elles aussi mécontentes par les propos présidentiels. Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende a estimé ce mardi que la déclaration du président français, qui a jugé "tout à fait inacceptable" la situation de la démocratie dans le pays, ne reflétait "aucune réalité". Avec humour, Lambert Mende a répliqué au président français que si sa déclaration "concernait la situation dans l'Est en proie à un regain d'instabilité", alors "nous sommes tout à fait d'accord: la situation des droits de l'homme est tout à fait inacceptable".

Si l'opposition et les autorités congolaises attendent de pieds fermes François Hollande, avec "quelques reproches à formuler", seul le M23 salue la condamnation du président Hollande sur la situation des droits de l'homme en RDC. Le mouvement rebelle, en guerre contre l'armée régulière au Nord-Kivu, se félicite de la déclaration française : "il n'y a pas de démocratie, ni de droits de l'homme et  l'opposition est marginalisée" approuve le M23. "La communauté internationale commence à reconnaître et à découvrir les vraies réalités de notre pays. C'est parmi les causes de notre lutte armée", conclut le porte-parole de la rébellion à l'AFP.

François Hollande devra donc faire preuve d'habileté politique et de tact diplomatique lors de sa visite express dans le "chaudron congolais", où, mis à part le M23, personne ne semble complètement se satisfaire de sa simple venue. En août dernier, nous avions intitulé notre article sur la présence du président français à Kinshasa : Hollande dans le piège de Kinshasa. En réussissant, pour l'instant, à mécontenter tout le monde, François Hollande continue de s'enfermer patiemment  dans une situation très inconfortable. Pour s'en sortir, le président devra en quelques heures "briller" à Dakar dans un discours "humaniste" au continent africain et devra ensuite "montrer les dents" à Kinshasa face au président Joseph Kabila.Si tel est le cas, nous pourrons mesurer après cette première sortie présidentielle, le poids de la France en Afrique centrale… et même en Afrique tout court.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia