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27 septembre 2012

Kivu (RDC) : Le calme avant la tempête ?

Si le front militaire est encore calme entre les rebelles du M23 et l'armée régulière, la situation sécuritaire se tend autour de la ville de Goma. Une série d'attaques depuis le début de la semaine fait craindre une reprise des combats dans la région, une fois le sommet de la CIRGL et le Sommet de la Francophonie passés. L'aile militaire du mouvement rebelle semble prête à l'épreuve de force.

filtre DSC02372.jpgDepuis le mois d'avril, l'armée régulière de la République démocratique du Congo (FARDC) affronte les rebelles du M23, qui contrôlent maintenant le territoire de Rutshuru, au Nord-Kivu. Cet été, le mouvement rebelle a installé une administration parallèle dans ces zones et menace toujours de prendre la ville de Goma, la capitale provinciale. Depuis plusieurs semaines, un calme précaire était revenu pendant que la diplomatie essayait de trouver une porte de sortie au conflit. Mais pour le moment aucune initiative ne semble porter ses fruits. L'ONU hésite à condamner trop fermement le Rwanda, accusé de soutenir la rébellion et la République démocratique du Congo refuse toujours de négocier avec les rebelles. Une «force neutre» pourrait se mettre en place entre la frontière congolaise et rwandaise, mais ses contours et son financement demeurent très incertains. Au mieux, elle se mettra en place dans plusieurs mois, ce qui laisse encore du temps au M23 pour s'installer et progresser.

Sur le terrain militaire, le calme devrait tenir encore quelques jours, ou quelques semaines. Deux rendez-vous internationaux mobiliseront l'attention des différents protagonistes du conflit : la rencontre des chefs d'Etats de la région, le 8 octobre à Kampala, au cours de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et enfin le Sommet de la Francophonie, prévu à Kinshasa du 12 au 14 octobre prochain. Après ? Personne ne peut prédire l'avenir, mais les militaires du M23 risquent fort de reprendre la main sur l'aile politique du mouvement. Selon une source, les soldats du M23 sont convaincus qu'il «faut aller plus loin». Car depuis plusieurs semaines, la simple revendication des accords du 23 mars (d'où le nom de M23) ne suffit plus. Les revendications sont devenues plus «globales» et résoluement «anti-Kabila». D'après l'aile militaire de la rébellion, «il y a eu trop de morts, trop de populations déplacées pour continuer à faire confiance au président Joseph Kabila. On ne peut plus se retrouver dans cette armée là». A la question «que ferez-vous par la suite ?», la réponse est claire : «on avance !».

Sans jouer les oiseaux de mauvais augure, il est donc fort à parier que la situation sécuritaire risque de se dégrader après la mi-octobre. En début de semaine, plusieurs attaques de nuit ont déjà agité la ville de Goma. Selon les autorités provinciales, 12 personnes seraient mortes des suites de nombreuses fusillades et d'attaques à la grenade. Le porte-parole de la région du Nord-Kivu, Ernest Kyaviro, a précisé à l'agence Reuters qu'il s'agissait sans doute «d'une infiltration de rebelles du M23». L'information est difficile de vérifier, d'autant que depuis la réactivation de la guerre dans la région, de nombreux groupes armés ont repris du service et terrorisent régulièrement la population. Une chose est sûre, la «poudrière des Kivus» ne demande qu'une étincelle pour s'enflammer de nouveau.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Photo (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com

26 septembre 2012

RDC : Thierry Michel toujours sans visa

Le réalisateur du documentaire "L'affaire Chebeya, un crime d'Etat ?" attend toujours son visa pour participer au Sommet de la Francophonie en République démocratique du Congo (RDC). Après son expulsion de Kinshasa en juillet dernier, Thierry Michel avait pourtant reçu l'assurance du Premier ministre congolais et de Yamina Benguigui que la RDC lui délivrerait bien un visa. Le 20 septembre, l'ambassade a refusé sa demande. Le réalisateur belge vient également d'être cité en référé devant le tribunal de Liège par John Numbi, chef de la police congolaise, mis en cause dans son film.

Capture d’écran 2012-09-26 à 22.01.07.pngLe cinéma documentaire est un sport de combat et le réalisateur Thierry Michel est particulièrement bien placé pour le savoir. Depuis la sortie de son film "L'affaire Chebeya, un crime d'Etat ?", Thierry Michel enchaîne les parcours d'obstacles. Son documentaire, particulièrement réussi, raconte la chronique du procès des assassins de Floribert Chebeya, un activiste des droits de l'homme éliminé par l'appareil sécuritaire congolais. En filigrane du film, est évoqué la responsabilité du chef de la police, John Numbi, un proche du président Joseph Kabila. Cité en témoin, John Numbi est pourtant absent du boxe des accusés, alors que toutes les pistes le désignent comme le commanditaire du meurtre. La thèse de Thierry Michel est partagée par l'ensemble les ONG congolaises et internationales sur le sujet : il s'agit bien d'un assassinat politique.

Promesse non tenue

C'est à la sortie du film que les ennuis commencent pour Thierry Michel. Le documentaire est d'abord interdit (sans surprise) par Kinshasa, ce qui ne l'empêche pas d'avoir une carrière clandestine en RDC. En juillet dernier, Thierry Michel se fait ensuite expulser du Congo, dès sa sortie d'avion. La ministre française, Yamina Benguigui, monte au créneau et promet que le cinéaste obtiendra son visa pour le Sommet de la Francophonie prévu les 12, 13 et 14 octobre prochain à Kinshasa. Yamina Benguigui tient même sa promesse du Premier ministre congolais lui-même. Rassuré, Thierry Michel dépose son passeport le 17 septembre, accompagné d'une lettre d'invitation à l'ambassade de RDC en Belgique. Le 20 septembre, la sentence tombe : visa refusé. Thierry Michel se demande donc s'il pourra participer, comme prévu, au XIVème Sommet de la Francophonie, fixé du 12 au 14 octobre prochain.

Témoin surprise

Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Juste après avoir été refoulé de l'aéroport de Kinshasa, le 8 juillet dernier, Thierry Michel relance l'affaire Chebeya avec un témoignage inédit. Le cinéaste recueille l'interview de Paul Mwilambwe, un policier qui dit avoir assisté à l'assassinat de Floribert Chebeya. Pour Paul Mwilambwe, le "donneur d'ordre" de l'assassinat s'appelle John Numbi. Celui-ci aurait promis 500.000 dollars au major Christian Ngoy en échange de l'élimination de Chebeya. Le témoignage de Mwilambwe, que nous avons pu lire, est circonstancié, précis et vérifiable. Thierry Michel s'étais dit prêt à "transmettre à la justice" l'entretien filmé avec le policier, aujourd'hui en fuite à l'étranger. Depuis, plus personne ne semble s'y intéresser.

Mauvaise publicité

Capture d’écran 2012-09-26 à 20.45.22.pngCeux-ci expliquant peut-être cela, le réalisateur de  "L'affaire Chebeya, un crime d'Etat ?",  vient d'être dernièrement cité en référé devant le Tribunal de 1ère instance de Liège, par le Général John Numbi, chef de la police congolaise au moment de l'assassinat de Chebeya. Motif : John Numbi souhaite faire interdire la diffusion de l'affiche du documentaire sur laquelle figure son image, à côté d'une photographie de la victime, Floribert Chebeya. Numbi réclame 5.000 euros d'amende au réalisateur Thierry Michel et sa productrice pour chaque affiche publiée.

Pour le  cinéaste, "il s'agit bien d'une atteinte au droit de la presse et à la liberté d'expression de la part du Général Numbi". Et de s'étonner : "John Numbi, lors de sa comparution devant la Cour militaire, a été photographié par les nombreux photographes présents. Ces photos ont été diffusées dans de nombreux médias nationaux et internationaux depuis plus de 16 mois déjà. A ce jour, sur Internet, John Numbi est cité 715.000 fois dans le cadre de l'assassinat et du procès Chebeya, et très souvent avec sa photo". Selon Thierry Michel, "l'affiche du film est publique depuis les avant premières organisées en novembre 2011 et janvier/février 2012 et le film est sorti dans les salles de cinéma en Belgique en mars 2012 et en France en avril 2012". L'audience en référé aura lieu mercredi 3 octobre au tribunal de Liège et le jugement sera prononcé le jour même.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Pour en savoir, plus vous pouvez consulter le site du film :  www.chebeya-lefilm.com

25 septembre 2012

RDC : Service minimum pour François Hollande à Kinshasa

Visite au pas de course pour le président français au Sommet de la Francophonie de Kinshasa le 13 octobre prochain. François Hollande devra rencontrer le président Joseph Kabila, puis les ONG et l'opposition politique en quelques heures, avant de prononcer un discours de 7 minutes au Sommet de la Francophonie. Expéditif, mais stratégique. Explications.

Image 2.pngLes multiples controverses autour de la venue du François Hollande à Kinshasa ont visiblement poussé l'Elysée à contourner les obstacles. Résultats des courses : le président français fera le service minimum au XIVème Sommet de la Francophonie, fixé du 12 au 14 octobre en République démocratique du Congo (RDC). L'opposition avait demandé la délocalisation du Sommet pour ne pas légitimer le régime de Joseph Kabila et cautionner les élections frauduleuses de novembre 2011. De nombreuses ONG dénonçaient également les violations des droits de l'homme, les assassinats, les arrestations arbitraires de membres de l'opposition. Un contexte plutôt embarrassant pour le président français.

François Hollande avait pourtant prévenu qu'il "réaffirmerai que la Francophonie n’est pas simplement une langue en partage mais aussi une communauté de principes et d’idéaux dont le rappel à chaque occasion est nécessaire". Le président français avait également voulu rassurer l'opposition en rappelant qu'il parlerait "de tout" lors de sa visite à Kinshasa.

Visiblement, c'est la stratégie de l'évitement qui a été choisie par l'Elysée. Selon le site de RFI, 1 heure et 30 minutes a été prévu pour rencontrer le président Kabila, les ONG et l'opposition politique, le tout agrémenté d'un discours de 7 minutes au Palais du peuple de Kinshasa.

Pour en arriver à ce programme minimum, l'Elysée a dû trouver une bonne excuse pour limiter la présence du président français en RDC. L'excuse, en l'occurrence, se nomme Dakar. Le 12 octobre François Hollande fera donc une halte rapide dans la capitale sénégalaise pour y rencontrer Macky Sall, le président fraîchement élu. Avantage de cette escale : les élections sénégalaises se sont déroulées démocratiquement, en toute transparence, à l'inverse des élections congolaises. Autre avantage, cela permettra au président français de prononcer "son" discours de Dakar sur sa vision de l'Afrique, en référence au discours de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, prononcé en 2007. Au final une seule petite journée a donc été prévue sur le sol congolais.

Plusieurs écueils attendaient le président français à Kinshasa. Le premier écueil concernait la visite en tête à tête avec Etienne Tshisekedi, le leader de l'opposition. Si l'UDPS affirme être en contact avec l'Elysée pour caler le rendez-vous, la visite expéditive de François Hollande risque fort de faire l'impasse sur une rencontre avec Tshisekedi. Deuxième écueil : la présence du Rwanda, accusé de soutenir les rebelles du M23, en guerre contre Kinshasa à l'Est du pays. On imaginait mal Paul Kagame et François Hollande sur la même tribune, alors que la autorités congolaises font le forcing sur Paris pour que le président français condamne fermement Kigali. Là encore, la visite express de François Hollande permet de se sortir de ce mauvais pas.

Un seul point d'interrogation sur cette visite express : la teneur des 7 minutes de discours au palais du peuple... autant dire que nous avons hâte.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

24 septembre 2012

RDC : Timide début de réforme pour la CENI

La réforme de la Commission électorale (CENI) de République démocratique du Congo avance à petits pas. Le gouvernement vient de proposer d'augmenter de 7 à 11 le nombre des membres de la Commission et réserve 2 sièges à la société civile. Le débat se poursuivra au Parlement où le sort du très controversé président de la CENI sera scellé.

CENI.png10 mois après les élections contestées de novembre 2011, la Commission électorale (CENI) se trouve toujours sous le feu des critiques de la communauté internationale et de l'ensemble de la classe politique congolaise . Même dans la majorité présidentielle, encore fidèle au président Kabila, on trouve peu de monde pour défendre l'organisation chaotique des dernières élections présidentielle et législatives.

Fiasco

Pour évaluer le travail de la Commission pendant le processus électoral, il suffit de lire le rapport final de la Mission d'observation de l'Union européenne (MOE-UE) pour comprendre l'étendu des dégâts. "Les résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ne sont pas crédibles à la lumière des nombreuses irrégularités et fraudes constatées", note les observateurs de l'Union européenne. La mission de l'UE dénonce les multiples dysfonctionnements du scrutin : "l'absence d'audit du fichier électoral, le manque de transparence lors du nettoyage de ce fichier, le vote sur simple présentation de la carte d'électeur de 3,2 millions d'électeurs, de multiples incidents, des fraudes et des bourrages d'urnes ou encore une publication des résultats caractérisée par un profond manque de transparence". L'Union européenne, tout comme la majorité des partis politiques congolais, demandent depuis lors "la restructuration de la CENI en y incluant la société civile" et souhaite un audit complet du fichier électoral.

Sous pression, les autorités congolaises viennent d'enclencher un timide début de réforme, en proposant plusieurs modifications de la CENI. Le gouvernement propose de faire passer le nombre des membres de la Commission de 7 à 11 et d'y inclure la société civile. 2 sièges seront donc réservés à la société civile, curieusement absente de la CENI pour les élections de 2011. Le poids de l'opposition sera également renforcé "au prorata de la configuration politique de l'Assemblée nationale". Après les propositions du gouvernement, ce sera à l'Assemblée nationale et au Sénat que reviendra la lourde tâche de présenter un projet de loi définitif.

Un projet de réforme existe déjà

A l'Assemblée nationale, un député d'opposition du Kasaï oriental, Emery Okundji, a déposé, depuis le 5 juin, une proposition de réforme plus complète. Emery Okundji propose une CENI "plus représentative". La nouvelle Commission électorale passerait de 7 à 22 membres (et non 11 comme le souhaite le gouvernement), avec une égalité entre majorité et opposition (ce qui n'est pas le cas actuellement) et verrait le retour de la société civile, écartée de l'institution depuis 2010.

La proposition de loi souhaite également une CENI "plus redevable". Les partis politiques, la société civile et les bailleurs de fonds doivent être en mesure de superviser son travail. Les instances de la Commission seront élargies avec un bureau, une assemblée plénière et des commissions techniques (contre un simple bureau aujourd'hui).

Dernière amélioration de la proposition de loi : la lutte contre la corruption. La CENI devra respecter la loi sur les marchés publics et le patrimoine exhaustif de ses membres sera publié devant l'Assemblée nationale. La Cour des comptes devra enfin rendre son audit 6 mois après le dépôt du rapport général de la Commission.

Le cas Mulunda

Pour de nombreux observateurs de la politique congolaise, ces propositions présentent une "base de discussion intéressante", mais doivent être complétées "par un meilleur contrôle financier" et par "une réforme de la Cour suprême de justice" qui a montré ses lacunes lors du contentieux électoral de novembre 2011. Autre souci : le calendrier électoral des scrutins locaux qui n'est toujours pas fixé, demeure très flou et sans financement. Enfin, problème majeur à régler par le Parlement : le sort du très contesté président de la CENI, Daniel Ngoy Mulunda. Pour l'opposition, ce proche du président Kabila doit faire les frais du fiasco électoral de novembre et être débarqué. L'éviction du président de la CENI constitue également un des "gages" souhaité par Paris pour la participation de François Hollande au Sommet de la Francophonie, le 12 octobre prochain à Kinshasa. On voit donc mal comment Daniel Ngoy Mulunda pourrait se maintenir à la tête de la CENI. Mais pour l'instant le président Kabila semble hésiter à le lâcher.

Ces modifications du gouvernement, "a minima", sur le fonctionnement de la CENI sont donc loin de répondre à toutes les attentes de la classe politique congolaise et de la Communauté internationale. Seul le Parlement pourra y apporter les correctifs nécessaires et redonner un peu de légitimité à cette institution.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia

Rectificatif : Pas de censure de TV5 Monde sur la Francophonie

logo afkrb.pngNous avons relayé jeudi dernier l'inquiétude de l'association "Convergence pour l'émergence du Congo" qui avait noté la "disparition" d'une dépêche AFP du site internet de TV5 Monde. La dépêche AFP concernait "la demande de délocalisation du Sommet de la Francophonie". Après quelques jours, la dépêche disparaissait et le lien n'était plus accessible. L'association se demandait si TV5 Monde n'avait pas censuré cette information "très sensible" à quelques semaines du rendez-vous de Kinshasa. Après avoir attendu en vain les explications du service "interactivité" de la chaîne, la réponse nous est finalement parvenu ce lundi du service relations presse.

TV5 Monde nous a expliqué que le "fil d'informations de l'AFP n'était pas archivé" et que les dépêches les plus récentes "chassaient" les plus anciennes. Il n'y avait donc rien d'anormal, selon la chaîne à ce que cette information disparaisse du site après quelques jours de visibilité. TV5 Monde nous a assuré qu'il n'y avait "aucune censure" de leur part concernant le Sommet de la Francophonie de Kinshasa. Dont acte. Toutes nos excuses à TV5 Monde ainsi qu'à nos lecteurs.

Christophe RIGAUD - Afrikarabia