24 septembre 2012
RDC : Timide début de réforme pour la CENI
La réforme de la Commission électorale (CENI) de République démocratique du Congo avance à petits pas. Le gouvernement vient de proposer d'augmenter de 7 à 11 le nombre des membres de la Commission et réserve 2 sièges à la société civile. Le débat se poursuivra au Parlement où le sort du très controversé président de la CENI sera scellé.
10 mois après les élections contestées de novembre 2011, la Commission électorale (CENI) se trouve toujours sous le feu des critiques de la communauté internationale et de l'ensemble de la classe politique congolaise . Même dans la majorité présidentielle, encore fidèle au président Kabila, on trouve peu de monde pour défendre l'organisation chaotique des dernières élections présidentielle et législatives.
Fiasco
Pour évaluer le travail de la Commission pendant le processus électoral, il suffit de lire le rapport final de la Mission d'observation de l'Union européenne (MOE-UE) pour comprendre l'étendu des dégâts. "Les résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ne sont pas crédibles à la lumière des nombreuses irrégularités et fraudes constatées", note les observateurs de l'Union européenne. La mission de l'UE dénonce les multiples dysfonctionnements du scrutin : "l'absence d'audit du fichier électoral, le manque de transparence lors du nettoyage de ce fichier, le vote sur simple présentation de la carte d'électeur de 3,2 millions d'électeurs, de multiples incidents, des fraudes et des bourrages d'urnes ou encore une publication des résultats caractérisée par un profond manque de transparence". L'Union européenne, tout comme la majorité des partis politiques congolais, demandent depuis lors "la restructuration de la CENI en y incluant la société civile" et souhaite un audit complet du fichier électoral.
Sous pression, les autorités congolaises viennent d'enclencher un timide début de réforme, en proposant plusieurs modifications de la CENI. Le gouvernement propose de faire passer le nombre des membres de la Commission de 7 à 11 et d'y inclure la société civile. 2 sièges seront donc réservés à la société civile, curieusement absente de la CENI pour les élections de 2011. Le poids de l'opposition sera également renforcé "au prorata de la configuration politique de l'Assemblée nationale". Après les propositions du gouvernement, ce sera à l'Assemblée nationale et au Sénat que reviendra la lourde tâche de présenter un projet de loi définitif.
Un projet de réforme existe déjà
A l'Assemblée nationale, un député d'opposition du Kasaï oriental, Emery Okundji, a déposé, depuis le 5 juin, une proposition de réforme plus complète. Emery Okundji propose une CENI "plus représentative". La nouvelle Commission électorale passerait de 7 à 22 membres (et non 11 comme le souhaite le gouvernement), avec une égalité entre majorité et opposition (ce qui n'est pas le cas actuellement) et verrait le retour de la société civile, écartée de l'institution depuis 2010.
La proposition de loi souhaite également une CENI "plus redevable". Les partis politiques, la société civile et les bailleurs de fonds doivent être en mesure de superviser son travail. Les instances de la Commission seront élargies avec un bureau, une assemblée plénière et des commissions techniques (contre un simple bureau aujourd'hui).
Dernière amélioration de la proposition de loi : la lutte contre la corruption. La CENI devra respecter la loi sur les marchés publics et le patrimoine exhaustif de ses membres sera publié devant l'Assemblée nationale. La Cour des comptes devra enfin rendre son audit 6 mois après le dépôt du rapport général de la Commission.
Le cas Mulunda
Pour de nombreux observateurs de la politique congolaise, ces propositions présentent une "base de discussion intéressante", mais doivent être complétées "par un meilleur contrôle financier" et par "une réforme de la Cour suprême de justice" qui a montré ses lacunes lors du contentieux électoral de novembre 2011. Autre souci : le calendrier électoral des scrutins locaux qui n'est toujours pas fixé, demeure très flou et sans financement. Enfin, problème majeur à régler par le Parlement : le sort du très contesté président de la CENI, Daniel Ngoy Mulunda. Pour l'opposition, ce proche du président Kabila doit faire les frais du fiasco électoral de novembre et être débarqué. L'éviction du président de la CENI constitue également un des "gages" souhaité par Paris pour la participation de François Hollande au Sommet de la Francophonie, le 12 octobre prochain à Kinshasa. On voit donc mal comment Daniel Ngoy Mulunda pourrait se maintenir à la tête de la CENI. Mais pour l'instant le président Kabila semble hésiter à le lâcher.
Ces modifications du gouvernement, "a minima", sur le fonctionnement de la CENI sont donc loin de répondre à toutes les attentes de la classe politique congolaise et de la Communauté internationale. Seul le Parlement pourra y apporter les correctifs nécessaires et redonner un peu de légitimité à cette institution.
Christophe RIGAUD - Afrikarabia
20:43 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Les élections n'ont de sens que pour les citadins ou habitants des centres extra-coutumiers. Le monde rural et traditionnel n'en a cure et ce monde représente encore plus de la moitié du Congo.
Écrit par : anneet | 23 septembre 2012
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