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29 juillet 2012

RDC : L'UDPS dénonce l'arrestation de son secrétaire général adjoint

Le principal parti d'opposition de République démocratique du Congo (RDC), l'UDPS, accuse la police d'avoir enlevé Jean-Marie Vianney Kabukanyi. Le secrétaire général adjoint du parti d'Etienne Tshisekedi aurait été interpellé samedi 28 juillet 2012 à son domicile et emmené "vers une destination inconnue". Jean-Marie Vianney Kabukanyi avait conduit le 25 juillet la délégation de l'UDPS à l'ambassade de France pour demander la "délocalisation"  du XIVème sommet de la Francophonie prévu à Kinshasa à l'automne.

Logo UDPS 2.pngDans un communiqué, l'UDPS, le parti de l'opposant Etienne Tshisekedi dénonce l'arrestation de son secrétaire général adjoint, Jean-Marie Vianney Kabukanyi samedi 18 juillet par la police congolaise. Le cadre de l'UDPS aurait été arrêté "vers 23h45 à son domicile en compagnie de son jeune frère". Le parti d'opposition affirme que Jean-Marie Vianney Kabukanyi et son frère "ont été emmenés vers une destination inconnue" et dénonce "une arrestation arbitraire".

Jean-Marie Vianney Kabukanyi, chargé des questions administratives à l'UDPS avait conduit la délégation de son parti à l'ambassade de France à Kinshasa pour demander la "délocalisation" du XIVème sommet de la Francophonie prévu à Kinshasa en octobre 2012. Une pétition avait été déposée pour la venue en RDC de la ministre française chargée de la Francophonie, Yamina Benguigui. La ministre avait confirmé la tenue du sommet dans la capitale congolaise sans confirmer la présence du chef d’Etat français, François Hollande. L'opposition, qui conteste la réélection du président Joseph Kabila lors des élections de novembre dernier, demande à François Hollande de ne pas venir "légitimer des élections frauduleuses".

Cette interpellation intervient également 1 mois après la "disparition" d'un autre opposant congolais, Eugène Diomi Ndongala, le président de la Démocratie chrétienne (DC). Accusé de viol sur mineures par la police, ses proches affirment qu'il a été enlevé par des hommes armés, alors que les autorités congolaises le considèrent en cavale. Son parti dénonce une "cabale" politique (…) "pour le faire taire définitivement".

Christophe RIGAUD

28 juillet 2012

RDC : Kinshasa prêt à négocier avec le M23 ?

Plusieurs informations indiquent que les autorités congolaises chercheraient à amorcer un processus de négociation avec les rebelles du M23. Pour l'instant Kinshasa dément toujours vouloir négocier avec les rebelles. Décryptage.

Afrikarabia logo.pngAprès plus de 3 mois de violents combats entre la rébellion du M23 et l'armée régulière de République démocratique du Congo (RDC), différents signes annoncent un certain fléchissement des autorités congolaises, jusque là fermées à toutes négociation avec les rebelles.

Premier signe : la dégradation de la situation militaire sur le terrain. Le M23 a repris toutes ses positions qu'il occupait le 9 juillet : Rutshuru, Kalengera, Kiwanja, Rumwangabo et depuis le 28 juillet, les rebelles sont à 1 km de Kibumba. Le M23, qui se trouve désormais à 30 km au Nord de Goma et ne laisse guère planer de doute sur sa volonté de progresser vers la capitale provinciale dans les prochains jours, si Kinshasa ne négocie pas.

Deuxième signe : selon l'AFP à Goma, des responsables du renseignement congolais seraientt dans la capitale du Nord-Kivu aux côtés de Julien Paluku (le gouverneur de la province) pour rencontrer James Kabarebe, le ministre de la défense rwandais. Une rencontre qui interviendrait après le tête à tête Kagame-Kabila d'Addis-Abeba au sujet de la création d'une "force neutre" dans la région.

Troisième signe : Sur Twitter, la correspondante allemande du Tageszeitung, Simone Schlindwein, affirme que Kinshasa chercherait un facilitateur pour négocier avec le M23, mais "rien d'officiel" précise-t-elle. Et dernier signe : Jason Stearn du site Congo Siasa annonce une conférence de presse de Joseph Kabila dimanche 29 juillet au matin. Vu la rareté des apparitions publiques du président congolais, il semblerait donc que les événements s'accélèreraient à Kinshasa au sujet du Nord-Kivu. Pour l'instant, rien de tout cela n'est évidemment confirmé et les autorités congolaises affirment toujours ne pas vouloir négocier avec le M23, qualifié de groupe terroriste.

Christophe RIGAUD

24 juillet 2012

RDC : «Kabila est le seul obstacle à la paix » selon le général Munene

Le retour de la guerre dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC) fragilise une fois de plus le régime de Kinshasa. Pour Faustin Munene, entré en dissidence contre Joseph Kabila depuis 2010, le président congolais est le principal responsable du regain de violence au Nord-Kivu. Le président de l'Armée de résistance populaire (ARP) confirme également dans cette interview accordée à Afrikarabia, les alliances qui se nouent actuellement sur le terrain entre les différents groupes armés à l'Est du pays.

Munene filtre 3.jpg- Afrikarabia : Faustin Munene, depuis 3 mois le Nord-Kivu est le théâtre de violents affrontements entre la rébellion du M23 et l’armée congolaise, comment analysez-vous la situation ?

- Faustin Munene :  Pourquoi la situation s’est dégradée dans ce secteur ? C’est là qu’a lieu le pillage organisé de nos richesses, c’est là que les populations connaissent le pire de ce qu’a connu l’humanité depuis la seconde guerre mondiale, tout cela cautionné par le gouvernement congolais. C’est dans cette régions que l’on risque de connaître le pire, c’est à dire la balkanisation de notre pays. Et c’est donc dans cette zone que s’organise une forte résistance contre un gouvernement illégal et illégitime. La seule personne qui est responsable de cette explosion à l’Est s’appelle Joseph Kabila. Plusieurs raisons à cela : sa mauvaise gouvernance et la mise en place d’un régime dictatorial sans justice sociale. C’est un régime où toutes les institutions sont prises en otages. Il engage la République dans des accords secrets (avec le Rwanda, ndlr), il prend ses décisions seul, personne ne sait ce qu’il fait. Le conflit à l’Est ne s’explique pas par les « forces négatives » (FDLR, Maï-Maï et maintenant M23, selon Kinshasa, ndlr). Ce terme est un concept erroné qui n’est pas acceptable juridiquement. Dans ce conflit, nous avons d’un côté, un gouvernement illégitime, avec l’armée congolaise, la police nationale, les services de renseignement et des mercenaires engagés à partir des pays des Grands lacs, et de l’autre côté vous avez le peuple qui n’a d’autre moyen que l’auto-défense et la résistance. Lorsque l’on dit « forces négatives », il s’agit donc d’une mascarade pour en faire ce que l’on veut.

- Afrikarabia : Que pensez-vous du projet d’envoi d’une « force internationale neutre » dans la région pour stabiliser la frontière entre la RDC et le Rwanda ? C’est une solution selon vous ?

- Faustin Munene : C’est une violation très grave du droit. Cette décision a été prise seule, en ignorant le peuple d’abord et la Constitution ensuite. Kinshasa est seulement en quête de légitimité internationale (après les élections contestées de novembre 2011, ndlr) et l’Union africaine a été prise en otage. Sur le plan technique, nous avons déjà une force internationale qui s’appelle la Monusco (mission des Nations unies en RDC, ndlr) forte de 18.000 hommes. Pour moi, la « force neutre » est simplement destinée à mettre notre pays sous tutelle.  Je voudrais adresser un message à l'Union africain : il faut une solution plus durable et un cadre juridique. Il faudrait aussi y inclure la résistance, nous avons des propositions à faire.

- Afrikarabia : Est-ce que votre mouvement, l’Armée de résistance populaire (ARP), est déjà engagée sur le terrain et mène des actions ?

- Faustin Munene : A l’Est, la population s’est dressée comme un seul homme contre le régime. L’auto-défense est un des principes de la résistance. L’auto-défense est d’ailleurs autorisée par l’article 63 et 64 de la Constitution. Dans notre cas, il s’agit de légitime défense. Nous nous battons contre ce génocide qui a eu lieu à cause de notre hospitalité pour avoir reçu des réfugiés rwandais (après le génocide de 1994, ndlr). Nous payons le prix fort. Et maintenant les Congolais ne veulent plus de Kabila. Joseph Kabila est le seul obstacle à la paix. La résistance est présente sur le terrain, dans toutes ces formes. Il ne faut pas oublier que le M23, c’est l’ancien CNDP, qui compose une partie des FARDC (l’armée régulière congolaise, ndlr). Le CNDP s’est rallié au PPRD, (le parti majoritaire de Joseph Kabila, ndlr). Nkunda, Ntaganda et les autres… ont été promus aux grades d'officiers supérieurs par le président Kabila lui-même. Le CNDP constitue donc pour moi une composante du gouvernement. Les gens du M23 ont compris cela et ont tourné casaque. Ils intègrent donc le camp que nous appelons celui de la résistance. En ce qui nous concerne, la résistance n’a pas de couleur.

- Afrikarabia : Est-ce que cela veut dire que l’ARP est présente sur le terrain à l’Est, à Walikale par exemple et dans d’autres endroits ?

- Faustin Munene : Oui, nous  sommes présents depuis longtemps, avant même le M23, juste après ce que l’on appelle le « hold-up électoral » de Joseph Kabila. Nous avons alors pris la décision ferme de défendre notre territoire. Dès le mois de janvier 2012, nous nous sommes positionnés auprès de nos populations pour l’auto-défense. Nous sommes présents dans 4 provinces : Province orientale, Nord-Kivu, Sud-Kivu et Nord-Katanga.

- Afrikarabia : Qui sont les alliés de l'ARP sur le terrain ?

- Faustin Munene : La résistance comme principe de légitime défense engage l'ensemble des résistants, de l'intérieur et de l'extérieur. Il n'y a pas d'alliance, tout le monde qui prend position contre ce régime fait partie de cette résistance. Tous les moyens sont bons pour que Kabila parte. Nous ne faisons aucune discrimination.

- Afrikarabia : Cela veut dire que vous pouvez vous allier au Nord-Kivu au groupe Maï-Maï Raïa Mutomboki par exemple ?

- Faustin Munene : Tout ceux que vous citez font partis de ce que nous appelons les forces de résistances. Je le répète, le terme de « forces négatives » est très méprisant et cache la vérité des choses. L'ARP, sur le terrain, est représentée par tous ces groupes d'auto-défense. Le terme Maï-Maï est très mal utilisé. Pour moi, les Maï-Maï sont tout simplement des résistants qui refusent la terreur, les pillages et tout ce que l'on connaît de mal. Maï-Maï, c'est un état d'esprit, nous n'avons pas de tribu qui s'appelle Maï-Maï.

- Afrikarabia : Quels sont les alliés politiques de l'ARP ?

- Faustin Munene : Nous faisons partis de la grande famille de l'opposition. Nos alliés sont tout ceux combattent le régime de Joseph Kabila. Tous les partis politiques d'opposition sont nos alliés naturels.

- Afrikarabia : Pouvez-vous nous dire où vous êtes actuellement et dans quelles conditions vous vivez ?

- Faustin Munene : J'ai échappé à maintes reprises à des tentatives d'assassinat. J'ai donc traversé chez nos voisins (au Congo-Brazzaville, ndlr). On m'a condamné par contumace en RDC, on a même arrêté des gens qui ont travaillé avec moi il y a plus de 10 ans. Beaucoup de mes collaborateurs ont perdu la vie. Je devais être liquidé avant le chef de l'Etat (Laurent-Désiré Kabila a été assassiné le 16 janvier 2001). J'ai donc trouvé protection auprès du gouvernement du Congo-Brazzaville.
Mais vous savez, j'ai participé au coeur du pouvoir, pendant la guerre contre régime de Mobutu, j'étais aux côtés du président assassiné, Laurent-Désiré Kabila et je connais tellement bien Joseph Kabila... peut-être mieux que tout le monde. Le président Sassou (président du Congo-Brazzaville, ndlr), en  grand sage, n'a pas accepté la demande d'extradition de la RDC.

- Afrikarabia : Cela veut dire que vous êtes libre de vos mouvements au Congo-Brazzaville ?

- Faustin Munene : Ici je suis protégé car l'ennemi est partout. L'ennemi me cherche à la loupe. Tous les services de Joseph Kabila cherchent à m'assassiner, je suis donc protégé ici.

Propos recueillis par Christophe RIGAUD

Photo : Faustin Munene © DR

23 juillet 2012

RDC : "Force neutre", la fausse bonne idée

Il y a une semaine, le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC) ont signé un accord de principe pour mettre en place une force internationale "neutre" le long de leur frontière pour combattre les attaques rebelles du M23 et des FDLR. L'arrivée d'une nouvelle armée dans la région risquerait de figer le conflit, là où les Nations unies ont déjà échoué depuis 10 ans avec la Monusco… une initiative, qui a tout de la "fausse bonne idée".

IMG_3552.jpgLa Conférence internationale sur la région des grands lacs (CIRGL) veut mettre sur pied une force internationale le long de la frontière entre le Rwanda et la RDC pour lutter contre les rebelles du M23 et des FDLR. Depuis le mois de mai, la République démocratique du Congo (RDC) est en effet confrontée à une nouvelle rébellion, le M23, dans l'Est du pays où sévissent déjà de nombreux autres groupes armés, comme les FDLR. Le Rwanda est accusé par un rapport de l'ONU de soutenir et de financer la rébellion, ce que dément formellement Kigali.

L'idée d'une "force neutre" afin de contrôler la frontière entre le Congo et le Rwanda, est née à Addis-Abeba, en marge d'un sommet de l'Union africaine (UA), il y a maintenant une semaine. Les contours de cette force militaire sont encore mal définis. Quel Pays ? pour quelle mission et quel commandement ? Des réponses plus précises seront peut-être apportées le 8 août prochain lors d'une prochaine rencontre. Pour être synthétique, il n' y a qu'un seul point positif à cette initiative :  forcer un semblant de "dialogue" entre Kinshasa et Kigali dans un cadre multilatérale… et africain. La tension est en effet montée d'un cran entre les deux voisins depuis les révélations du rapport de l'ONU sur l'implication du Rwanda dans l'aide aux rebelles duM 23. Une rencontre au sommet entre présidents et ministres concernés est donc plutôt la bienvenue dans ce contexte. Mais les avantages s'arrêtent là.

Pour le reste, il n'y a que des inconvénients. Tout d'abord, la "force neutre" affaiblirait considérablement la mission de l'ONU sur le terrain (la Monusco compte déjà 17.000 casques bleus). Depuis plus de 10 ans, la Monusco fait déjà office de force internationale "neutre" en RDC… sans succès. Pourquoi en rajouter une, là où la plus importante mission de l'ONU au monde a déjà échoué ? Pourquoi créer une Monusco bis ?

Ensuite, la "force neutre" apparaîtrait comme une armée de plus dans un conflit déjà "sur-militarisé", alors que sur place, l'armée congolaise et la Monusco peinent à stabiliser la zone. De nouveaux militaires dans la région risqueraient au contraire de maintenir l'Etat de guerre quasi permanent qui règne à l'Est de la RDC depuis plus de 15 ans. C'est d'ailleurs ce que cherchent peut-être les deux principaux intéressés, la RDC et le Rwanda. En conservant la zone sous tension militaire, le Rwanda peut continuer à contrôler les richesses minières des Kivus et faire la pluie et le beau temps sur la région. Quant à Kinshasa, la guerre à l'Est, lui permet de brandir l'étendard de la "patrie en danger" et de "l'unité nationale" afin de légitimer son pouvoir, écorné par les fraudes des dernières élections.

En guise de conclusion, c'est un sondage du site internet de Radio Okapi qui résume le mieux ce qu'il faut penser de l'envoi d'une "force internationale neutre" à la frontière entre le Rwanda et la RDC. Pour 51% des internautes, cette force internationale "ne pourra être efficace que si les Etats s’engagent sincèrement à ne pas soutenir les groupes armés" et 43% répond de manière plus pragmatique, "qu'elle ne verra jamais le jour" ! Pendant ce temps, les rebelles du M23 maintiennent la pression militaire autour des villes de Rutshuru et Goma et occupent toujours la ville frontière de Bunagana… sous le regard impuissant des casques bleus.

Christophe RIGAUD

Photo : Casque bleu à Kinshasa © Ch. Rigaud www.afrikarabia.com