02 mars 2012
RDC : L'ambassadeur de l'UE accrédité par Kinshasa
Le président de la République démocratique du Congo (RDC) a reçu ce vendredi les lettres de créances de 4 ambassadeurs nouvellement accrédités par Kinshasa. L'Union européenne sera désormais représentée par Jean-Michel Dumond. Le délicat financement des prochaines élections locales sera sans doute au coeur des prochains dossiers traités par l'Union européenne.Ce vendredi, au Palais de la Nation de Kinshasa, Joseph Kabila a reçu, comme de coutume, les lettres de créances de 4 ambassadeurs représentants l'Iran, la Côte d'Ivoire, la Zambie et l'Union européenne (UE).
Jean-Michel Dumond sera le nouvel ambassadeur de l'UE en RDC. A 59 ans, ce diplômé de l’Institut d’études politiques détient une maîtrise en droit public. Il était auparavant ambassadeur au Nigéria.
Après des élections présidentielle et législatives très contestées et la réélection "embarrassante" de Joseph Kabila, les missions internationales présentes pendant le scrutin (dont celle de l'UE) ont toutes dénoncé les nombreuses irrégularités de ces élections aussi que les soupçons de fraudes massives. Une situation délicate pour la communauté internationale qui hésite entre la condamnation du processus électoral et la reconnaissance forcée de la réélection du président Kabila. Depuis, quelques semaines la communauté internationale s'oriente vers un statu quo, doublé d'une normalisation avec Kinshasa, en espérant que les prochains scrutins soient réalisés dans de meilleures conditions.
Dossier le plus épineux à venir : le financement de la suite du processus électoral par l'Union européenne(provinciales et sénatoriales). Une polémique, vite éteinte par Kinshasa, avait été lancée par le Ministre de la Communication congolais, Lambert Mende, sur l'incertitude de la tenue des élections provinciales. Kinshasa affirmait que "faute de moyens", la RDC ne pourrait pas organiser le scrutin "sans l'aide (rapide) de ses partenaires". La RDC se targuait également d'avoir financé quasiment "seule" les élections chaotiques de novembre... ce qui provoqua le tollé des différentes organisations internationales partenaires du processus électoral. L'Union européenne a précisé qu'elle avait déjà financé le processus de novembre à hauteur de 35 millions d'euros. La question est donc de savoir si l'Union va remettre la main à la poche pour les nouvelles élections à venir, alors que les dernières ont été, selon la majorité des observateurs, un "fiasco" en matière d'organisation, avec un manque total de crédibilité des résultats. Pour l'heure, aucune date n'a été avancée par Kinshasa pour l'organisation des prochaines élections provinciales, prévues en mars et des sénatoriales, prévues en juillet 2012... l'incertitude plane.
Christophe RIGAUD
18:28 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (4)
29 février 2012
Procès Lubanga : "Un moment décisif pour la justice internationale" selon HRW
Le 14 mars prochain, la Cour pénale internationale (CPI) doit rendre son premier verdict dans l’affaire du chef rebelle congolais Thomas Lubanga. Une décision très attendue par de nombreuses ONG, à l'image d'Human Rights Watch (HWR) qui considère ce verdict comme "un moment crucial pour la justice internationale". Un procès qui a permis d'attirer "une attention considérable sur le problème des enfants soldats".A moins de deux semaines du verdict de la CPI sur l'affaire Thomas Lubanga, Human Rights Watch (HWR) estime dans un communiqué, que "les leaders de pays et de groupes rebelles devraient prendre bonne note que les crimes commis aujourd’hui peuvent les amener demain sur le banc des accusés", note Géraldine Mattioli-Zeltner, directrice de plaidoyer pour la justice internationale.
HRW rappelle le parcours de Thomas Lubanga, "un dirigeant de l’Union des Patriotes Congolais (UPC), un groupe armé rebelle disant agir au nom de la population appartenant à l’ethnie Hema en Ituri, en République démocratique du Congo (RDC)". Cette rébellion a été impliquée dans de nombreuses atteintes aux droits de l'homme, "notamment des massacres perpétrés contre d’autres groupes ethniques, des exécutions sommaires, des actes de torture, des viols, l’utilisation d’enfants soldats et des pillages". Thomas Lubanga a été mis en accusation devant la CPI pour "les crimes de guerre de recrutement, enrôlement et utilisation active d’enfants âgés de moins de 15 ans dans des hostilités en 2002 et 2003". Transféré en mars 2006 à la CPI, le procès de Lubanga a commencé en janvier 2009.
HWR pointe ensuite "les leçons à tirer" par la CPI du procès Lubanga et notamment à propos du "statut du coaccusé de Lubanga dans cette affaire, Bosco Ntaganda". Cet autre rebelle congolais est recherché par la Cour, mais toujours protégé par Kinshasa où il exerce de prestigieuses fonctions dans l'armée congolaise.
Pour Human Rights Watch, "le procès Lubanga a ouvert de nouveaux horizons en tant que premier procès à la CPI et a attiré une attention considérable sur le problème des enfants soldats, non seulement en RDC mais aussi de par le monde", remarque Géraldine Mattioli-Zeltner. "Il est crucial pour la Cour de tirer les leçons du procès afin d’améliorer la façon dont elle rend la justice. Les victimes d’atrocités ne méritent rien de moins".
Christophe RIGAUD
Le site de Human Rights Watch propose un dossier complet sur l'affaire Lubanga accessible ici.
21:19 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (0)
RDC : Thomas Lubanga fixé sur son sort le 14 mars
La Cour pénale internationale de La Haye (CPI) rendra son verdict sur l'affaire Thomas Lubanga le 14 mars 2012 dans la matinée. Thomas Lubanga est accusé de crimes de guerre et d'enrôlement d'enfants soldats en République démocratique du Congo (RDC) entre 2002 et 2003. Débuté en 2009, 3 ans après son arrestation, le procès de Thomas Lubanga doit prendre fin le 14 mars prochain, après 204 jours d'audience. Thomas Lubanga est accusé "d’avoir commis, en tant que coauteur, des crimes de guerre consistant à procéder à l’enrôlement et à la conscription d’enfants âgés de moins de 15 ans dans les rangs des Forces patriotiques pour la libération du Congo (les FPLC) et à les faire participer activement à des hostilités en Ituri, un district de la province Orientale de la RDC, entre septembre 2002 et août 2003". Il avait été remis et transféré à la Cour le 17 mars 2006.
La CPI note que "conformément au Statut de Rome, pour condamner l'accusé, la Chambre doit être convaincue de sa culpabilité au-delà de tout doute raisonnable. En cas de verdict de culpabilité, la Chambre fixera, par la suite, la peine à appliquer."
Jusqu’à présent, 14 affaires sont en cours devant la CPI, dont quatre en phase de procès. Sept enquêtes ont été ouvertes dans le contexte des situations en Uganda, République démocratique du Congo, République centrafricaine, Darfour (Soudan), Kenya, Libye et en Côte d’Ivoire. Le procès d'un autre congolais, Jean-pierre Bemba doit reprendre prochainement.
Christophe RIGAUD
17:52 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (3)
RDC : Inquiétudes autour du boycott de l'Assemblée par l'UDPS
Après les élections contestées de novembre 2011 en République démocratique du Congo (RDC), l'UDPS, principal parti d'opposition, prône toujours le boycott de l'Assemblée nationale par ses députés. L’Association Africaine de défense des Droits de l’Homme (ASADHO) se déclare "très préoccupée" par une telle attitude et demande à l'opposition de "prendre part aux travaux de l'Assemblée nationale". Si la direction de 'UDPS paraît inflexible sur la stratégie du boycott, la société civile est plus partagée.Boycotter l'Assemblée ou pas ? Tel est le dilemme de l'UDPS d'Etienne Tshisekedi. Deux thèses s'affrontent au sein de l'exécutif du parti : ne pas siéger dans une Assemblée dont on conteste l'élection ou au contraire, siéger pour faire entendre sa voix. Pour le conseiller politique d'Etienne Tshisekedi, Valentin Mubake, le choix est pourtant clair : "il est inconcevable qu’un membre du parti accepte de siéger dans une institution issue des législatives dont les résultats ont été déclarés nuls par sa propre formation politique". Valentin Mubake va même plus loin en promettant l'exclusion du parti aux contrevenants. Ce qui sera fait pour Timothée Kombo, doyen de l'Assemblée et "élu", à ce titre, président du bureau provisoire... les autres députés de l'UDPS sont maintenant prévenus.
"Le boycott n'a jamais payé"
Mais au sein du parti de Tshisekedi, des voix s'élèvent pour dénoncer un boycott "inutile" qui priverait l'opposition d'une tribune publique à l'Assemblée, comme le pense José Nzau Vola, qui prône le "dialogue interne". Certains observateurs proche de l'opposition prédisent même la "mort" à moyen terme de l'UDPS ou, au moins, sont implosion. Il est vrai qu'à chaque fois que l'UDPS a décidé de boycotter sa participation aux institutions ou aux élections (dans les années 1990 puis en 2006), le parti s'est morcelé et s'est considérablement affaibli. Des dissidences sont nées et l'UDPS a ensuite raté tous ses grands rendez-vous électoraux. Certains membres du parti affirment avoir "tirés" les leçons du passé et souhaitent bien participer aux débats de l'Assemblée nationale... "au moins pour être entendus". Et de conclure : "de toute façon, le boycott n'a jamais payé".
Aujourd'hui, l’Association Africaine de défense des Droits de l’Homme (ASADHO) apporte sa contribution au débat en se disant "très préoccupée par la non participation de certains partis politiques de l’opposition aux institutions politiques qui sont entrain d’être mises en place". Car, si l’ASADHO reconnait "que les élections de novembre 2011 n’ont été ni apaisées, ni transparentes ni démocratiques" et qu'elles ont été organisées "dans un climat généralisé de fraude, de corruption et de méfiance totale,", l'ONG pense que "la construction progressive de la démocratie appelle tous les partis politiques de l’opposition qui ont des députés nationaux à prendre part active aux institutions politiques, particulièrement aux travaux de l’Assemblée Nationale".
"Avoir le contrôle sur les institutions"
Pour cette association, la tribune de l'Assemblée nationale "reste un excellent endroit où les partis politiques de l’opposition peuvent soumettre aux débats publics toutes les questions qui concernent la marche de la nation et la situation des droits de l’Homme". L'ONG se justifie en expliquant qu'en dehors de cette "tribune" institutionnelle : "les partis politiques de l’opposition et les organisations de la société civile ont des difficultés pour organiser des manifestations pacifiques, les médias publics sont confisqués par la majorité politique au pouvoir, les médias proches de l’opposition sont illégalement suspendus ou privés du signal, les membres de l’opposition sont souvent arrêtés et détenus arbitrairement..."
Pour l'ASADHO, "la participation de tous les députés nationaux de l’opposition à l’Assemblée Nationale leur permettra également de prendre part au contrôle des autres institutions telles que le Gouvernement national et la Commission Electorale Nationale Indépendante"... une série d'arguments que l'ONG congolaise souhaite vivement voir prendre en compte par la direction de l'UDPS. Aux dernières nouvelles, les partisans du boycott auraient mis "un peu d'eau dans leur vin", notamment au sujet de l'exclusion de Timothée Kombo, dont le dossier pourrait être "réétudié"... peut-être un premier pas.
Christophe RIGAUD
15:06 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (8)
27 février 2012
RDC : Législatives sans "crédibilité" pour le Centre Carter
Sans surprise, le Centre Carter a renouvelé ses critiques envers le processus électoral de novembre dernier en République démocratique du Congo (RDC). Comme pour la présidentielle, l'ONG américaine estime que les résultats des élections législatives "manquent de crédibilité" et "sèment le doute" pour "la majorité" les Congolais. Le Centre Carter demande un réexamen approfondi des résultats, ce que n'a pas encore fait la Commission électorale congolaise(CENI).Dans un rapport publié la semaine dernière, le Centre Carter, présent avant , pendant et après le scrutin de novembre 2011, égrène une longue liste d'irrégularités, de dysfonctionnements, d'anomalies et de lourds soupçons de fraudes, lors des élections présidentielle et législatives en RDC. Une liste impressionnante qui conduit le Centre Carter à estimer que les résultats publiés par la Commission électorale (CENI) "manquent de crédibilité".
L'ONG américaine, spécialiste des situations "post-conflit" et hors de tout soupçon de partialité, dénonce "la perte de plus de 3.500 plis, lors des opérations de compilation des résultats". Le Centre Carter explique que "la CENI a suspendu la compilation des législatives le 21 décembre" afin de "résoudre les problèmes, mais a commencé à publier des résultats partiels dans plusieurs circonscriptions le 28 décembre". L'ONG observe que "la demande d`annulation des résultats de 7 circonscriptions est la preuve de graves problèmes (non divulgués) au cours des opérations de vote et /ou de compilation".
Le rapport du Centre Carter regrette ensuite l'absence des résultats "par bureaux de vote" et s'étonne des résultats "peu crédibles" de quatre circonscriptions du Katanga, qui ont voté massivement pour le président sortant Joseph Kabila. Dans ces circonscriptions, la CENI a enregistré des résultats "entre 99 et 100% pour le président Kabila".
Les observateurs électoraux du Centre Carter estiment également qu'environ 3,2 millions de votants (sur les 18 millions inscrits), "ont été enregistrés sur des listes de dérogation (des électeurs votant dans un bureau de vote autre que celui où ils sont inscrits)". Un nombre "important" qui "reflète les nombreux problèmes de la gestion de la CENI du fichier électoral". Pour le Centre Carter, "le vote par dérogation permet d`accroître l`accès des électeurs aux urnes", mais "ouvre également la voie à de multiples abus dont le vote des électeurs non enregistrés sur le fichier électoral ou encore le vote multiple".
A Walikale, au Nord-Kivu, le Centre Carter révèle "d'autres anomalies" en comparant l'élection présidentielle et les législatives, qui avaient lieu le même jour.
Dans cette circonscription, "28.810 électeurs de plus pour l'élection présidentielle ont été enregistrés par rapport aux élections législatives tandis 4,926 voix supplémentaires ont été enregistrés à Malemba Nkula au Katanga. L'écart dans le taux de bulletins nuls est également intéressant de noter, dans le cas de Tshangu circonscription de Kinshasa, où le taux à atteint presque 10 pour cent dans le scrutin législatif, alors que le scrutin présidentiel a enregistré 3,6 pour cent de bulletins nuls".
Les résultats des élections (présidentielle et législatives) ont été fortement contestées par l'opposition. Etienne Tshisekedi, candidat de l'UDPS à la présidentielle et arrivé second derrière Joseph Kabila, s'est autoproclamé "président élu" et a annoncé le boycott de l'Assemblée nationale par les députés de son parti. Plus de 500 recours sont actuellement examinés devant la Cour Suprême de Justice (CSJ) de Kinshasa qui doit se prononcer en avril. Mais l'opposition accuse la Cour d'être partiale (plus de la moitié des juges a été changée à la dernière minute par le président Kabila). Le Centre Carter remarque que la CSJ n'a toujours pas publié l'arrêt confirmant la victoire de Joseph Kabila. Concernant les législatives, le Centre Carter "recommande un examen approfondi et une évaluation de l'ensemble du processus électoral (par la Commission électorale) et notamment des examens transparents des résultats par bureau de vote". "Un tel examen est essentiel pour préparer les élections futures", estime l'ONG américaine. La CENI n'a toujours pas accédé à cette demande, mais promet de le faire avant les prochaines élections : provinciales le 25 mars et sénatoriales le 4 juillet. Pour de nombreux spécialiste électoraux, toute vérification des désormais impossible : de nombreux bulletins de vote ont disparu et les procès-verbaux des bureaux de vote sont souvent incomplets. Un groupe d'experts américains avait déjà tenté le mois dernier de "crédibiliser" le scrutin en apportant une "aide technique" à la CENI… sans succès.
Christophe RIGAUD
Le rapport complet du Centre Carter est consultable en cliquant ici.
08:45 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (3)