14 avril 2013
RDC : "Complots" à répétition contre Joseph Kabila
Depuis février dernier, trois complots visant à tuer le président congolais Joseph Kabila auraient été déjoués à Kinshasa et en Afrique du Sud. Mais pour l’opposition congolaise, ces « complots » seraient fabriqués de toute pièce par les autorités congolaises, afin de « discréditer l’opposition politique ». Vrais complots ou fausses menaces ?
Les complots contre Joseph Kabila se multiplient en République démocratique du Congo. C’est en tout cas le message que souhaite faire passer Kinshasa depuis quelques mois en divulguant différents projets de complot contre le chef de l’Etat. Pourtant, La dernière tentative « d’attentat » déjouée par la police congolaise jette le trouble sur la réalité de ces complots à répétition. Selon l’opposition, ces projets d’élimination de Joseph Kabila seraient « fabriqués » et « instrumentalisés » par Kinshasa dans le but « d’anéantir l’opposition politique » et de « traquer les opposants ». Il faut dire que la dernière arrestation de « comploteurs », jeudi 11 avril, a de quoi étonner.
Treize personnes suspectées de vouloir éliminer Joseph Kabila et son Premier ministre Matata Ponyo ont été arrêtées et présentées au ministre de l’Intérieur. Le groupe, qui se nommerait « Imperium » comptait, selon la police, attaquer le convoi présidentiel. Les preuves exposées par la police devant la presse sont assez minces : une machette, des bouteilles vides et de boissons gazeuses, quelques téléphones portables et « dans une cachette », un plan d’attaque du convoi et un autre… de la ville de Kinshasa.
La police révèle également que parmi les suspects se trouvait le journaliste Verdict Mituntwa, attaché de presse de l’opposant Diomi Ndongala. Selon les dires du journaliste, le groupe « Imperium » serait organisé et financé par l’ex-député, déjà incarcéré par la police, il y a quelques jours pour une affaire de mœurs. Ce qui fait dire à ses proches, que cette histoire de complot ne servirait qu’à « masquer » son interpellation « douteuse » du 8 avril dernier. Les membres du parti de Ndongala dénoncent en effet un « acharnement judiciaire » et une arrestation « sans mandat » visant à éliminer un opposant politique proche d’Etienne Tshisekedi. La théorie du complot avancée par les autorités congolaises ressemble donc, pour ces opposants au régime Kabila, à un règlement de compte politique.
Pourtant deux autres complots anti-Kabila ont récemment été brandis par Kinshasa. Début février 2012, c’est en Afrique du Sud, qu’était arrêtés vingt Congolais pour « tentative de coup d’Etat ». Les « putschistes » ont été interpelés alors qu’ils maniaient des armes « sous couvert d’une formation de gardes spécialisés dans la lutte contre le braconnage », précisait la presse sud-africaine. Le Congolais à la tête du groupe n’est pas un inconnu : il se nomme Etienne Kabila et prétend être l’un des fils de Laurent Désiré Kabila, le père de l’actuel président, Joseph Kabila. Là encore, certains opposants soupçonnent Kinshasa d’avoir « monté » cette affaire avec la complicité de l’Afrique du Sud, dont le soutien au régime du président Kabila est très appuyé. L’Afrique du Sud devrait en effet fournir le gros des troupes de la brigade d’intervention rapide dans l’Est de la RDC pour venir en aide à l’armée congolaise, en proie aux rebelles du M23.
Le 22 mars dernier, un nouveau complot déjoué est annoncé par les autorités congolaises. Deux personnes sont arrêtées dans la capitale et des armes sont saisies dans un hôtel. Le ministre de l’intérieur affirme que l’un des prévenus (un belge originaire du Congo) avait tenu plusieurs réunions en Europe afin de « renverser les institutions de la République en procédant à l'élimination physique du chef de l'Etat". Les deux suspects ont été déférés devant la justice pour « espionnage, complot contre la vie du chef de l'Etat, participation à un mouvement insurrectionnel et détention d'armes de guerre ».
Autant de complots en aussi peu de temps posent un certain nombre de questions. Joseph Kabila est-il en danger ? Sont-elles crédibles ? Et surtout : pourquoi médiatiser autant des opérations qui se règlent, le plus souvent, en tout discrétion, hors du champ des caméras et des micros ? Car ce qui trouble le plus, c’est la mise en scène orchestrée par Kinshasa, pour rendre public ces affaires.
Dans un pays en proie aux guerres à répétition depuis plus de 20 ans et aux assassinats politiques en tout genre… les complots contre le chef de l’Etat sont plus que plausibles. Le Congo grouille d’une centaine de groupes armés et les armes circulent très facilement. Il n’est donc pas étonnant que qu’un certain nombre « d’aventuriers » croient possible de pouvoir renverser le président Joseph Kabila, avec, tout au plus, une vingtaine d’hommes. Mais depuis quelques mois, la multiplication des « complots » anti-Kabila rappelle à certains le « bon temps » du maréchal-dictateur Mobutu, toujours sous la menace d’un coup d’Etat. Le plus souvent, ces « complots » étaient pré-fabriqués par les services de renseignements. Avec deux objectifs : maintenir une pression sécuritaire maximale sur ses opposants politiques, mais surtout indiquer à ses proches qu’il serait « mal venu » de tenter un coup d’Etat de palais. Car pour les spécialistes du dossier congolais, le plus grand risque pour Joseph Kabila, n’est pas que les rebelles du M23 « marchent » jusqu’à Kinshasa, ce qui paraît peu probable vu la distance et les circonstances internationales, mais c’est qu’un putsch renverse « de l’intérieur » le régime congolais. A la question : vrais complots ou fausses menaces ? Nous serions donc tentés de répondre : faux complots… mais vrais menaces. Les personnes capables de renverser le président Kabila ne se nomment pas Diomi Ndongala, ni Etienne Kabila, mais sont certainement présentes dans l’entourage proche du président congolais… Les vrai-faux complots déjoués par Kinshasa sont donc un message qui leur est directement adressé.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Photo : les « preuves du complot » du groupe « Imperium » présentées à la presse le 11 avril 2012 (c) DR
01:08 Publié dans Afrique, République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (4)
09 avril 2013
RDC : Diomi Ndongala de nouveau "enlevé" ?
Arrêté ou enlevé ? Les proches de l'opposant politique congolais affirment que Diomi Ndongala aurait été "enlevé" dans la soirée du 8 avril par une vingtaine de policiers sans mandat d'arrêt. Diomi Ndongala aurait été auditionné par le parquet de la République. C'est la deuxième fois que ce député proche d'Etienne Tshisekedi est arrêté en moins d'un an. En juin 2012, il avait déjà été détenu "au secret" pendant 4 mois avant d'être libéré à la veille du Sommet de la Francophonie de Kinshasa.
Selon le site de la Démocratie Chrétienne (DC), le parti politique dirigé par Diomi Ndongala, l'opposant congolais aurait été "enlevé" pour la seconde fois par les services de renseignements. Les proches du député affirment que Diomi Ndongala aurait été arrêté le 8 avril au Centre Cana de Kinshasa à 22h19. Une vingtaine de policiers l'aurait amené "vers une destination inconnue", avec un agent de sécurité de la salle, sans mandat d'arrêt. Plus tard dans la nuit, l'agent de sécurité a été libéré et a affirmé que "Diomi Ndongala avait été blessé au bras" pendant son interpellation et serait détenu par les "services spéciaux". Toujours selon les proches du député, "ni son avocat, ni la Monusco (la mission de l'ONU au Congo) n'ont pu le rencontrer". Les membres de la Démocratie Chrétienne "craignent pour son intégrité physique" et accusent "le colonel Kanyama", d'être le principal responsable de cette seconde arrestation.
Ce n'est pas la première mésaventure de Diomi Ndongala avec les services de renseignements de Kinshasa. En juin 2012, il avait déjà été "enlevé", puis relâché 4 mois plus tard, à la veille de l'ouverture du Sommet de la Francophonie de Kinshasa, en octobre. Accusé de viol sur mineures, l'opposant politique avait toujours nié les faits et dénonçait une "traque politique".
Après sa "disparition" en juin 2012, ses proches affirmaient qu'il était détenu au secret, alors que les autorités congolaises l'accusaient d'être en fuite pour se soustraire à la justice. 6 mois après son premier "enlèvement", il y a donc maintenant une seconde affaire Ndongala après son arrestation d'hier. Ce mardi, dans la journée, on apprennait que Diomi Ndongala avait été auditionné par le parquet de la République concernant l'affaire de viol sur mineures.
Christophe RIGAUD - Afrikarabia
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09:49 Publié dans Afrique, République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (4)