21 avril 2013
Katanga (RDC) : Quand l'Etat perd le contrôle
L’attaque de Lubumbashi par les rebelles sécessionnistes Bakata Katanga en mars dernier, souligne l’incapacité de l’Etat congolais à assurer son autorité dans certaines provinces. Selon Marc-André Lagrange, d’International Crisis Group (ICG), cet incident pointe non seulement la faillite de l’Etat, mais aussi les différentes réformes manquées par le président Kabila depuis 2006, et notamment celle de la décentralisation.
La guerre du Nord-Kivu qui oppose depuis le mois d'avril 2012, les rebelles du M23 au gouvernement congolais a éclipsé de nombreuses autres zones d'instabilités en République démocratique du Congo. Parmi elles, la riche province minière du Katanga. Le 23 mars dernier, la capitale provinciale, Lubumbashi, est investie par 400 rebelles Maï-Maï "Bakata Katanga", un groupe armé revendiquant l'indépendance du Katanga. Les autorités congolaises paraissent rapidement débordées par les événements et laissent entrer sans résistance les rebelles dans Lubumbashi. Après plusieurs heures de panique, les Nations unies réussissent finalement à négocier la reddition du groupe, qui est rapidement transféré vers Kinshasa. Bilan des affrontements : 35 morts et 53 blessés. Un général et un chef de la police ont été suspendus pour "manquement graves dans l'exercice de ses fonctions". Fin de l'épisode.
"Un déficit abyssal de sécurité"
Dans une analyse publiée par l'International Crisis Group (ICG), Marc-André Lagrange, revient sur les événements de Lubumbashi, qui sont révélateurs "de l’effondrement de la capacité du régime congolais à gouverner". Pour ce spécialiste de la région, l'autorité de l'Etat congolais "se réduit comme peau de chagrin". De nombreux groupes armés défient désormais Kinshasa dans différentes provinces. Au Nord-Kivu, ce sont les rebelles du M23 qui font la loi. Ils ont même occupé la ville de Goma pendant plusieurs jours, fin 2012. En Province orientale, ce sont les Maï-Maï Morgan qui sévissent, alors qu'au Sud-Kivu, le Front de résistance patriotique en Ituri (FRPI) et les Maï-Maï Yakutumba ont repris du service. D'autres groupes, comme les Raïa Mutomboki au Nord et Sud Kivu et les Maï-Maï de Gédéon au Katanga, règnent désormais en maître dans certains territoires. Le chercheur pointe évidemment le "déficit abyssal de sécurité" de la RDC, mais pour Marc-André Lagrange, "s’il n’est pas surprenant que le gouvernement néglige la sécurité de ses populations, il est plus surprenant qu’il ne sécurise pas le poumon économique du pays". La province du Katanga est effectivement la plus riche du pays, notamment grâce au cuivre dont regorge son sous-sol.
Les "gagnants" et les "perdants" de la décentralisation
Pour justifier les revendications sécessionnistes des Maï-Maï Bakata Katanga, Marc-André Lagrange, avance une autre explication que la simple "tradition" indépendantiste de la province . Il s'agit d'une "réforme clé" du mandat du président Joseph Kabila, qu'il n'a jamais fait aboutir : la décentralisation. La réforme prévoit la division du pays en 24 provinces (contre 11 actuellement) et un partage des revenus fiscaux entre l’Etat (60%) et les provinces (40%). Le Katanga est choisi comme "province test", début 2013, pour lancer la réforme de la décentralisation. Le Katanga serait alors découpé en quatre "sous-provinces". Selon le chercheur d'ICG, il y aurait les "perdants" de la réforme (le Nord de la province) et les "gagnants" (le Sud où est concentrée l'activité minière). Pour Marc-André Lagrange, "l’attaque de Lubumbashi par des Maï-Maï favorables à l’indépendance du Katanga n’est certainement pas une coïncidence". Selon lui, "ces combattants ne sont souvent que le bras armé des politiciens locaux pour faire pression sur le gouvernement central".
Après les Kivus, Kabila lâché par les Katangais
L'autre victime collatérale de l'attaque de Lubumbashi, s'appelle Joseph Kabila. International Crisis Group rappelle "qu'après avoir perdu ses soutiens dans les Kivus en 2011 suite à l’intégration du Conseil national pour la défense du peuple (CNDP) dans l’armée", le président congolais "s’est aliéné une partie de l’élite politique" katangaise en annonçant la décentralisation dans la province. ICG explique que "le clan des Katangais", proche du président Kabila "s'entredéchire" désormais. Après la mort de son principal conseiller et mentor, le katangais Katumba Mwanke, en février 2012, Joseph Kabila serait désormais lâché par "les fédéralistes", comme Jean-Claude Mayembo, le président de la Solidarité congolaise pour la démocratie (SCODE) ou Gabriel Kyungu wa Kumwanza, le turbulent président de l’Union nationale des fédéralistes du Congo (UNAFEC). Toujours selon ICG, même Daniel Ngoy Mulunda, le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui, "d’après certains, aurait joué un rôle clé dans la victoire de Kabila, aurait publiquement accusé" Joseph Kabila "d’ingratitude devant l’assemblée provinciale du Katanga".
"Un pouvoir dépendant de soutiens extérieurs"
Que reste-t-il au président Joseph Kabila pour asseoir son autorité en RDC ? Visiblement plus grand chose à en croire l'analyste Marc-André Lagrange. L'Etat central n'existe plus et les provinces, de plus en plus "indépendantes", gèrent les problèmes sécuritaires avec des partenaires extérieurs. Dans l'affaire des Maï-Maï Bakata Katanga de Lubumbashi, c'est en effet le gouverneur du Katanga et la mission des Nations unies au Congo (Monusco) qui ont obtenu leur reddition. "Une fois de plus, les Nations unies et le pouvoir local ont dû se substituer à un gouvernement absent", souligne Marc-André Lagrange. Dans l'autre dossier "chaud" congolais, celui du Nord-Kivu et des rebelles du M23, là encore, le président Kabila s'en remet à "des acteurs extérieurs" pour gérer la crise. Les autorités congolaises attendent en effet leur salut de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et de l'arrivée de la brigade spéciale d'intervention de l'ONU, pour lutter contre les groupes rebelles. Après "sept ans de régime kabiliste", ICG note que "les capacités de gouvernance institutionnelle sont toujours très faibles" et que le pouvoir est "complètement dépendant de soutiens extérieurs" et d'un système de gouvernance par substitution".
Christophe RIGAUD - Afrikarabia
Photo : Lubumbashi - Katanga © Ch. Rigaud www.afrikarabia.com
23:12 Publié dans Afrique, République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (11)
Commentaires
Nous voulons un katanga tres uni pas decouper comme Le pouvoir de Kinshasa Le veux nord,sud Kivu,maniema pourquoi
Tout ce decoupage???pour seulement creer l,insecurite Katanga ne sera jamais decouper pour nous afaiblir
Écrit par : delphin | 22 avril 2013
pour moi le katanga veux etre indepedant parce que: le katanga produit plus de 75% du budget de l'etat et sans pourtant avoir son revenu et la population katangais n'emprofite en rien de ses richesses en observant donc le katanga un poid d'un pays sur son dos,or la rdc a 11provinces et en plus l'etat congolais ne se prend pas en charge pour le social,education,securité et j'en passe se ce qui fragile la rdc.que l'etat congolais se prend en charge envers ses responsabilités.
Écrit par : sergemakonga | 22 avril 2013
La mauvaise politique et gestion du pays fait que la majorité des katangais n'ont pas leur compte dans les revenus de son sous sol immensément riche; c'est ce qui pousse tous à l'unanimité de vouloir l'indépendance de la Province. La population croupit dans une misère très profonde alors que la province est riche; si on n'y prend pas garde, un jour la dynamite peut sauter un jour.
Écrit par : Malenge | 22 avril 2013
Que veulent les Katangais?
Ce sont eux qui sont au pouvoir en RDC et aussi à la base de la misère du peuple congolais
Maintenant ils veulent faire la fuite en avant. Qu'ils prennent d'abord leur frère Kabila et sa suite et nous laissent tranquille avec notre rdc
Écrit par : Léon | 22 avril 2013
Il ne faut pas faire l,amalgame ,la décentralisation est inscrite dans la constitution , la loi fondamentale de la RDC il ne faut pas croire qu,il faille renoncer a ce projet parce que certains aigris et nostalgiques s,agitent .
Le Katanga étant trop vaste l, idéal serait de rapprocher administres des structures administratives ,lorsque nous prenons un pays comme la France combien de provinces compte-t-elle .De plus , le Katanga n,est pas l,unique province concernée.
Écrit par : Theophile | 22 avril 2013
Chacun a le droit d'émettre ses avis et considérations mais un un fait est réel : La situation au Katanga est catastrophique et c'est JOKA et sa bande de kinois qui ont pris en otage le pays tout entier s'adonne à coeur joie au pillage systématique.
La Gécamines, principale pourvoyeuse des fonds est sur une mauvaise pente et toutes ses ressources financières sont gérées par Kinshasa au grand dam du Katanga; la direction des péages des routes du Katanga est à Kinshasa; à la DGDA/Katanga pour trouver un emploi il faut être à Kinshasa; même le balayeur est de Kinshasa et les exemples sont légions. Au sud Kivu; les jeunes armés de machettes sont fait fuir les gens ç la sucrerie de Kaliba parce qu'ils cherchaient du travail et on ne le donnait qu'aux étrangers (Tutsi). L'avenir nous dira quoi.
Écrit par : Malenge | 22 avril 2013
Merci et nous osons croire que l'Etat congolais doit réellement restaurer l'autorité de l'Etat en mettant en place toutes les grandes recommandations de Sun City comme une armée républicaine, la démocratie, la reconcliation nationale au lieu de chercher à nous distraire avec la COHESION NATIONALE ou CONSENSUS NATIONALE, puis la décentralisation. Nous assistons à des nominations claniques , ethniques ou tribales dans la TERRITORIALE même les Elections des Gouverneurs des provinces ne respectent même pas l'attente des Partis politiques et des populations psqu'on doit respecter la loi de la M.P, voilà l'echec de la démocratie. Pour les "bakata katanga", on devait arrêter toutes les Autorités politico-Administratives et Les Responsables les Services Spécialisés (ANR,PNC,T2,FARDC etc) de ce District et de la ville de L'shi car ils ont faillis à leurs missions de la sécurisation des personnes et les biens ainsi que de veiller à l'Ordre et la tarnquilité publics. Au lieu d'atterrir à un semblant de conférence des notables katangais. Ce n'est pas différent des BDK au Bas-Congo? "Il n ya pas de fumées sans feu" soyons prudent à la BALKANISATION.
Écrit par : Manou | 22 avril 2013
Nous sommes de congolais
Écrit par : Vincent | 23 avril 2013
Vous êtes congolais de par la volonté de l'étranger à Berlin en 1885 sans consultation ni même conaissance à l'époque des peuples concernés. Si vous maintenez l'unité du pays il est normal que les plus riches aident les plus pauvres
Écrit par : anneet | 24 avril 2013
pour moi le congo est plus vaste.je ne crois pas qu'il aurait un president capable de developper un grand pays a la taille d'un continent comme la rdc .tout le grand pays d'afrique par sa supeficie n'est pas developper prenons l'exemple du soudans le soudan na pas etait developper parce que dès par sa superficie,le pays a sombré dans la geurre interminable qui a mis son peuples dans la misere et a pousser le soudan a se divise de meme l' algerie ne pas developpe faut de sa superficie.
Écrit par : sergemakonga | 24 avril 2013
Les revendications suffisent pour comprendre l'absence de l'autorité centrale. Il serait mieux au regime de Kabila de préparer sa sortie paisible sinon nous risquons de courrir le risque de la République centre africaine d'aujourdh'hui. Si partout les desordres et rien que les desordres, c'est parce que le ppuvoir central privilegie la politique au lieu de renforcer l'Administration publique qui prend souvent des mesures regkementaires qui assurent la tranquilité piblique. la police devrait etre decentralisée comme dans le temps au lieu que celle ci depende du pouvoir centrale qui est éloigné.
Écrit par : Eric | 24 avril 2013
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