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26 mai 2008

RDC : Bemba en prison... et après ?

Jean-Pierre Bemba vient de passer sa deuxième nuit en prison. Tous ses ‘‘amis occidentaux’’ l’ont lâché et il semble payer ainsi pour les crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis par ses hommes en Centrafrique. La CPI précise que la liste est longue. Mbusa Nyamwisi, John Tibasima, Roger Lumbala, Laurent Nkunda, Bosco Ntangada et d’autres anciens chefs de guerre seraient également dans le viseur.

Afrikarabia logo.pngJean-Pierre Bemba vient de passer sa deuxième nuit sous les verrous, au grand bonheur de ses adversaires, après son arrestation le samedi 24 mai à 22 heures dans l’une de ses résidences à Bruxelles. Il pourrait être transféré à la Haye où se trouve le siège de la Cour Pénale Internationale. La CPI le poursuit pour de crimes contre l’humanité, crimes de guerre, viols, tortures et pillages commis par ses hommes sur des populations civiles à Bangui et dans les villes de Bossangoa et Moungouma en Centrafrique. C’était entre le 25 octobre 2002 et le 15 mars 2003. Jean-Pierre Bemba avait dépêché les éléments du MLC pour défendre le pouvoir de l’ancien Président centrafricain Ange- Félix Patassé contre la rébellion de François Bozizé, l’actuel Président. La CPI argumente que Jean-Pierre est accusé en qualité de supérieur hiérarchique. Parce qu’il était investi d’une autorité de jure et de facto pour prendre toutes les décisions tant sur le plan politique que militaire. Lors du procès attendu, le Procureur de la CPI Luis Moreno Ocampo envisage de faire défiler les personnes qui ont survécu à la violence, celles qui ont survécu au sida. Chaque victime passera à la Cour raconter son histoire.

Un déplacement à Bruxelles imprudent ?

Bemba aurait-il pu être arrêté au Portugal ? Difficile à dire. Mais une source a affirmé que Bemba a été « attiré » à Bruxelles par l’un de ses collaborateurs, « acheté » par les belges, qui lui aurait fait miroité la possibilité de débarquer à Kinshasa prendre le pouvoir, profitant de la brouille entre la RDC et la Belgique.

Réactions

La nouvelle de l’arrestation de Jean-Pierre Bemba, dont les images tournent en boucle sur les petits écrans, a été applaudie par les organisations de défense des droits de l’homme. Pour les activistes des droits l’homme, l’arrestation puis le jugement à venir d’un homme de calibre de Bemba devait servir de leçon à tous les aventuriers militaristes qui distribuent gratuitement la mort. Ceux-ci auront compris qu’il existe, quelque part, plus fort qu’eux. Et que tôt ou tard, la justice internationale s’intéressera à eux. On pense ici à Laurent Nkunda qui n’arrête pas de tuer les Congolais au Kivu, à ses aînés du RCD qui avaient enterré les femmes vivantes, à tous les auteurs de fosses communes récemment découvertes au Bas-Congo, etc.

Bangui déclare avoir pris acte de l’arrestation de l’ancien Vice-président rd-congolais. Le ministre centrafricain de l’Information, Cyriaque Gonda, souhaite laisser la procédure suivre son cours jusqu’à la fin. Il a ajouté que le gouvernement de son pays se réunirait bientôt pour adopter une position commune et déterminer la ligne à suivre.

Quel procès ?

L’arrestation de Bemba, a fait l’effet d’une bombe dans l’opinion à Kinshasa. Les gens ne comprennent pas comment et surtout pourquoi la CPI n’a attendu que le moment où les négociations avec le Gouvernement de Kinshasa sur le retour de Bemba au pays étaient très avancées pour agir. La date du 27 mai avait même été annoncée pour le retour de l’opposant en exil. Bemba devrait rentrer prendre la tête de l’Opposition politique. Un consensus, en dépit de quelques gesticulations, semblait se dégager autour de sa candidature. La CPI a lancé son mandat d’arrêt le 23 mai et le 24 mai, les belges l’arrêtaient. Les choses se passent un peu comme en mars 2007 avec la dernière bataille de la Gombe. La guerre avait commencé juste quand on attendait un accord sur la taille de la garde rapprochée de Bemba. Tout ça intrigue. Rien n’est fait au hasard. Le Procureur de la CPI va présenter le 5 juin prochain au Conseil de Sécurité des Nations Unies son rapport sur ‘‘les crimes et la destruction de communautés entières au Darfour’’. Quoi de mieux si Luis Moreno Ocampo devait se présenter avec, dans la corbeille de la mariée, Jean-Pierre Bemba ? Ce sera, pour Ocampo, la meilleure façon de prouver que la justice internationale est en marche. Quant aux bembistes, ils croient trouver des failles dans l’argumentation de Luis Moreno Ocampo. Celui-ci dit : « Il n’y a pas d’excuses pour un chef qui ordonne, autorise ou tolère que ses troupes commettent des viols et des pillages ». Un bembiste a confié que le MLC était à Bangui sur invitation de l’ancien Président Ange Félix Patassé. Et qu’avant de remonter à Jean-Pierre Bemba, l’invité, la CPI aurait mieux d’arrêter Patassé. Qui plus, il aurait fallu procéder à l’arrestation des comandants MLC des opérations à Bangui et vérifier si la hiérarchie du mouvement politico-militaire avait donné l’ordre à ses hommes de commettre des crimes. On s’interroge aussi pourquoi la CPI ne quantifie pas les atrocités de Bangui. Lesquelles n’ont rien à voir avec les cruautés dans les Territoires, en Afghanistan et en Irak.

Les bembistes sont convaincus que leur leader est victime d’un complot international. Ils sont confortés dans leur idée par les propos de Luis Moreno Ocampo qui déclare : « Cette arrestation est le fruit d’une opération complexe et bien planifiée. Nous saluons tous les pays impliqués dans son exécution, dont la Belgique qui a immédiatement exécuté le mandat d’arrêt en vertu de ses obligations d’Etat partie au Statut de Rome. Je suis reconnaissant à tous ceux qui nous ont aidés à surveiller les mouvements de M. Bemba, afin d’éviter qu’il n’échappe à la justice internationale ». Bemba aura-t-il droit à un procès équitable ? C’est la question que ses partisans se posaient encore hier soir. Certes, il vrai que les droits de la défense lui sont garantis. Mais à la CPI, aucun procès n’est allé jusqu’au bout. L’ex-Président serbe Slobodan Milosevic est mort en détention sans qu’on ne comprenne grand-chose sur ce dont il était reproché. Le procès Lubanga tire en longueur. L’ex-Président libérien, Charles Taylor, est aussi en détention, mais son procès n’évolue guère. C’est ce qui fait dire à certains que si l’arrestation de Bemba vise, entre autres, à le tenir à l’écart de la scène politique congolaise, son avenir est d’ores et déjà compromis. Une chose, à ce stade est vraie, le MLC sera davantage fragilisé, l’opposition aussi.

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