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30 mars 2008

RDC : Pourquoi a-t-on assassiné Laurent Désiré Kabila ?

Sept ans après l'assassinat du président Laurent-Désiré Kabila, retour sur le rapport rendu public à Kinshasa autour de la mort du Mzee. Histoire d'une mort annoncée...

DSC02392 copie.jpgLe 16 janvier 2001, dans la mi-journée, des coups de feu retentissent dans l'enceinte du Palais de Marbre, résidence du président Laurent-Désiré Kabila. Les voisins du Chef de l'Etat qui ne sont pas habitués à ce genre de crépitement s'interrogent. La route reliant Kintambo à Binza/Delvaux et qui longe la résidence présidentielle est bloquée par des chars de combat. Habituellement, cette route est fermée à partir de 18 h00 par une simple barrière gardée.

A la clinique Ngaliema à Kinshasa/Gombe, un hélicoptère atterrit et débarque un corps ensanglanté enveloppé dans un drap. Le personnel médical non essentiel et les malades ambulants sont évacués. Le quartier de la clinique hôpital est quadrillé par des troupes d'Elite. Plus personne n'entre ou ne sort. Même le Grand Hôtel de Kinshasa(ex-Hôtel Intercontinental) est isolé. RFI (Radio France International) parle de "quelque chose de très grave" qui s'est passé au palais présidentiel à Kinshasa. La rumeur, principale source d'information dans la capitale congolaise, se met en marche. Kitambo/magasin. Dans un taxi, une dame affolée, qui ne pensait qu'à rentrer chez-elle, annonce aux autres occupants que "le président Kabila a été tué par son garde du corps ". La nouvelle se répand comme une traînée de poudre dans la ville. Les communications sont interrompues. Une Jeep équipée de lance-roquettes prend position devant la plus grande société de téléphonie portable, STARCEL.

A la RTNC (Radiotélévision nationale congolaise, chaîne publique) les émissions continuent normalement jusqu'à ce qu'apparais à l'écran le colonel Eddy Kapend, aide de camp du chef de l'Etat. Les yeux hagards, les lèvres sèches, sur un ton sec et autoritaire, l'aide de camps du chef de l'Etat se présente : "(…) c'est le colonel Eddy Kapend qui vous parle de Kinshasa, capitale de la République (…). Il ordonne à toute la hiérarchie militaire, citée nommément, de maintenir les troupes au calme et de fermer toutes les frontières du pays. Sur les raisons de cette déclaration aux allures d'un putsch, le colonel Eddy Kapend ne dit rien. Il promet des informations supplémentaires pour plus tard. Il ne réapparaîtra plus à l'écran si ce n'est, le 23 janvier 2001, dans la garde d'honneur lors des funérailles officielles du président Kabila.

La guerre des communiqués a commencé dès cet instant. Des officiels à Bruxelles, Paris, Londres et Washington, citant des sources crédibles à Kinshasa, annoncent successivement la mort de Kabila des suites des balles tirées par un de ses gardes du corps. Kinshasa admet la fusillade mais dit que Kabila a été blessé et évacué à l'étranger pour des soins appropriés. Le Zimbabwe, principal allié du gouvernement congolais annonce le décès du président avant de se rétracter. Le 18 janvier 2001 à 20 H00, le gouvernement congolais annonce à la télévision nationale, par la bouche du ministre de la communication, Dominique Sakombi Inongo, la mort de Mzee Laurent Désiré Kabila survenue ce jour là (18 janvier 2001) dans un hôpital de Harare au Zimbabwe. Le président aurait eu le temps de laisser un testament que lira magistralement le ministre de la communication.

Pour illustration, nous reprenons la chronologie des événements du journal belge LE SOIR tirée des archives du site Internet du quotidien :

16 janvier 2001.

-17h05 : un télex de l'AFP (Agence France Presse) annonce que, dans un message télévisé, l'aide de camp du président Kabila a ordonné aux chefs de l'armée de fermer les frontières et de maîtriser leurs unités. Raison: des coups de feu auraient été entendus dans un quartier proche de la résidence de Kabila

-18h00. Les Affaires étrangères belges (puis l'ONU) confirment les tirs.

-19h30. Des sources diplomatiques occidentales à Kigali (Rwanda) affirment qu'une tentative de coup d'Etat a eu lieu contre Kabila. Et l'annoncent blessé ou tué. Le ministre belge des Affaires étrangères, Louis Michel, n'est pas en mesure de confirmer la mort ou les blessures du président.

-20h17. Le ministre de l'intérieur congolais, Gaëtan Kakudji, déclare que l'instauration du couvre-feu, à Kinshasa, a été ordonnée par le président. Qui serait donc vivant ? Au même moment, un belge actif à Kinshasa nous rapporte la dernière rumeur : Kabila serait décédé d'une crise cardiaque. Le reste serait (une) mise en scène.

- 21h00. Tout le monde s'en mêle : l'agence d'information des missionnaires, Misma, basée à Rome, affirme que le décès du président semble pour l'instant non fondé ; le RCD, rebelle, lâche que la tentative de coup d'Etat a été organisée par les Forces armées congolaises ; L'ambassadeur congolais en Belgique assure que Kabila est en vie, après une tentative de coup d'Etat.

-22h30. Premier ministre occidental à l'affirmer, Louis Michel, se basant sur deux sources dignes de foi, annonce la mort de Kabila, abattu par son garde du corps, en présence de généraux auxquels il aurait signifié leur limogeage. Michel évoque un différend qui a débouché sur une certaine violence.

- 23heures. Un intime de Kabila nous assure que le président est vivant.

- 23h30. Le ministre français des Affaires étrangères annonce que Kabila est décédé.

…/…

17 janvier 2001. - 0H30. Les Etats-Unis estiment que Kabila a été assassiné. - 1 H00. Une source congolaise à Bruxelles affirme à BELGA que Kabila aurait été abattu par le vice-ministre de la défense, le colonel Kayembe, qu'il venait de limoger. Et que Joseph Kabila, le fils du président, aurait également été blessé. - 9H40. Deux mouvements rebelles, puis le gouvernement britannique, confirment le décès de Kabila. - 10H00. Un parent de Kabila, à ses côtés à l'hôpital, nous certifie qu'il est vivant, mais ses chances de survie ne sont pas garanties, vu son âge. 11h20. Un diplomate à Bujumbura(Burundi) affirme que Joseph Kabila est décédé. - 12H43. Les autorités congolaises sortent du bois. Pour indiquer que Kabila a été blessé dans un attentat malheureux et transféré à l'extérieur du pays pour des soins appropriés. Et que son fils Joseph (qui ne serait donc pas mort) assure la direction de l'action gouvernementale, en attendant le rétablissement de son père. Michel (qui a désormais 5 sources confirmant la mort) prend acte. - 13H20. Les capitales occidentales commencent à faire machine arrière. Le Français Hubert Védrine estime que la mort de Kabila n'est peut-être pas confirmée. Puis Londres n'est plus absolument sûr qu'il soit mort. - 13H45. De hauts responsables zimbabwéens assurent que, touché par 5 balles, Kabila est mort, mercredi, dans l'avion qui le transportait au Zimbabwe, pour traitement médical. - 15 H00. Le ministre congolais Godefroid Tcham'lesso, depuis la Libye, admet le décès de Kabila, deux heures après son admission à l'hôpital(…) Il pointe les responsables : Ouganda, Rwanda et Congo-Brazzaville… qui démentent immédiatement. - 17H10. Les USA reconnaissent être dans les limbes, n'ayant aucune confirmation du décès de Kabila. - 19H00. Etant donné les informations contradictoires, le gouvernement zimbabwéen annonce qu'il fera une déclaration complète… ce jeudi, après avoir reçu un briefing autorisé du gouvernement congolais fondé sur le bulletin médical rédigé par l'équipe de médecins congolais qui se sont occupé du président Kabila. 19h30. L'ambassadeur congolais à Harare déclare à la télévision zimbabwéenne que Kabila est dans un état très critique, mais toujours en vie, au Zimbabwe.

A cette chronologie du quotidien belge, nous pouvons joindre l'annonce officielle de la mort de Kabila intervenue au cours du journal de 20H00 sur la chaîne publique RTNC. Selon le gouvernement, le président congolais est mort le 18 juin 2001 dans un hôpital de Harare. Des circonstances de la mort, le porte-parole du gouvernement explique qu'un garde du corps est entré dans le bureau du chef de l'Etat et s'est approché de lui comme pour lui parler à l'oreille. C'est à cet instant qu'il a sorti son arme et a tiré à bout portant sur le chef de l'Etat. Le Conseiller économique, Emile Mota, qui était en séance de travail avec le président est sorti pour alerter la garde. Le tueur qui tentait de s'enfuir, a été abattu.

Kabila est inhumé, à Kinshasa, le 23 janvier 2001. Entretemps, le Général-major Joseph Kabila, jusque-là, chef de l'armée de terre a succédé à son père. Un débat est aussi né sur l'identité du nouveau chef de l'Etat. Pour la première fois, depuis l'arrivée de Laurent-Désiré Kabila au pouvoir, la télévision publique fait un zoom sur Mama Safi, l'épouse du président Laurent-Désiré Kabila et maman de Joseph.

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