Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

18 février 2010

RDC : Un pays où il ne fait pas bon défendre les Droits de l'homme

Les défenseurs des droits humains sont toujours ménacés en République démocratique du Congo (RDC). Amnesty International a appelé le gouvernement congolais à protéger les défenseurs des droits de l'homme, "qui continuent d’être appréhendés de manière arbitraire par les organes chargés de la sécurité nationale et de recevoir un nombre alarmant de menaces de mort". Un rapport accablant vient d'être publié par Amnesty International.

Image 1.pngDans son rapport "Les défenseurs des droits humains attaqués en République démocratique du Congo", Amnesty International rend compte des persécutions subies par huit défenseurs des droits humains influents en RDC, un harcèlement que l’organisation craint de voir s’accentuer durant la période précédant les élections présidentielles et générales de 2011.

« Le gouvernement de la RDC doit garantir le droit à la liberté d’expression et agir pour que les défenseurs des droits humains congolais soient protégés contre les menaces, les arrestations arbitraires et les agressions, a déclaré Andrew Philip, responsable des recherches sur la RDC à Amnesty International. Nombre de militants des droits humains sont détenus uniquement parce qu’ils s’expriment en faveur d’autres personnes. »

Golden Misabiko, le président de la section katangaise d’une organisation congolaise de défense des droits humains, a été arrêté par l’Agence nationale de renseignements (ANR) en juillet 2009, après la publication par son organisation d’un rapport faisant état de l’implication de membres des forces de sécurité dans des activités illicites d’extraction d’uranium fortement radioactif et d’autres minerais dans la mine de Shinkolobwe (province du Katanga).

Après être resté en détention pendant près d’un mois, il a été condamné à un an d’emprisonnement dont huit mois avec sursis pour « propagation de faux bruits », une condamnation que ses avocats tentent de faire annuler. Golden Misabiko a souffert de vives douleurs à l’estomac, de vomissements persistants et a subi un traumatisme psychologique à cause des conditions de détention exécrables, et il a dû payer les gardiens pour dormir dehors sur un morceau de carton et ne pas avoir à passer la nuit dans une cellule surpeuplée et crasseuse.

Porte-parole local et président d’une ONG de défense des droits humains à Kinshasa, Robert Ilunga Numbi a été interpellé par l’ANR et détenu au secret pendant neuf jours, en septembre 2009, après la diffusion par son organisation d’un communiqué de presse dénonçant les conditions de travail difficiles dans une entreprise de concassage de gravier à Kasangulu, dans la province du Bas-Congo.

En RDC, l’Agence nationale de renseignements, en particulier, procède fréquemment à l’arrestation et au placement en détention de défenseurs des droits humains, ainsi qu’à des manœuvres d’intimidation à leur encontre. Amnesty International reçoit régulièrement des informations faisant état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements infligés dans les centres de détention de l’ANR.

« Les défenseurs des droits humains présents en RDC jouent un rôle essentiel pour attirer l’attention sur les violations des droits fondamentaux, mais l’aggravation du harcèlement rend plus difficile pour eux l’accomplissement de cette importante mission », a dit Andrew Philip.

Les figures de proue de quatre organisations de défense des droits humains situées à Lubumbashi, dans le sud-est du pays (province du Katanga), reçoivent des SMS anonymes de plus en plus menaçants depuis qu’ils ont mené, mi-septembre 2009, une campagne locale de soutien à Golden Misabiko, qui était alors en détention.

« Je ne sais pas combien de temps encore je pourrai supporter le stress et la souffrance psychique que suscitent ces menaces. Pourtant, chaque jour, je résiste à la tentation de revenir tout simplement à une vie normale, auprès de ma famille – car je refuse qu’on me contraigne à arrêter mes activités par des actes d’intimidation », a confié un défenseur des droits humains à Amnesty International.

Grégoire Mulamba, l’un des quatre chefs de file qui ont milité en faveur de Golden Misabiko, a été enlevé le 18 octobre 2009 alors qu’il rentrait chez lui après le travail. Le taxi collectif qui était censé le ramener s’est soudain écarté de son trajet habituel ; quand Grégoire Mulamba a objecté, l’un des passagers lui a enfoncé un revolver dans les côtes et lui a bandé les yeux. Lorsque le véhicule s’est immobilisé, 20 minutes plus tard, Grégoire Mulamba a cru qu’on allait le tuer. Au lieu de cela, il a été abandonné dans un cimetière, à la périphérie de Lubumbashi.

Craignant pour leur vie, les trois autres responsables de la campagne, Timothée Mbuya, Emmanuel Umpula et Dominique Munongo, ont fui Lubumbashi fin septembre 2009. Ils y sont tous les trois revenus en octobre afin de poursuivre leur action en faveur des droits humains, malgré un flot de plus en plus soutenu de menaces de mort.

Des défenseurs des droits humains congolais ont révélé à Amnesty International que le harcèlement et les arrestations dont ils sont victimes ont fortement augmenté tout au long de 2009, ce que les observateurs des Nations unies présents dans le pays ont également signalé.

Un certain nombre d’États se sont dits préoccupés face à la situation des défenseurs des droits humains en RDC et ont fait des recommandations à ce pays lors de son examen périodique universel, qui a eu lieu à Genève, en décembre 2009, sous l’égide des Nations unies. L’examen périodique universel est l’occasion, pour le Conseil des droits de l’homme, de passer en revue le bilan de chacun des États membres en matière de droits humains. Chaque pays est contrôlé tous les quatre ans afin de veiller à ce que tous respectent l’ensemble des obligations qui leur incombent dans le domaine des droits humains. La RDC a, depuis, fait savoir qu’elle est d’accord avec les recommandations émises lors de l’examen périodique universel, qui l’invitent à « prendre des mesures supplémentaires pour la protection des droits des défenseurs des droits humains […] », à « veiller à ce que les infractions et les atteintes commises à l’encontre de journalistes et de défenseurs des droits humains fassent l’objet d’enquêtes efficaces et de poursuites » et à « adopter un cadre juridique efficace pour la protection des militants des droits humains conformément à la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme ». Amnesty International exhorte le gouvernement à mettre rapidement ces changements en œuvre, aussi bien en droit qu’en pratique.