01 janvier 2011
RDC : 2011, une année décisive
Elections ou non, l'année 2011 sera cruciale en la République démocratique du Congo (RDC). Si les élections ont bien lieu, le scrutin se révèlera plus ouvert que prévu et plus personne ne sera en mesure d'assurer la réélection "programmée" de Joseph Kabila. Si les élections sont reportées, comme beaucoup le prédisent, la RD Congo entrera alors dans une zone de fortes turbulences et fera de 2011, l'année de tous les dangers. Etat des lieux.
Plusieurs difficultés attendent la RDC en 2011 et les 5 chantiers lancés par le président Kabila en 2006 sont encore loin d'avoir portés tous leurs fruits. Il faut dire que les attentes des congolais sont immenses : inflation, santé, électricité, eau, éducation, état des routes… tout reste à faire dans cet immense pays aussi grand que toute l'Europe occidentale et les marges de manoeuvres du pouvoir sont très étroites. Le budget de la République démocratique du Congo (RDC) reste microscopique : 6,7 milliards de dollars pour plus de 72 millions de Congolais.
Des conditions de vie difficiles
Ces derniers mois, les prix ont flambé dans tous le pays. Cette augmentation des prix va du simple au double en l’espace de trois mois : riz, manioc, grains de maïs, farine de froment et viande congelée, pour ne citer que ceux-là. Une dernière étude du PNUD, le niveau de développement en République Démocratique du Congo est en recul en 2010 par rapport à celui de 1970, selon le classement annuel du développement humain… on vivrait donc plus mal à Kinshasa en 2010 qu'en 1970 !
Une guerre sans fin à l'Est
Le chaos règne toujours à l'Est du pays. Les groupes rebelles font toujours la loi dans les Kivu et la frontières Nord de la RD Congo continue d'être la proie de la LRA (Armée de Résistance du Seigneur). Attaques sanglantes, massacres, viols, enlèvements, pillages… les civils sont les premières victimes de l'insécurité permanente qui prévôt à l'Est de la République démocratique du Congo. Milices huttes des FDLR, Maï-Maï, ex-CNDP… et soudards de l'armée régulière (FARDC) ont jeté plus de 1,4 millions de déplacés sur les routes congolaises. Pour l'heure, ni les 17 000 casques bleus de la MONUSCO, ni les FARDC ne parviennent à rétablir un semblant de sécurité dans la région.
Année électorale ?
2011 doit sonner comme l'heure de vérité pour le président Joseph Kabila. A la surprise générale, en plein été 2010, le président sortant annonce la date de la tenue des prochaines élections présidentielles en RD Congo : novembre 2011. Le recensement et l'enrôlement des électeurs ne sont pas terminés, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) n'est toujours pas en place et suscite déjà des controverses… mais les élections auront bien lieu ! A moins que… comme de nombreux observateurs le prédisent, Joseph Kabila ne décide de reporter le scrutin. La mise en place chaotique des élections, son manque financement et la nomination contestée du futur président de la CENI pourraient pousser le président Kabila remettre le scrutin aux calendes grecques. Car pour la président sortant, les élections ne s'annonce plus comme une simple promenade de santé.
Plusieurs candidats de poids viennent en effet de sortir du bois et la réélection de Joseph Kabila apparaît de moins en moins assurée. Des alliances semblent même voir le jour entre les principaux partis d'opposition : le MLC de Bemba et Muamba, l'UDPS de Tshisekedi ou l'UNC de Kamerhe… trois poids lourds de la politique congolaise qui pourraient troubler la tranquille réélection de Joseph Kabila. Elections avec ou sans report… 2011 sera donc une année décisive pour la stabilité de la République démocratique du Congo.
Christophe Rigaud
Photo : (c) Ch. Rigaud www.afrikarabia.com
19:11 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (5)
31 décembre 2010
Affaire Chebeya : Un proche de Numbi parle
L'étau se resserre autour du chef de la Police de République démocratique du Congo (RDC), John Numbi, dans le cadre du procès de l'assassinat de Floribert Chebeya, militant de l’ONG la Voix des sans Voix en juin dernier. Le chef des services spéciaux de la police de Kinshasa, Unyon Vakpa, a été entendu par la justice et dévoile les liens existant entre l'un de ses subalternes, Daniel Mukalay et le général John Numbi.
Depuis un mois et demi, le procès des huit policiers impliqués dans la mort du militant congolais des droits de l’homme Floribert Chebeya, tourne autour d'un acteur clé de l'affaire, mais grand absent du procès : John Numbi. Le chef de la Police est mis en cause par les parties civiles, qui dénoncent la protection des autorités dont il bénéficie. Il avait donné rendez-vous à Floribert Chebeya le jour de sa mort. Celui-ci a été retrouvé sans vie dans sa voiture le lendemain. L'entretien n'aurait jamais eu lieu. Numbi est actuellement suspendu de ses fonctions et placé en résidence surveillée, mais n'a jamais été entendu par la justice.
L'audition du général Innocent Unyon Vakpa est particulièrement instructive sur le rôle de Daniel Mukalay, l'undes principaux suspects et John Numbi. Selon le général Innocent Unyon Vakpa, Mukalay traitait directement avec Numbi alors qu'il n'était qu'un simple subalterne du général : "quand votre chef traite directement avec son subalterne en vous "sautant", ça frustre », a déclaré devant la justice le général Unyon. Et selon lui, Mukalay "aurait la protection de l'échelon supérieur de la police". Ce général a aussi révélé que John Numbi, l'inspecteur de la police congolaise, suspendu de ses fonctions après la mort de Chebeya, confiait à son insu des missions à Mukalay. Un témoignage très intéressant lorsque l'on sait que quelques jours après l’assassinat, le colonel Daniel Mukalay serait passé aux aveux et aurait expliqué n’avoir été qu’un "simple exécutant de John Numbi".
La prochaine audience de la cour militaire de RD Congo à Kinshasa est fixée au 6 janvier 2011.
Christophe Rigaud
19:09 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (1)
29 décembre 2010
RDC : Bemba probable candidat en 2011
Le MLC (Mouvement de Libération du Congo) fera visiblement cavalier seul pour les prochaines élections présidentielles de République démocratique du Congo (RDC) en novembre 2011. Le parti d'opposition présentera vraisemblablement la candidature de son "chairman", Jean-Pierre Bemba, ancien vice-président et candidat malheureux aux dernières élections de 2006 face à Joseph Kabila. Une candidature inédite, puisque Jean-Pierre Bemba est actuellement détenu à La Haye par la Cour pénale internationale (CPI). La présidentielle de 2011en RD Congo pourrait donc voir se présenter un "candidat-prisonnier"… si cela est juridiquement possible.
Même si le président sortant de République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, n'a pas encore annoncé son intention de se présenter à sa propre succession aux élections de 2011, les autres candidats commencent à sortir du bois. Il y a tout d'abord l'opposant historique Etienne Tshisekedi, 78 ans et actuel président de l'Union pour la Démocratie et le Progrès social (UDPS). Autre rival de poids à s'être déclaré : un ancien allié et fidèle du président Kabila, Vital Kamerhe, l'ex-président de l'Assemblée nationale congolaise. Vital Kamerhe, avait battu campagne en 2006 pour le candidat Kabila et largement contribué à la victoire du président dans l'Est du pays en 2006. Il a annoncé le 14 décembre avoir démissionné du parti présidentiel pour lancer sa propre formation politique : l'Union pour la Nation congolaise (UNC)et a commencé à sillonner le pays en vue des prochaines échéances présidentielles.
Et puis enfin, il y a l'ancien rival de Joseph Kabila au second tour de la présidentielle de 2006, le sénateur MLC Jean-Pierre Bemba, qui réalise un très bon score : 41, 95%. Seul problème pour le prochain scrutin de novembre 2011 : Jean-Pierre Bemba est en prison et a très peu de chance de se trouver en RDC en novembre 2011. Bemba est en effet détenu à La Haye par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité commises par ses troupes en République centrafricaine en 2002 et 2003. Comme solution de rechange, le MLC aurait pu présenter François Muamba, le secrétaire général du parti d'opposition. Mais depuis l'exil du "chairman" et son emprisonnement, Muamba peine à tenir ses troupes et ne fait pas l'unanimité au sein du MLC. Autre possibilité pour le MLC : une alliance avec un autre parti d'opposition… mais cette solution ne représente que des inconvénients pour un parti politique sensé être encore "leader" de l'opposition congolaise.
Alors faute de plan B, le MLC semble vouloir maintenir son plan A : la candidature Bemba… même en prison. Pour preuve, la déclaration à Paris d'Emmanuel Ikabanga, président du MLC-France, qui estime que Bemba est encore "le candidat naturel" du parti, selon la PANA. Pour lui, "le congrès prévu au premier trimestre de 2011 tranchera la question de la candidature à la présidentielle. Pour nous, le candidat du parti, c’est toujours Jean-Pierre Bemba". Mais rien n'est encore fait… les rumeurs d'un candidature Bemba ont aussi pour objectif de mettre la pression sur les négociations (toujours d'actualité) entre MLC et UDPS (via Clément Kanku)… mais également des pressions sur la Cour pénale internationale en vue d'une libération provisoire que réclame Jean-Pierre Bemba depuis plusieurs mois. Mais si juridiquement, la candidature Bemba est possible, on sent bien que le parti a envi de tenter le tout pour le tout. Réponse donc, au premier trimestre 2011.
Christophe Rigaud
Photo : JP Bemba aux élections de 2006 à Kinshasa © Christophe Rigaud www.afrikarabia.com
22:05 Publié dans République démocratique du Congo | Lien permanent | Commentaires (2)